Les facéties irakiennes de Mister K.
vendredi, 24 août 2007 | par Uriel Da Costa
Comme son nouveau mentor Nicolas Sarkozy, le bon docteur Kouchner aime les formules choc. Après le « droit d’ingérence », voilà qu’il nous fait le coup du « devoir de présence », en Irak s’entend.
On s’en souvient, le bon docteur Kouchner s’était montré très enthousiaste, dès les premiers bruissements de bottes annonciateurs de cette deuxième guerre d’Irak. Une bonne petite ingérence armée pour, non seulement amener la paix et la démocratie en Irak, mais aussi pour mettre la main sur les richesses naturelles du pays dont le sous-sol renferme les réserves d’hydrocarbures les plus importantes du monde après celle de l’Arabie saoudite. Résultat de cette magnifique exportation de la démocratie « occidentale » : plus de 300 000 victimes civiles, d’autres centaines de victimes civiles quotidiennes et un considérable acquis géopolitique : l’État-national irakien n’existe plus. Hormis un Kurdistan d’Irak quasiment indépendant, l’Irak n’en finit pas de s’abimer dans les guerres civilo-tribales, les affrontements maffieux et les PME du terrorisme salafiste, financées en droite ligne par les bailleurs de fonds saoudiens, par ailleurs grands alliés de Washington. Au-delà de la contradiction apparente, les crânes d’œuf du Pentagone appellent cette curieuse gestion de crise « l’instabilité constructive ». Pendant que les gueux se tapent sur la gueule, les affaires continuent d’être florissantes.
Dans ce contexte idyllique que notre bon docteur vient apporter sa contribution qui tourne une page de la diplomatie française. Sa récente visite est la première d’un ministre français des Affaires étrangères depuis le déclenchement de la guerre que Chirac, dans un bref sursaut de lucidité, n’avait pas voulu cautionner. Et Kouchner d’annoncer que ce « retour de la France en Irak » s’appuie sur trois piliers : 1) l’indispensable présence américaine ; 2) un engagement accru des Nations unies et 3) un programme de reconstruction.
La première facétie kouchnérienne est d’entériner l’occupation américaine comme un fait acquis alors qu’une des propositions de la diplomatie française formulait, traditionnellement un calendrier précis de retrait de « toutes » les troupes étrangères d’Irak comme un préalable nécessaire au rétablissement de la sécurité.
La deuxième pitrerie concerne un engagement accru de l’ONU alors qu’Anglais et Américains ont pris la responsabilité – faut-il le rappeler – d’engager cette guerre en ignorant superbement le Conseil de sécurité, organe exécutif des Nations unies, à qui l’on va demander aujourd’hui de reconstruire un pays détruit par les soldatesques anglo-américaines et leurs créatures salafistes. Voire, comme d’habitude, de solliciter les bourses des alliés pour soulager la charge qui pèse sur les contribuables américains.
Enfin, le pompon concerne la « reconstruction », comprenons l’engagement des grands investisseurs français dont, notamment – comme en Libye – Areva, pour le développement du nucléaire civil irakien… On croit rêver, d’autant que le brillantissime Michel Barnier, locataire fugitif du Quai d’Orsay, avait, en son temps, purement et simplement annulé 80% de la dette irakienne, comme si l’Irak était le pays le pays le plus dépourvu du monde nécessitant une telle mesure d’urgence.
La suite est prévisible. La sécurisation des nouveaux intérêts français en Irak nécessitera l’emploi de SMP (sociétés militaires privées) et pourquoi pas, à terme, l’envoi de soldats français ??? Enfin pourra se concrétiser la participation militaire française en Irak que souhaitait tant ce cher Bernard, tellement traumatisé par les « murs » en béton qui déchire Bagdad. Le bon docteur n’a jamais eu la même compassion face au mur israélien qui aliène pourtant la vie de plus de 300.000 palestiniens, mur de la honte vertement condamné par la Cour Internationale de justice de l’ONU, mais que les représentants éclairés des démocraties modèles continuent à qualifier de « barrière de sécurité ». Après ses initiatives éphémères pour le Darfour et le Liban, ses absences libyennes et européennes, les dernières facéties irakiennes du bon docteur risquent de ne simplifier ni l’Orient compliqué, ni la diplomatie de la France éternelle…
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