23/08/2007

La Carte d'Identité , ni obligatoire, ni démocratique CQFD

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Fédération informatique et libertés| 21 Aug 10:15

[actus_l] «Une carte dinspiration policière»
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Subject: [actus_l] «Une carte dinspiration policière»
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Date: 2007-08-21 08:15:11 GMT

http://www.libe.com/actualite/societe/273333.FR.php

«Une carte d’inspiration policière»
Pierre Piazza, professeur de sciences politiques, revient sur l’histoire
des papiers d’identité :
Par CHRISTOPHE LEHOUSSE
QUOTIDIEN : mardi 21 août 2007

Pierre Piazza est maître de conférences en sciences politiques à
l’université de Cergy-Pontoise. Spécialiste des questions
d’identification, il est l’auteur d’une Histoire de la carte nationale
d’identité (Odile Jacob, 2004) .

Comment en est-on arrivé à cette idée de carte nationale d’identité pour
justifier de sa nationalité ?

Au départ, la carte est d’inspiration purement policière. ­Elle procède
d’une volonté d’identification et descend en droite ligne des techniques
d’Alphonse Bertillon, commis à la préfecture de police de Paris qui
participera à la mise en place en 1912 de carnets ­anthropométriques pour
les nomades. La césure, c’est vraiment la IIIe Répu­blique avec
l’avènement de l’Etat-nation. Avant, il existait bien des documents
prouvant l’identité comme le passeport intérieur ou le livret ouvrier,
mais ils n’étaient pas vraiment fiables. A partir des années 1870-80, la
question de la nationalité prend de plus en plus d’importance. On commence
à vouloir distinguer les Français des étrangers qui étaient munis d’une
carte d’identité depuis 1916. En 1921 naît ainsi la première véritable
«Carte d’identité de Français», instaurée pour le seul département de la
Seine à l’initiative du préfet de police Robert Leullier. Dès lors, la
carte matérialise une appartenance commune à un même corps, la nation.

Sous couvert d’être un symbole d’intégration, la carte n’est-elle pas
aussi un instrument de contrôle ?

Ces deux problématiques sont en effet intimement mêlées : d’un côté, la
carte atteste d’une appartenance légitime à un corps social national. Mais
de l’autre, elle a un aspect répressif lié à l’usage que la police peut
faire des données contenues par la carte. Ces deux aspects n’ont
d’ailleurs pas cessé de ressurgir au cours de l’histoire. En 1955, dans un
souci de rupture avec le fichage de Vichy, un décret rend notamment la
carte facultative. Le discours officiel est d’en faire un outil
d’intégration, mais officieusement, on s’en sert au même moment pour
contrôler les Français musulmans d’Algérie. Plus récemment, en 1993,
l’Etat a profité du passage à la nouvelle carte informatisée, dite «carte
Pasqua» pour durcir notamment les contrôles à l’égard des Français nés à
l’étranger ou de parents étrangers. En considérant que le passage de la
carte papier à la nouvelle était équivalent à une première demande de
carte, l’Etat a mis beaucoup de citoyens français dans l’obligation de
prouver leur nationalité. On a ainsi jeté l’opprobre sur de nombreux
Français qui se sont sentis considérés comme des citoyens de seconde zone.

Comment expliquer le succès de cette carte alors qu’elle n’est pas
obligatoire ?

C’est en effet un peu paradoxal. C’est d’autant plus étonnant que cet
objet n’a pas franchement une histoire démocratique. Car jamais aucune
carte n’a été discutée devant le Parlement. Depuis la première, elles sont
toutes le fait de décrets ou de directives émanant soit de la préfecture
de police, soit du ministère de l’Intérieur. Seule exception, le projet de
carte d’identité biométrique porté depuis 2002 par Nicolas Sarkozy et gelé
en 2005 après un débat porté sur la place publique. C’était d’ailleurs un
des rares projets à vouloir rendre la carte d’identité obligatoire. Malgré
cet aspect non démocratique, la carte est aujourd’hui totalement rentrée
dans les mœurs.
Beaucoup de gens pensent même qu’elle est obligatoire. Certains apprécient
son aspect pratique, d’autres estiment qu’elle valide une appartenance à
la nation et qu’elle est un gage de respectabilité. Mais cette adhésion
s’explique aussi par tous les discours de persuasion que les pouvoirs
publics ont mis en place pour rendre populaire cette carte. Comme en 1993
: pour le passage à la carte informatisée, l’Etat avait lancé de grandes
campagnes de communication pour vanter les mérites d’une carte dite
infalsifiable. Qu’il veut pourtant à nouveau remplacer.
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