03/09/2007

Les anglais réclament un référendum sur le traité Européen

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Courrier International
accueil >> actualités : europe >> 3 sept. 2007
ROYAUME-UNI • Les Britanniques veulent voter sur l'Europe
L'opinion publique, la droite eurosceptique, mais également une partie de la majorité travailliste et certains syndicats font pression sur le Premier ministre britannique pour qu'il accepte d'organiser un référendum sur le futur traité européen. Une polémique qui risque de l'affaiblir dans son pays et en Europe.

On a toujours pensé que le legs le plus encombrant transmis par Tony Blair à son successeur serait la guerre en Irak. Mais c'est aujourd'hui la promesse faite en 2004 par l'ancien Premier ministre d'organiser un référendum sur une nouvelle Constitution pour l'Union européenne qui pose le plus gros problème à Gordon Brown. Enterré après son rejet par les électeurs français et néerlandais [en 2005], le texte initial a été remplacé en juin dernier par un projet tronqué de traité modificatif. Et les pressions s'acccroissent pour que cette nouvelle version soit soumise aux électeurs.

Gordon Brown, soucieux d'éviter un référendum qu'il a toutes les chances de perdre, a raison quand il affirme que Blair avait promis d'organiser un vote sur une Constitution pour l'Europe et que ce traité n'est pas une Constitution stricto sensu. Le projet vient modifier les traités européens existants plus qu'il ne les remplace. Reste que son contenu ne diffère guère de celui du texte initial. La disparition du préambule et des références au drapeau et à l'hymne européens, de même que la relégation en annexe de la Charte des droits fondamentaux sont des changements purement cosmétiques. De plus, d'autres chefs de gouvernement européens semblent convaincus que ce traité a tout d'une Constitution sauf le nom, et c'est également l'avis du père du document initial, Valéry Giscard d'Estaing.

Ce qui devrait sérieusement inquiéter Gordon Brown, c'est que la suspicion qui pèse sur le traité n'émane pas seulement d'une petite coterie d'antieuropéens de la droite du Parti conservateur. Le député travailliste Ian Davidson estime que le référendum est souhaité par pas moins de 120 de ses collègues de la majorité. Certains ministres, y compris celui de la Justice, Jack Straw, y seraient également favorables. Tout comme plusieurs syndicats importants. Et, pour couronner le tout, certains députés du Parti libéral-démocrate, mécontents de passer pour des proeuropéens compulsifs, presseraient leur dirigeant Menzies Campbell d'apporter son soutien à un référendum.

Le cas échéant, peu de députés travaillistes devraient désobéir aux consignes, et il est peu probable que Straw veuille précipiter le premier revers de son gouvernement au Parlement. Davidson indique qu'il ne militera pas en faveur d'un vote si Brown obtient la modification de douze points du traité, dont la suppression du poste de haut représentant de l'UE pour la politique étrangère. Brown a pourtant peu de chances d'arracher de nouvelles concessions lors des négociations qui vont culminer en octobre. Beaucoup, à Bruxelles et parmi les pays les plus favorables à l'approfondissement de l'Union, estiment déjà que Londres n'a que trop bien négocié en juin dernier. Et, tandis que Blair faisait figure de bon Européen, du moins au regard des normes britanniques, Brown n'est guère apprécié dans les cercles de l'UE.

Le nouveau Premier ministre britannique est loin d'être un homme politique limpide, et sa conception de l'Europe est particulièrement confuse. Certains, à Bruxelles, estiment que son mépris apparent n'est que le signe d'un dédain pour le formalisme diplomatique et non la preuve de sa méfiance envers l'Europe. D'autres interprètent son engagement en faveur de causes comme le développement international comme un indice d'une plus grande confiance dans les institutions mondiales que dans les organisations régionales.

Quoi qu'il en soit, Brown se retrouve confronté à un grave dilemme. D'une part, la tenue d'un référendum pourrait jeter un froid sur les relations entre l'Europe et la Grande-Bretagne jusqu'à la fin de son mandat ; sans compter qu'une victoire du non pourrait forcer cette dernière à remettre en question son adhésion à l'Union. S'il n'organise pas de référendum, en revanche, Brown risque de mécontenter l'opinion publique (80 % des Britanniques sont favorables à un vote), de s'aliéner le soutien durement acquis de la presse de droite, et de nuire à son image de dirigeant plus consensuel que son prédécesseur.

Contrairement à Blair, sauvé par les non français et néerlandais, Brown ne peut guère compter sur des événements extérieurs pour se tirer d'affaire, même si plusieurs de ses ministres espèrent en privé que le traité sera rejeté par d'autres pays. Il semble que Brown n'aura pas d'autre choix que de tirer à pile ou face – et espérer tomber sur le bon côté.

The Economist

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