23/10/2007

Lyon 2 se transforme en secteur R&D de l’industrie du

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Tract diffusé à l’université Lyon 2 lors de la venue de la ministre de
l’Enseignement Supérieur et de la Recherche à Lyon 2, mardi 16 octobre,
histoire de débattre de cas concrets sur la question de la privatisation de la
fac.

Généralisation de la vidéo-surveillance sur le campus de Bron, instauration de
la carte Cumul qui cumule surtout électroniquement nos activités sur la fac,
grillage du campus, existence de dossiers (complètement illégaux) sur les
personnes ayant des activités militantes [1]… Lyon 2 n’est pas en retard dans
la mise en place d’une société de contrôle. 21 Oct 11:46


http://rebellyon.info/article4349.html

L’université Lyon 2, laboratoire leader de l’industrie de la surveillance
Fédération Informatique et libertés

Publié mercredi 17 octobre 2007

Mais l’implication de Lyon 2 dans cette généralisation de la surveillance ne
s’arrête pas à ces aspects quasi-courants : dans les quelques pages qui
suivront, nous montrerons qu’elle est (ainsi que d’autres universités ou
écoles lyonnaises) au coeur des recherches et de la mise en place de nouveaux
dispositifs dans le domaine sécuritaire, dans le cadre d’une collusion entre
recherche, université et intérêts privés.

A l’heure de la loi Pécresse sur la privatisation des universités, ces
quelques pages nous semble un bon début pour discuter de la participation des
étudiantEs à ces projets de recherche, en tant que cobayes, main d’oeuvre ou
initiateurs, et de la pertinence de liens entre nos universités et le marché
du sécuritaire. TECHNO-VISION Du missile intelligent à la vidéosurveillance
intelligente

Les projets sécuritaires lyonnais forment un tableau qui débute au niveau
national.

En janvier 2007, la Commission Nationale Informatique et Liberté (CNIL)
donnait son accord pour la mise en œuvre de deux programmes de recherche sur
la biométrie [2]. L’un est mené par SAGEM Défense Sécurité, industriel de
l’armement et leader mondial en matière de biométrie. Il n’en sera pas
question dans ce qui suit. L’autre, le projet IV2 « Identification par l’Iris
et le Visage via Vidéo » est un partenariat français entre les pointures de la
recherche sur les technologies de l’information : INT, INST, INRIA, EURECOM
[3]… Le laboratoire LIRIS [4] de l’Ecole Centrale de Lyon participe à
l’aventure scientifique, comme les sociétés THALES (aéronautique et armement)
ou URATEK. C’est ce projet IV2 que nous allons aborder dans les lignes qui
suivent.

IV2 est inséré dans un programme plus ambitieux, TECHNO-VISION, soutenu
conjointement par les ministères de la Recherche et de la Défense. Lancé en
juin 2004, TECHNO-VISION a pour thèmes de recherche « la vision pour la
robotique, la vidéo-surveillance, la biométrie, le traitement d’images
aériennes et satellites » ou encore les technologies d’archivage vidéo [5].

- Parmi les dix projets financés dans le cadre de TECHNO-VISION, l’un d’eux,
ROBIN [6] se concentre par exemple sur l’imagerie terrestre et aéroportée,
avec en son sein des entreprises comme MBDA Missile System. Objectif : la
détection et la reconnaissance automatique d’ objet. Les chercheureuses
travaillent ici sur les missiles à guidage vidéo [7] ou missiles «
intelligents ».

- Le projet TOPVISION s’occupe lui d’imagerie sous-marine ; divers programmes
ont pour objet la vidéo-surveillance et un dernier concerne l’imagerie
médicale.

- IV2 est le projet concernant la biométrie : on s’affaire à Lyon, Paris et
Toulouse pour constituer les bases de données nécessaires aux recherches. Dans
trois des universités participantes, tout ce qui les peuple, (des étudiantEs
au personnel administratif en passant par les technicienNEs de surface) est
invité à se faire numériser par bouts : visages, iris et visages parlants.
Avec ces bases de données, le LIRIS École Centrale travaille entre autres à en
déduire des algorithmes qui permettront la reconnaissance informatique d’un
visage ou d’une iris par vidéo, tentant par là-même de mettre au point ce qu’à
l’Imperial College de Londres on affine déjà : la vidéo-surveillance capable
de reconnaître un visage, de le suivre sur bande vidéo et de l’identifier une
fois le système couplé à un fichier nominatif de visages numérisés.

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En matière de vidéo-surveillance intelligente couplée à la biométrie,
VISIONICS, l’un des plus gros du secteur aux Etats-Unis, détient un palmarès
étonnant : le scan du visage des 72 000 spectateurs du SuperBowl ; elle a déjà
vendu cette technologie au service d’immigration des Etats-Unis (qui s’en sert
à la frontière mexicaine) et à l’armée israélienne pour qu’elle surveille plus
et mieux la bande de Gaza [8].

Avant de continuer, petit rappel pour celles et ceux qui ont raté la
présentation FNAC du dernier ordinateur à sécurisation digitale : La biométrie
La biométrie consiste à informatiser des données morphologiques
(empreintes digitales, forme de la main ou du visage, iris) et biologiques
(ADN, odeur, sang). Elle est aujourd’hui utilisée principalement pour
l’identification et les contrôles de flux d’individus. Ainsi, dans certains
collèges et lycées, la cantine est équipée de bornes scannant la main des
élèves. Ou encore, HITACHI a développé un système relié directement au compte
en banque pour régler ses achats par lecture du réseau vasculaire du doigt. Un
autre exemple concerne notre future carte d’identité, prévue initialement pour
2006 et repoussée à 2009, qui mêlera biométrie et puces RFID (puce lisible à
distance) ; la puce contiendra nos empreintes digitales et notre photo du
visage numérisées, permettant une reconnaissance par informatique.

Quand l’université Lyon 2 se transforme en secteur R&D de l’industrie du
sécuritaire


Au LIRIS École Centrale de Lyon, à Ecully, il semble que l’esprit aiguisé des
chercheureuses n’ait pas résisté à l’attrait certain de ces recherches pour le
progrès humain. La concurrence avec l’Imperial College qui développe en ce
moment un nouveau concept de reconnaissance faciale pour les JO de 2012 [9]
doit être stimulante !

Né début 2003 à la suite du regroupement de plusieurs laboratoires de
recherche lyonnais, le LIRIS, (« Laboratoire d’informatique en images et
systèmes d’information », associé au CNRS), compte environ 280 personnes (sans
compter les centaines de doctorants). Divisé en quatre tutelles, à l’INSA de
Lyon, à l’Université Claude Bernard Lyon 1, à l’Ecole Centrale de Lyon et à
l’Université Lumière Lyon 2, il se répartit sur les campus de la Doua, Ecully
et Bron.

Le LIRIS Lyon 2 Bron, situé dans le bâtiment C au 1er étage, a cette
particularité d’être le partenaire très particulier d’une entreprise
spécialisée en vidéo-surveillance intelligente, la société FOXSTREAM.

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(Sur la plaquette de présentation de son logiciel FoxVigi, Foxstream affiche
son partenariat avec le CNRS et le LIRIS.)

Cette société base ainsi son activité commerciale sur les technologies issues
des recherches effectuées au LIRIS Lyon 2 Bron. Le travail effectué à Bron par
l’équipe du professeur Miguet sur les techniques de vidéo-surveillance
intelligente n’est pas aussi complexe que la reconnaissance des visages, mais
l’entreprise chargée « du transfert des technologies issues de la recherche en
traitement et analyse d’images effectuée au LIRIS [10] » peut maintenant se
targuer de vendre un produit high-tech : FoxVigi.

On est loin des dispositifs d’aide aux personnes médicallisées ou d’imagerie
médicale qui ont fait la réputation du LIRIS. Le transfert de savoir du
laboratoire public à la société privée est ici le plus simple possible :
l’entreprise a installé directement ses locaux dans le laboratoire LIRIS Lyon
2 Bron, en plein milieu du campus [11].


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(L’adresse de FOXSTREAM, ici entourée sur la plaquette de FOXVIGI, est bien
connue des étudiantEs de Lyon II.)

Son patron Jean-Baptiste Ducatez, tête de liste PS à Genas, commente : « Cette
proximité géographique avec des chercheurs reconnus internationalement dans ce
domaine est une source de richesse inépuisable pour la société Foxstream et
ses clients [12]. » Une richesse inépuisable... FOXSTREAM À la conquête du
campus, des TCL et du ministère de l’Intérieur ?

FOXSTREAM a commencé « petit » : depuis juin 2005, la société équipe les
caméras de l’université Lumière Lyon 2 [13] avec son logiciel FoxVigi.

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(Sur la brochure de FOXVIGI, quelques exemples des fascinants transferts de
savoirs possibles entre une université de Sciences Humaines et l’industrie de
la vidéo-surveillance.)

Le soutien institutionnel répété lui permet de voir plus loin : elle est
lauréate de l’association Rhône-Alpes Entreprendre, puis labélisée NOVACITE,
structure dépendant de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Lyon. Au
niveau national, elle se voit remettre différents prix, notamment par le
président-directeur général du groupe THALES (armement et aéronautique). Et
avec l’aide de 137 000 € d’Oséo (Oséo, « soutien à l’innovation »), la jeune
pousse lyonnaise voit grand. En janvier 2006, l’entreprise partait à la
conquête de Lyon. Le pôle industriel Lyon Urban Truck&Bus 2015 [14], un pôle
dit de compétitivité dans le domaine des transports financé par la région,
labellisait [15] son projet de vidéo-surveillance intelligente adapté aux bus
(poétiquement nommé Cerbère Vision), dans le programme « sécurité et sûreté ».
Le soutien des collectivités locales à cette entreprise peut laisser présager
l’implantation de ses technologies dans leurs transports en commun. FOXSTREAM
ne s’arrêtera pas là. Le 29 juin 2006, elle était invitée par le Service des
Technologies de la Sécurité Intérieure (STSI) du ministère de l’Intérieur pour
présenter son produit FOXVIGI [16]. La perspective de contrat est alléchante
puisque le STSI participe à la définition des achats du ministère pour les 3
années à venir. Associé au LIRIS de Bron, FOXSTREAM peut potentiellement
profiter des recherches en cours au LIRIS École Centrale sur la reconnaissance
du visage. L’industrie lyonnaise de la vidéo-surveillance intelligente a de
beaux jours devant elle… Militaro-civil, publico-privé, plus rien ne doit nous
étonner

En ces temps d’autonomie de l’Université, dans les locaux d’une faculté de
sciences humaines, la présence d’une entreprise à la conquête du marché du
sécuritaire est censée passer inaperçue. À Lyon donc, entre camarades
ÉtudiantE-chercheurEUSE on se biométrise dans des bases de données pour
décrocher son petit diplôme. Le transfert à l’industrie est rôdé. La fac,
mi-université mi-zone industrielle, se sert quant à elle de l’étudiantE comme
cobaye pour tester les logiciels de la société maison de vidéo-surveillance,
développée en partie par l’étudiantE. Avant que cette société n’aille
conquérir de nouveaux marchés, et que l’on se félicite de la vitalité de
l’économie locale ! La refonte de l’université et de la recherche avec
l’industrie suit donc son bonhomme de chemin. Le surf généralisé sur le «
sentiment d’insécurité » trace la voie des investissements.


Michèle Alliot-Marie ex-ministre de la Défense, actuelle ministre de
l’Intérieur (future ministre de la Recherche ?) commenterait : « il est plus
que jamais indispensable de dépasser les frontières entre militaire et civil
pour mutualiser nos expériences et nos savoir-faire [17] . »


[1] http://www.lyoncapitale.fr/index.ph.... L’administration nie encore
l’existence de ces dossiers rassemblant des photos de militantEs prises au
sein de Lyon 2 alors qu’elles ont été produites lors des procès.

[2] http://www.cnil.fr/index.php?id=219...

[3] Institut National des Télécommunications, Ecole Nationale Supérieure
des Télécommunications, Institut Nationale de Recherche en Informatique et en
Automatique, EURECOM à Sophia Antipolis.

[4] Laboratoire d’infoRmatique en Image et Systèmes d’Information.
http://www.technologie.gouv.fr/appe...

[5] http://www.technologie.gouv.fr/appe...

[6] http://robin.inrialpes.fr/DatasetsD...

[7] Tir hors de la vue directe : détection et localisation précise de la
cible, transmission d’images, guidage à distance de la munition,
automatisation de certaines action afin de limiter le temps de réaction. Ce
concept, basé sur le traitement vidéo en temps réel, est développé par la
Délégation Générale pour l’armement (DGA), notamment au sein du projet BOA
(Bulle Opérationnelle Aéroterrestre). Pour plus d’information, consulter le
lien interne du site de la DGA accessible par
http://www.defense.gouv.fr/dga/votr... .

[8] http://www.transfert.net/a7146

[9] http://www.bulletins-electroniques....

[10] http://www.univ-lyon2.fr/KSLAB_LIRI...

[11] http://www.foxstream.fr/site/index....

[12] Idem 11.

[13] « Il y a un an, l’université Lyon 2 est devenue l’une des premières
références importantes de Foxstream. L’université a déployé un système de
vidéosurveillance d’une vingtaine de caméras utilisant l’offre FoxVigi de
Foxstream » http://www.foxstream.fr/site/index....

[14] http://www.entreprendre.grandlyon.c...

[15] http://www.foxstream.fr/site/index....

[16] http://www.foxstream.fr/site/index....

[17] Grenoble, 2005. Extrait du discours de Michel Alliot Marie à propos
de MINATEC et du pôle de compétitivité Minalogic, « pôle de compétitivité
mondial articulant de manière féconde recherche - formation - industrie,
acteurs publics et privés, dans des partenariats efficaces et créatifs de
valeur en faveur de l’innovation ». Cet exemple grenoblois est un des exemples
français les plus frappants en ce qui concerne l’enchevêtrement des politiques
publiques et les intérêts privés, entre recherche, industrie, armée et
université. Pour un démontage critique du laboratoire grenoblois,
http://pmo.erreur404.org/





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