La colère gronde contre la réforme de la cour d'appel de Paris
il y a 30 min
AP Verena von Derschau
La colère des magistrats de la cour d'appel de Paris monte contre "le projet de modernisation" concocté par leur Premier président, Jean-Claude Magendie, une réforme qualifiée de "dérive autocratique" par les représentants des deux principaux syndicats, SM et USM, qui ont décidé de boycotter la traditionnelle rentrée solennelle de la cour vendredi matin.
"La cour d'appel de Paris est un des lieux stratégiques de la justice française", soulignent le Syndicat de la magistrature (SM) et l'Union syndicale des magistrats (USM), soutenus par l'UJAF, le syndicat des greffiers et du personnel administratif. Plus de 45.000 décisions sont rendues tous les ans par la cour d'appel qui comprend 70 formations de jugement, sans compter les assises, et s'étend sur 85 juridictions.
"Cette reprise en main intervient au niveau national par les atteintes à l'indépendance de la justice, mais aussi plus sournoisement dans les juridictions par le biais de chefs de juridiction tout-puissants", a noté Emmanuelle Perreux, la présidente du SM, rappelant que c'est M. Magendie, pourtant un magistrat du siège, qui avait évoqué en premier dans une interview, la suppression du juge d'instruction annoncée mercredi par Nicolas Sarkozy.
Les magistrats de la cour d'appel s'inquiètent surtout de la réorganisation de la cour d'assises de Paris en "pôles spécialisés" dont l'un serait affecté à la grande criminalité et au terrorisme, ainsi que des faibles moyens alloués aux chambres sociales.
Ils fustigent aussi la méthode. "Le 21 novembre dernier, 70 magistrats ont appris un vendredi soir, par mail, qu'ils étaient déplacés d'office", dont plusieurs des 14 présidents d'assises "unanimement reconnus pour leurs qualités professionnelles", s'est insurgée Simone Gaboriau du SM. "La concertation a été une pseudo-concertation", a renchéri Valérie Dervieux de l'USM.
Le président Magendie estime au contraire que la réorganisation de la cour et la réaffectation de certains magistrats en poste depuis de longues années, ainsi qu'une spécialisation des formations de jugement conformément à ce qui se fait déjà au parquet est un préalable à une justice plus moderne et plus efficace.
Les syndicats rappellent de leur côté que plus de 15.000 affaires sont en attente de jugement devant les chambres sociales de la cour d'appel, soit l'équivalent de 18 mois d'audiences. Un appel déposé aujourd'hui, ne sera pas examiné avant septembre 2010, ont-ils insisté, qualifiant la création d'une nouvelle chambre sociale, qui absorbera aussi du contentieux traité actuellement au pénal, de "poudre aux yeux".
Pour marquer leur désaccord devant le "manque de concertation", les deux syndicats ont appelé leurs membres à boycotter l'audience de rentrée solennelle. Ils ont été rejoints sur ce point par l'Association de la presse judiciaire qui, pour la première fois en plus de 120 ans, a également décidé de ne pas se rendre à cet événement pour protester contre la "dégradation des conditions de travail des journalistes" au palais de Justice de Paris et la "défiance" dont ils font régulièrement l'objet de la part des autorités. AP
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