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Sarkozy affiche clairement la prédominance de l'Elysée sur Matignon
Par Tristan MALLE
PARIS (AFP) - En prononçant devant les parlementaires de sa majorité mercredi un discours qui avait toutes les allures de déclaration de politique générale de Premier ministre, Nicolas Sarkozy a affiché clairement la prédominance de l'Elysée sur Matignon.
"Il est clair que c'était un discours de programme gouvernemental. Je ne vois pas très bien ce que François Fillon va pouvoir dire dans quelques jours devant les députés", se demandait mercredi le constitutionnaliste Didier Maus.
Toutefois, si ce discours manifeste une évolution de la pratique présidentielle, elle correspond à ce qu'avait annoncé Nicolas Sarkozy lui-même avant son élection.
Lors de ses voeux à la presse en janvier 2006, il avait déjà affirmé qu'à ses yeux, le président "doit exercer les responsabilités du pouvoir et personne d'autre", car "le pouvoir doit être dans les mains de celui qui a été élu".
Dans son discours d'investiture le 14 janvier 2007 Porte de Versailles, M. Sarkozy était revenu sur le rôle du "président leader" qui doit "s'engager non seulement sur les grandes options, mais aussi tout ce qui concerne la vie des Français".
"C'est un Président qui s'explique devant le parlement, qui gouverne, qui assume (...) On élit un leader qui dira, avant, tout ce qu'il fera et surtout qui fera, après tout ce qu'il aura dit", avait-il lancé.
Une définition qui ne cadre pas vraiment avec la lettre de la Constitution: elle stipule à son article 20 que "le gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation".
Mais si l'intervention du chef de l'Etat "marque une amplification forte, visible de la prédominance présidentielle, elle ne constitue qu'une prolongation d'une tendance antérieure", selon Didier Maus.
Depuis Charles de Gaulle en effet, tous les présidents de la Ve République ont, dans la pratique, affirmé le rôle prééminent du chef de l'Etat dans la conduite des affaires de la nation.
Lors de sa première conférence de presse suivant son élection le 15 juin 1969, Georges Pompidou rend ainsi publique la "doctrine" qui guidera son action, avant même que son gouvernement ait présenté son programme.
Et en 1981, François Mitterrand assure que ses 110 propositions constitueront la charte d'action du gouvernement.
"D'un strict point de vue institutionnel, il n'y a rien de nouveau sous le soleil", affirme le constitutionnaliste Guy Carcassonne. "Le second septennat de François Mitterrand et les deux mandats de Jacques Chirac l'ont peut-être fait un peu oublier, mais cela se pratiquait aussi bien sous Mitterrand que sous Giscard ou Pompidou". "Tous ceux qui y voient une inflexion due au quinquennat manquent un peu de mémoire", souligne-t-il.
Didier Maus voit même une "vraie analogie en terme de comportement" entre le Sarkozy de 2007 et le Mitterrand de 1981: même volonté d'aller vite et d'utiliser le mois de juillet pour faire voter les premières réformes.
La seule différence, selon lui, est que François Mitterrand n'avait pas la même "pratique hyperactive" et ne "cherchait pas autant à occuper le devant de la scène".
Si l'actuel président s'implique ainsi dans l'action gouvernementale quotidienne, c'est que "depuis le 6 mai au soir, il est dans l'optique 2012", assure M. Maus. "C'est le candidat, l'homme d'action qui, par dessus les députés UMP, s'adressait aux électeurs".
Et qui entend reprendre l'offensive après les résultats plutôt décevants des législatives pour la majorité.
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