14/06/2007

Le retour des charters

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Chasse aux sans-papiers et politique de quotas : Hortefeux veut adapter les flux aux besoins du marché du travail



L'objectif fixé par Brice Hortefeux est clair : dans ses enquêtes sur l'immigration irrégulière, la police devra procéder, cette année, à 125 000 « mises en cause » devant la justice et obtenir 25 000 « éloignements » . Le ministre de l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité nationale et du Codéveloppement veut renforcer le contrôle des flux migratoires. D'abord en durcissant les conditions de regroupement familial par une loi, dès la session extraordinaire de juillet. Ensuite en définissant des « plafonds annuels d'entrées par catégorie » dans le cadre de l' « immigration choisie » dans une seconde loi qui sera examinée à la fin de l'année. Les premières victimes de ces nouvelles mesures sont évidemment les sans-papiers. Raccompagnés dans leur pays d'origine de manière volontaire ou contrainte, ils ne pourront se prévaloir d'enfants scolarisés pour obtenir automatiquement un droit de séjour octroyé « au cas par cas par le préfet » . D'autre part, seuls les migrants prouvant qu'ils peuvent vivre des revenus de leur travail, disposer d'un logement décent et qu'ils maîtrisent la langue française pourront bénéficier du regroupement familial. Ce durcissement pourrait affecter aussi les réfugiés. Outre la Direction des Visas, placée maintenant sous l'autorité conjointe des Affaires étrangères et de son propre ministère, Brice Hortefeux dispose désormais de la tutelle de l'Ofpra. Il pourrait ainsi se montrer plus sévère dans l'octroi de visas diplomatiques lorsque les demandeurs d'asile se révéleront de simples « recalés » des procédures classiques. Selon Brice Hortefeux, cette « fermeté » permettra plus d' « humanité » dans l'intégration des « légaux », la lutte contre les « filières qui exploitent la misère des clandestins » étant par ailleurs renforcée. Pragmatique, le nouveau ministre a annoncé que les permis de travail seraient donnés en priorité pour les secteurs qui manquent de main-d'oeuvre. Gagnants, les entrepreneurs du bâtiment, de l'hôtellerie et certaines entreprises de pointe qui se plaignent des difficultés de recrutement. Le nombre de ces migrants ne devrait pas toutefois excéder quelques dizaines de milliers. Car l' « immigration choisie » - qui se propose, comme le souligne Patrick Weil, de « substituer à l'immigration fondée sur des droits celle sélectionnée par le marché du travail » - se heurte au principe de réalité. Selon le directeur de recherche au CNRS, spécialiste de l'immigration,
« cette substitution, au prix de l'atteinte au droit de se marier ou de vivre en famille », est non seulement « inacceptable » , mais illusoire, car « on ne peut pas empêcher durablement un père ou une mère de vivre avec son conjoint ou ses enfants » . Résultat : les familles d'étrangers entrés légalement sur le territoire continueront à venir en France dans l'illégalité et la nouvelle législation risque donc d'augmenter le nombre de sans-papiers.



Jean-Gabriel Fredet
Le Nouvel Observateur

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