LE MONDE ECONOMIE | 12.09.07 | 09h40
Oubliés les ministres d'Etat, ministres, ministres délégués et secrétaires d'Etat. Nicolas Sarkozy a établi une nouvelle hiérarchie : il y a les ministres invités à passer leurs vacances avec le président, ceux qui peuvent figurer dans le public lors des prestations télévisées des lieutenants du chef de l'Etat, et ceux qui sont convoqués dans le bureau du secrétaire général de l'Elysée pour s'entendre dire que "le président n'a pas apprécié" leurs déclarations…
Dans la catégorie de ceux qui, quoi qu'il arrive, semblent bénéficier d'un soutien inconditionnel du chef de l'Etat, on trouve d'abord ceux avec qui il fait de la politique. C'est le cas du ministre de l'immigration, Brice Hortefeux, du secrétaire d'Etat chargé des anciens combattants – et, à l'UMP, des élections –, Alain Marleix, ou du secrétaire d'Etat chargé des relations avec le Parlement, Roger Karoutchi.
Mais la plus soutenue est sans conteste la ministre de la justice, Rachida Dati. Symbole de l'intégration, porte-parole du candidat pendant la campagne, amie de Cécilia Sarkozy : elle cumule les atouts. Ni sa réputation d'autoritarisme qui a fait fuir la moitié de son cabinet ni ses déclarations qui ont choqué les magistrats n'ont changé les attentions du président.
Outre les marques de sympathie publiques qu'il lui a adressées avant l'été, il l'a fait monter dans sa voiture lors de certains déplacements, comme en Corse, il y a deux semaines, alors que Michèle Alliot-Marie devait héberger dans la sienne le préfet."Elle, elle est débranchée de partout", s'amuse un conseiller.
Plusieurs "poids lourds" politique du gouvernement lors de sa constitution n'en sont déjà plus. "MAM", encadrée dès le départ avec le contrôle des nominations à son cabinet et le choix par le président de fidèles à la tête de la police et des services secrets, a du mal à trouver sa place dans le paysage gouvernemental.
Jean-Louis Borloo, déchu de Bercy après sa gaffe sur la TVA sociale, se sent à l'étroit dans son grand ministère du développement durable. Il s'est plaint à MM. Guéant et Fillon : "Je ne suis pas pris au sérieux."
SENTIMENT D'ABANDON
D'autres ministres connaissent la disgrâce, comme Christine Lagarde, présentée encore au début de l'été comme l'une des "trouvailles" du gouvernement. "La première femme à diriger Bercy, même la gauche ne l'a pas fait", s'enthousiasmait alors Nicolas Sarkozy qui confiait à ses conseillers : "Si elle suit mes conseils, elle ira loin."
Depuis sa sortie sur la rigueur dans la fonction publique, le président lui en veut. "C'est toujours l'amour, mais il n'est plus réciproque", explique un proche du président.
Eric Woerth, ministre du budget, veut croire pourtant que "l'équipe gouvernementale est unie autour du président et que chacun peut y trouver sa place à partir du moment où il fait la démonstration qu'il peut y être utile".
C'est d'ailleurs le mot d'ordre que le président a fixé à ses ministres : "Rendez-vous indispensables." A l'outre-mer, Christian Estrosi, bien servi par l'actualité et par sa connaissance intime du président, a, lui, tout de suite compris. Depuis, Nicolas Sarkozy cite en exemple sa "réactivité".
Comme un entraîneur d'une équipe de football, il promeut les uns, les cajole, et laisse mariner les autres sur le banc de touche. Il reçoit peu ses ministres en tête à tête, excepté François Fillon. "Le voir est devenu un luxe", se plaint l'un d'entre eux.
D'où un possible sentiment d'abandon pour certains. C'est le cas de celui du travail, Xavier Bertrand : "Il était porte-parole, premier ministrable, rappelle un visiteur du président. Maintenant, il rédige un communiqué à chaque fois qu'il reçoit un syndicaliste. Il souffre."
Christophe Jakubyszyn et Philippe Ridet
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