10/09/2007

A la CRS 7, abuser des prostituées "c'était comme avoir un sandwich à tarif réduit"

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A la CRS 7, abuser des prostituées "c'était comme avoir un sandwich à tarif réduit"
LE MONDE | 08.09.07 | 14h05 • Mis à jour le 08.09.07 | 14h05

Normaux, résolument normaux. Familles unies, enfances heureuses, scolarité tranquille. Un concours réussi, une entrée dans la carrière, une compagne, un pavillon à crédit et un enfant juste né ou à naître. Et pourtant, ils sont sept anciens membres de la compagnie CRS 7 à comparaître depuis vendredi 7 septembre devant la cour d'assises de Paris pour viols aggravés ou complicité de viols. Les accusations remontent à 2003. Une jeune prostituée albanaise, Irini Pasho, s'était confiée à l'animatrice d'une association d'aide, l'Amicale du nid.

Avec une de ses voisines de trottoir, elles avaient été interpellées sur un boulevard parisien par trois policiers en uniforme et invitées à monter dans un fourgon au prétexte de vérification d'identité, puis embarquées sur un parking d'autoroute. "Une pipe et l'amour", c'était le tarif pour éviter la préfecture et l'expulsion, disaient-ils. Lorsqu'Irina Pasho avait menacé de porter plainte, les trois policiers lui avaient ri au nez. Elle l'a fait et ils sont là, tout près d'elle, dans le prétoire, les épaules basses et le regard honteux.

L'enquête confiée à l'inspection générale des services (IGS) avait rapidement confirmé les dires de la jeune prostituée et permis d'identifier les trois principaux accusés, Romaric Leclercq, Yohann Mahe et Cyril Dussart, qui ont effectué six mois de détention provisoire. Mais elle révélait aussi les dérives de la section 5 de la compagnie CRS 7, normalement affectée à la sécurité sur les autoroutes et à la surveillance du Stade de France les soirs de manifestations. Dans les chambrées de la compagnie, on se racontait volontiers les virées nocturnes sur les boulevards des Maréchaux, totalement hors secteur de compétence de la CRS 7, et tous les avantages qu'on pouvait tirer de l'uniforme : des repas à bas prix chez les commerçants, un accueil soigné dans un club échangiste et des prostituées en libre-service. "Bonsoir chérie, est-ce que ça va ? Tu as tes papiers ?", demandaient-ils ou encore, pour convaincre les récalcitrantes, un chantage voilé : "Je fais pour toi petite surprise, tu fais pour moi petite surprise..."

Quatre autres jeunes hommes, accusés d'avoir participé à des degrés divers à ces dérives ou de ne pas les avoir dénoncées, ont à leur tour été mis en examen et renvoyés devant la cour d'assises.

"SERVIR LE PAYS"
Hier copains de virées, c'est tout juste s'ils se saluent aujourd'hui. Les trois principaux accusés ont été révoqués de la police nationale, les autres ont été suspendus en attente du jugement. Leurs parcours se ressemblent tant qu'ils se confondent. "J'étais pas dans les meilleurs, j'étais pas dans les derniers, j'étais dans la moyenne", "J'ai jamais eu de problèmes avant", répètent-ils, en réponse aux questions du président Dominique Coujard qui s'étonne de ces existences lisses, fluides. Des origines provinciales, une scolarité suivie jusqu'au baccalauréat et parfois un peu au-delà, des années de scoutisme ou de pompiers volontaires, beaucoup de sport, l'armée et le concours de gardien de la paix, une "vocation", disent-ils, pour "servir le pays, apporter quelque chose aux gens, la sécurité". L'affectation à la CRS 7 était souvent leur premier poste. Quelques mois de stage et une titularisation rapide. Dans leur dossier professionnel, les notations sont correctes. Des recrues sans histoires, pour leur hiérarchie. Elle sera citée comme témoin au procès. "Vous aviez un tuteur, un gradé qui s'occupait de vous ?", demande l'avocat général Philippe Bilger. "Non. A la CRS 7, on est très vite livré à nous-mêmes. Il n'y a pas de tutelle, ça peut vite déraper", admet Yohann Mahe. "Il y a sans doute l'effet de groupe. On avait une fascination pour la nuit, on était loin de chez nous, on buvait, on avait des passe-droits...", observe Cyril Dussart.

Depuis leur remise en liberté, les trois principaux accusés ont fait un deuxième enfant à leur compagne, retrouvé un travail. Ils sont imprimeur, intérimaire, ambulancier. Les familles sont venues les soutenir, les employeurs aussi. En choeur, ils confient leur "honte" d'être là aujourd'hui et reconnaissent la gravité de ce qui leur est reproché. Il leur a fallu un peu de temps pour cela. Au juge d'instruction, l'un d'eux avait confié, à propos des relations sexuelles imposées aux prostituées : "C'était comme le fait d'avoir un sandwich à tarif réduit..."
Pascale Robert-Diard
Article paru dans l'édition du 09.09.07.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Il y a eu 3 accusés...Combien sont-ils à ne pas avoir été inquiétés? Les autres continuent leurs abus de pouvoir...c'est à "gerber".

cat a dit…

ça c'est quand , on est persuadé qu' il existe des humains de seconde zone, prostituées, étrangers sans papier,malades mentaux, etc..la liste est longue..l'égalité est un concept, pas toujours partagé.

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