13/09/2007

lettre ouverte aux forces de l’ordre

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Des citoyen.ne.s français.es écrivent aux forces de l’ordre

Mesdames et Messieurs les membres des forces de l’ordre,

Citoyennes et citoyens de France, nous souhaitons vous dire simplement et sans hargne un tout petit peu de notre douleur et de notre fureur, pour avoir été témoins ou eu connaissance d’expulsions d’enfants et de familles vers des pays où la misère et où les risques de mort sont bien connus.

Nous savons que ce n’est pas de gaîté de cœur que certaines et certains d’entre vous accomplissent de telles missions au service d’une politique « forte » qui veut effrayer, croyant (ou feignant de croire ?) que cela aura un effet de dissuasion sur les personnes qui pensent immigrer.

Ce qui est aussi très difficile à accepter, c’est la transformation du rôle de la police et de la gendarmerie. La raison d’être de ces institutions n’est-elle pas en effet de protéger la population et de lui permettre de vivre en sécurité ? Rôle dont nous mesurons pleinement l’importance et la difficulté.

Pourtant, ces personnes qui ont immigré, non seulement ne nous agressent pas, mais sont nos voisin.e.s, nos ami.e.s, nos élèves. Elles n’ont commis d’autre délit que de n’avoir pu obtenir des documents de séjour (parfois même en raison d’erreurs de l’administration, de changement des lois ou de telle politique opportuniste).

Nous nous demandons ce que peuvent ressentir celles et ceux d’entre vous qui, sous la pression des « objectifs chiffrés de résultats », acceptent un ou plusieurs des actes suivants (ou, pour quelques-un.e.s peut-être, choisissent d’aller au delà de ce qui leur est demandé) :

– aller chercher des enfants dans ou près de leur école pour les conduire en centre de rétention ; – convoquer des familles en leur faisant croire qu’elles vont recevoir leurs papiers alors que ce stratagème conduira à leur arrestation ; – enfoncer des portes derrière lesquelles se tiennent des enfants terrorisé.e.s ; – utiliser des gaz lacrymogènes comme le feraient des personnels du GIGN en cas de menace imminente majeure ; – menotter et malmener des parents sous les yeux de leurs enfants ; – étouffer des personnes refusant d’embarquer, au point que certaines en sont mortes ; – accompagner dans l’avion des personnes qui seront violentées ou, pour certaines, tuées à l’arrivée ; – pratiquer le chantage, l’intimidation, brandir les termes « d’outrage » ou de « rébellion », oubliant les droits des administré.e.s ; – menacer les citoyen.ne.s qui protestent contre de telles violences.

Nous ou nos proches avons été témoins de ces situations indignes de notre pays, la France.

Mais il y a aussi d’autres petites victimes de cette politique et, un jour peut-être ce seront vos propres enfants qui vous poseront des questions à la suite de la disparition d’un.e de leur camarade. Nombre d’enseignant.e.s et de parents peuvent déjà témoigner, hélas, des traumatismes qui frappent les enfants de leur école.

Il se peut que la lecture de ce texte suscite comme défense le sentiment de ne faire qu’obéir aux ordres. Nous pouvons le comprendre mais non l’accepter : d’autres ont déjà répondu la même chose à une triste époque pas si lointaine. L’Histoire les a jugés, comme elle a su reconnaître celles et ceux qui ont pris la responsabilité de la désobéissance civile et morale.

Au demeurant, nous voudrions rappeler qu’aucune loi ne dispense de respecter les droits humains fondamentaux, qu’aucun ordre ne peut conduire à humilier, molester des gens sans défense. Même dans l’armée, l’obéissance aux ordres reconnaît une limite : celle de la conscience personnelle.

Nous respectons la police quand elle contribue à l’harmonie de la société mais nous ne voulons pas que, malgré l’honnêteté d’une majorité d’entre vous, cette société ne puisse plus supporter l’image globale qu’en donne une minorité. Loin de condamner cette minorité de vos collègues, nous pensons que vous pouvez les aider à retrouver les chemins qui honorent, en tirant la solidarité vers le haut.

C’est donc à un sursaut collectif que nous vous appelons, seul espoir pour que la nation se réconcilie avec vous, avec les institutions chargées de protéger les personnes. En cela, vous aurez su tirer à temps les leçons de l’Histoire. Si vos organisations professionnelles, vos syndicats portent sur la place publique une parole forte, témoignant de votre refus que votre mission soit dévoyée, alors, avec nous, le pays vous soutiendra.

Des citoyennes et citoyens qui défendent la dignité de toutes les personnes, les sans papiers comme les forces de l’ordre.

RESF 06 s’associe à cet appel.

Tous les citoyens et citoyennes qui le souhaitent peuvent reprendre cette lettre à leur compte et l’envoyer, eux aussi, aux organisations de policiers, de gendarmes, de CRS (voir annuaire).




De : RESF 06
LU SUR bellaciao

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