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Par Par Andrea BAMBINO AFP - Dimanche 30 décembre, 17h55
PARIS, 30 déc 2007 (AFP) - Le gouvernement s'est doté d'un outil supplémentaire dans son arsenal contre l'immigration clandestine avec la création d'un fichier des étrangers expulsables, qui revient dans une mouture expurgée de certains des aspects les plus controversés du projet initial.
Le décret, en date du 26 décembre et paru dimanche au Journal officiel, crée un fichier automatisé de "données à caractère personnel relatives aux étrangers faisant l'objet d'une mesure d'éloignement" pour permettre "le suivi et la mise en oeuvre" de ces mêmes mesures.
Cet instrument voit le jour alors que le gouvernement peine à atteindre ses objectifs en la matière: sur les 25.000 expulsions fixées pour 2007, 21.000 étaient effectives fin novembre (500 de moins qu'en 2006 à pareille époque).
Baptisé Eloi -- comme éloignement --, ce fichier avait déjà été créé par un arrêté du ministère de l'Intérieur en juillet 2006. Mais à la suite d'un recours d'associations, le Conseil d'Etat l'avait annulé en mars 2007, estimant qu'un tel outil devait donner lieu à un décret et passer par la Commission nationale de l'informatique et des libertés. La Cnil, dans un avis du 24 mai 2007, a pris acte des garanties présentées par le gouvernement.
Dans sa nouvelle version, le fichier permettra toujours d'enregistrer une multitude de données sur un étranger expulsable: état-civil, identité des parents et des enfants, langues parlées, état de la procédure le concernant ou "nécessité d'une surveillance particulière au regard de l'ordre public."
Si l'étranger est assigné à résidence, l'identité et l'adresse de l'hébergeant figureront dans le fichier.
Toutefois, ces données devront être effacées "au plus tard trois mois" après la fin de l'assignation, un délai plus court que dans le projet initial.
Par ailleurs, le décret ne fait plus mention de l'enregistrement des données relatives aux visiteurs d'une personne placée en rétention administrative, l'une des mesures les plus critiquées à l'époque par les associations.
Si certaines données seront conservées seulement "trois mois après la date de l'éloignement effectif", celles concernant l'identité ou la filiation pourront être conservées trois ans.
Le fichier sera accessible aux agents des services centraux du ministère de l'Intérieur, des services préfectoraux et des services de gendarmerie ou de police "spécialement habilités".
Il est "inattaquable au plan juridique", a-t-on affirmé au ministère de l'Immigration et de l'Identité nationale, il a été "approuvé dans sa nouvelle version par la Cnil et par le Conseil d'Etat".
Les associations, que le ministère assure avoir régulièrement consulté sur le sujet, voient elles de "sérieux progrès" ou davantage de "garanties juridiques", mais les critiques persistent.
Pour le directeur général de France Terre d'Asile, Pierre Henry, le fichier s'inscrit encore "dans une philosophie +Big Brother et Père Fouettard+ qui tend à faire de l'immigration une question d'affrontement permanent". Les étrangers continueraient selon lui d'être assimilés à des délinquants.
Le président de la Ligue des droits de l'Homme, Jean-Pierre Dubois, s'est félicité de la réduction de trois ans à trois mois de la durée de conservation de certaines données, mais s'est demandé pourquoi cela excluait les enfants des étrangers. "Pourquoi faudrait-il conserver ces données pendant trois ans, sauf à vouloir faciliter la traque des enfants dans les écoles?".
"Le chemin n'a été fait qu'à moitié", a résumé le secrétaire général de la Cimade, Laurent Giovannoni.
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