17/02/2008

Chic dehors dégueu dedans

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Hôtellerie . Dans l’un des quartiers les plus prestigieux de Paris, les salariés du restaurant avenue de la Grande-Armée ont entamé une grève pour demander leur régularisation.









dimanche 17 février 2008 (17h10) :
Chez Costes, les cuisiniers sont en grève pour des papiers

de Mehdi Fikri
Vu sur BELLACIAO

Hôtellerie . Dans l’un des quartiers les plus prestigieux de Paris, les salariés du restaurant avenue de la Grande-Armée ont entamé une grève pour demander leur régularisation.

Devant le restaurant, Jean-Claude Amara, de Droits devant !, précise d’emblée : « Ce n’est pas un cas isolé. Le groupe Costes possède 28 en-seignes à Paris et je mettrais ma main à couper que c’est partout pareil ». La Grande Armée est un de ces restaurants huppés où la serveuse est blonde et les cuisiniers sans-papiers. Mais mercredi, banderoles et drapeaux dissimulaient la vitrine et les lettrines dorées.

Mahamadou, Djimé, Fodié, Moussa, Ibrahim, Tama, Ladji et les deux Mamadou sont assis dans un coin de la salle. Calmes, discrets, les traits tirés. Ils s’apprêtent à passer la nuit ici. En grève illimitée, soutenus par la CGT et l’association Droits devant !, ils demandent leur régularisation et dénoncent leurs conditions de travail.

« L’hypocrisie est totale : l’exploitation des sans-papiers est une manne incroyable pour l’économie française », lâche Raymond Chauveau, de la CGT. Les neuf cuisiniers occupent chacun quatre postes : à

la cuisine, au nettoyage, à la plonge et au bar. Ils travaillent de dix à onze heures par jour, cinq jours par semaine pour 35 heures hebdomadaires déclarées. Sans compter les heures supplémentaires quasi obligatoires les jours de repos. Ils achètent et lavent eux-mêmes leur tenue de travail. Ils prennent leur repas le plus vite possible, souvent debout. Lorsqu’ils font la fermeture, à 2 heures du matin, ils « galèrent pour rentrer », car le transport est à leur charge. Chaque fois qu’ils veulent prendre un congé, la direction les oblige à signer une lettre de démission, pour éviter de payer. Et à leur retour, le salaire est « renégocié à la baisse », selon Jean-Claude Amara. Enfin, ils écopent de temps en temps d’un petit « Fais attention hein, avec ta situation… », histoire de les faire filer droit.

Le gérant, Bruno Garcia, a déclaré qu’il n’était « pas au courant ». Pas au courant que, dans son restaurant, des sans-papiers triment depuis des années. Huit ans pour le plus ancien. « Mais trois d’entre eux ont travaillé sous deux identités différentes », s’étrangle Raymond Chauveau. Fodié Koné montre la copie d’une lettre, envoyée à lui et à son patron en novembre 2003. La Sécurité sociale lui rappelle qu’il « ne peut être affilié à un régime de protection sociale » que s’il peut justifier d’une situation régulière. « J’avais vu sur nos fiches de paye qu’on cotise pour tout, alors qu’on n’a droit à rien. Une fois, je me suis brûlé le bras contre le four. J’en ai eu pour 400 euros de soins non remboursés et trois semaines d’arrêt non payées. Alors j’ai fait une demande pour avoir la Sécu. Quand la lettre est arrivée, Bruno Garcia m’a dit : "Trouve-toi un autre nom et on te fait un nouveau contrat.’’ Mais, comme je veux faire venir ma tante en France, j’ai refusé. Le chef des cuisines m’a appelé chez moi deux jours après. Il m’a dit : "Il n’y a que toi qui peux faire les grillades pour les 400 couverts du samedi soir. On a besoin de toi.’’ Et ils m’ont réembauché. » Aujourd’hui, Fodié a toujours le même nom, et toujours pas de Sécu.

L’année dernière, Djimé a entrevu une porte de sortie. « J’ai entendu parler des Buffalo Grill, je me suis renseigné et j’ai contacté la CGT. » La grève a déjà porté ses fruits. Mercredi, l’Urssaf a franchi le piquet de grève pour se pencher sur les livres de comptes de La Grande Armée. Mais les grévistes craignent que l’État fasse d’une pierre deux coups : condamner pour l’exemple un patron voyou, et expulser neuf sans-papiers. « On s’est fait repérer. Mais on est prêts à prendre le risque. »

http://www.humanite.fr/2008-02-15_P...


De : Mehdi Fikri
dimanche 17 février 2008


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