Un déjeuner alsacien glacial pour le Président
Les élus UMP de la région sont très remontés contre le chef de l'Etat.
Par Antoine GUIRAL
QUOTIDIEN : vendredi 29 juin 2007/LIBERATION
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Pas contents, mais alors pas contents du tout les élus UMP d'Alsace. Ils ont eu l'occasion de le (re)dire de vive voix, hier midi, au chef de l'Etat lors d'un déjeuner glacial à l'Elysée, ponctué d'échanges peu amènes. En les conviant à sa table, Nicolas Sarkozy espérait calmer la grogne et le début de fronde des parlementaires alsaciens ulcérés par la nomination du sénateur-maire socialiste de Mulhouse, Jean-Marie Bockel, comme secrétaire d'Etat à la Francophonie et à la Coopération. C'est raté.
Face à lui, 15 députés, 4 sénateurs, le président du conseil régional, Adrien Zeller, et une autre poignée d'élus lui ont ouvertement manifesté leur incompréhension. La plus remontée d'entre eux, Arlette Grosskost, députée de Mulhouse et candidate déclarée aux municipales pour ravir l'hôtel de ville à Bockel, confiait hier qu'elle boycotterait même la visite, lundi, du président de la République à Strasbourg. Et elle ne devrait pas être la seule à exprimer ainsi son sentiment de «trahison» au nom de cette région qui a élu 15 députés UMP sur 16 aux législatives et a offert à Nicolas Sarkozy son plus haut score national lors de la présidentielle. Le chef de l'Etat a prévu de tenir, lundi soir, dans la capitale alsacienne, une «grande réunion républicaine» sur l'Europe pour expliquer les mérites du traité simplifié négocié lors du dernier conseil européen.
Dès le début du déjeuner, Sarkozy s'est lancé dans un long dégagement pour expliquer à ses interlocuteurs les vertus de l'ouverture. Mais à aucun moment il n'a prononcé le nom de Bockel. Il a fallu qu'Arlette Grosskost mette les pieds dans le plat en lui demandant ce qui allait se passer aux municipales. Réponse de Sarkozy : «Nous n'y sommes pas encore, rien n'est décidé.» La députée de Mulhouse lui a assuré qu'elle ferait une liste de son côté si Bockel venait à obtenir le soutien de l'UMP. «Je serai peiné si vous deviez nous quitter», a alors lancé le Président en sous-entendant qu'elle serait exclue de l'UMP. Puis il a ajouté qu'il «n'aime pas trop les rebelles». Après avoir écouté «les interminables explications», selon un participant, du chef de l'Etat sur sa stratégie qui a consisté à «diviser le PS et à torpiller le Modem», le député du Haut-Rhin, Jean-Luc Reitzer a déclaré qu' «il y [avait] en Alsace un malaise profond et non un simple mouvement d'humeur».
Pour calmer ses convives, Nicolas Sarkozy a fini par ouvrir la boîte à douceurs en fin de repas en leur promettant la tenue d'un conseil des ministres décentralisé (sur deux jours) en Alsace au mois de septembre. Autres promesses : des moyens amplifiés pour accélérer la deuxième phase du TGV-Est et lancer au plus vite le TGV Rhin-Rhône. Enfin, il a assuré qu'il se battrait pour que Strasbourg conserve son statut de capitale européenne. Pas sûr que cela suffise à s'éviter, lundi soir, une rébellion alsacienne.
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