11/07/2007

UNE NOTE PAR ARRESTATION PR LES CRS DU 93

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Une note par arrestation pour les CRS de Seine-Saint-Denis
Des policiers contestent la mise en place de ce dispositif d’évaluation de leurs missions, qui pourrait être étendu à d’autres départements.


Par Jacky Durand
QUOTIDIEN : mercredi 11 juillet 2007


Décidément, il se passe toujours quelque chose du côté de la police dans le 9-3. Après le rapport secret sur la dégradation des relations entre forces de l’ordre et population en Seine-Saint-Denis, en juin, l’AFP a rendu public, hier soir, un dispositif d’évaluation de leurs activités. Il déclenche l’ire des CRS et de leur principal syndicat, l’Unsa police. «C’est lamentable, c’est un vrai flicage de notre boulot», dit un gradé à propos des fiches qu’il doit remplir quotidiennement quand «ses gars» sont déployés en Seine-Saint-Denis. Trois compagnies de CRS (250 hommes) et une unité motocycliste (10 hommes) sont affectées en permanence dans ce département.

Scolaire. Le système se présente sous la forme d’une grille de notation d’apparence très scolaire, où chaque type d’intervention des CRS est gratifié d’un nombre de points : ainsi l’arrestation d’un auteur de vol avec violence vaut vingt points, tout comme l’interpellation d’un auteur de dégradation du mobilier urbain. La mise en évidence d’un défaut de permis de conduire ou d’assurance vaut un point, et l’interpellation d’un immigré clandestin ou d’un fumeur de shit correspond à quatre points.

Depuis six mois, ces fiches doivent être remplies après chaque vacation des CRS dans les cités de Seine-Saint-Denis, afin de les inciter à arrêter les voleurs à la portière plutôt que les auteurs de défauts de permis, a indiqué lundi à l’AFP David Skuli, directeur de la sécurité publique (DDSP) du 93 et créateur du dispositif. Ce fidèle de Nicolas Sarkozy espère ainsi «coller davantage aux besoins de la population», excédée par les contrôles routiers, alors que les vols avec violence ont augmenté de 15,95 % dans ce département en 2006.


Pragmatique. Place Beauvau, on ne tarit pas d’éloges pour cette grille d’évaluation. «C’est un dispositif pragmatique, né sur le terrain et qui donne des résultats satisfaisants depuis six mois, affirme un haut fonctionnaire. Il a permis de réorienter en souplesse l’activité des CRS, avec comme priorité la lutte contre la délinquance de voie publique et les violences urbaines. On a réussi à modifier les comportements professionnels sans qu’il n’y ait de phénomène de rejet.»
Le constat est tout autre au siège de l’Unsa police, qui représente plus de 65 % des CRS syndiqués. «Avec la prime au mérite instaurée par Nicolas Sarkozy, il fallait déjà faire du chiffre, constate Paul Le Guennic, secrétaire national de l’Unsa pour les CRS. Maintenant, avec cette grille d’évaluation, non seulement il faut faire du chiffre, mais en plus i l faut choisir les infractions qui font le plus de points. Noter les délits revient à changer le code pénal. Il vaut mieux intervenir sur un feu de poubelles, mais laisser trois voitures griller un feu rouge.»


Insultant. Le syndicat s’est fendu hier après-midi d’un communiqué au vitriol, où il conteste vivement les critères de notation des missions des CRS : «On découvre sur cette grille que l’intervention sur un incendie de poubelle vaut autant que des violences contre des policiers, soit vingt points. Un policier blessé vaut autant qu’un incendie de poubelle, c’est insultant.» Pour l’Unsa police, ces grilles d’évaluation consacrent «une vision statistique de l’ordre public» qui «ne fera que creuser le fossé entre la population et sa police nationale».
Sur le terrain, un CRS dénonce un «dispositif sans intérêt, car quand vous partez en mission vous ne choisissez pas les infractions que vous allez constater. On n’est pas là pour aller à la pêche et ne garder que les rougets ou les dorades.»
Officiellement, la grille d’évaluation «made in 9-3» devrait être étendue «de façon soft et progressive» aux autres départements de l’Ile-de-France, puis au Nord.

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