¬ Les ordinateurs financiers spéculent jusqu’au crash, sans intervention humaine
Sous le titre « L’ordinateur a planté le système », le journal « Libération » daté d’aujourd’hui 16 août publie un article intéressant bien qu’un peu paresseux, qui reprend ce qui préoccupe ces jours-ci la presse américaine à propos de l’actuelle crise boursière. Je cite ces lignes à retenir :
« Les ordinateurs n’y comprennent plus rien. Les remous qui brouillent les marchés financiers, en raison de l’éclatement de la bulle immobilière américaine et du naufrage du marché du crédit, mystifient les calculateurs géants des grandes banques d’affaires. (...) Le problème, tel que la presse financière américaine l’analysait hier, provient du fait que tous ces fonds sont gérés par des ordinateurs qui font du trading seuls, pratiquement sans intervention de l’homme, et souvent d’ordinateur à ordinateur. Ces machines utilisent des modèles, parfois mis au point par des Prix Nobel, qui anticipent l’avenir en se basant sur les comportements passés. Un responsable de Goldman Sachs a expliqué hier au Financial Times que ce qui venait de se produire, ne devait arriver que tous les cent mille ans, selon les projections informatiques des ordinateurs de la banque. Or ces modèles, très semblables entre eux, ont tendance à réagir comme les moutons de Panurge.
(...) Certains analystes pointent un risque « systémique », en notant que l’un des inconvénients de ce trading, généralisé par l’ordinateur seul, est que la machine ne tient pas compte de l’effet sur le marché de ses propres comportements. Dans certaines situations, les modèles informatiques utilisés par la finance peuvent devenir le moteur des marchés, met en garde un expert. »
(« Libération », Jeudi 16 août, page 2 et 4).
S’il ne s’agissait pas de nous autres, il serait permis de rire un peu du sort dérisoire de ce grand singe évolué, l’être humain, qui s’est finalement autopiégé par une ultime ruse de la technique, sa plus « chère » créature.
En effet, après avoir fait sa révolution néolithique il y a quelques millénaires, l’humanité vient d’effectuer en 30 ans une complète contre-révolution primitive, régressant de la prévoyance pacifique vers un retour radical à la prédation économique à court terme (chasse et pêche au lieu de l’agriculture et de l’élevage, en quelque sorte, et la guerre de tous contre tous), soit un capitalisme financier sauvage, déconnecté de l’économie réelle, dont le tour de force consiste à avoir confié le destin du monde à des ordinateurs en réseau programmés par des fous furieux et des charlatans.
On l’a vu avec la patiente démolition de tout les mécanismes que la civilisation avait patiemment édifiés pour protéger l’homme contre sa propre barbarie, et notamment des lois protégeant les plus faibles, comme la sécurité sociale et les retraites, ennemis farouches du nouveau paradigme paléolithique et cruel des dits « fonds de pension ».
Tous les verrous ont sauté quand les flux financiers irresponsables sont devenus les pilotes dans l’avion, avec la complicité des dirigeants politiques occidentaux de la génération de Reagan, Thatcher-Blair et Mitterrand, et alors que nous nous sommes privés à jamais de tout instrument de recours, comme par exemple avec cette énormité significative : « l’indépendance » de la banque centrale européenne face à une raison collective qui serait incarnée par la politique (volontairement soumise et impuissantée) et les citoyens (muselés et distraits par le pain, les jeux et les faux-débats).
Songeons que si, par une catastrophe subite de type nucléaire ou cosmique, toute vie humaine devait subitement disparaître, le show financier continuerait pour rien, et les ordinateurs des banques d’affaires continueraient à spéculer automatiquement comme si de rien de n’était en brassant des biens immatériels, jusqu’à épuisement progressif des énormes réserves de fioul prévues pour leurs groupes électrogènes. Une fin du monde cauchemardesque et un beau sujet de roman !
Ajoutez à cela la montée simultanée des périls climatique, chimique, atomique, neuroleptique, médiatique, éducatif, mafiosi et terroriste, bref l’irakisation progressive du monde, tous phénomènes découlant largement de cette dictature « apolitique » de la technique financière laissée à elle-même, et vous avez un constat assez réaliste de l’illusion paresseuse des gauches politiques et syndicales de tous pays, qui ne veulent toujours pas s’affronter courageusement aux vrais enjeux tant qu’il est encore temps.
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