10/08/2007

Télé : recherche d’audimat ou de qualité ?

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Pendant sa campagne présidentielle, Sarkozy avait "admis le manque de moyens" de France Télévisions et envisagé des ressources supplémentaires ainsi qu’une meilleure qualité des programmes. Aujourd’hui, il semble que le gouvernement veuille enterrer cette idée.



Patrick de Carolis, PDG du groupe France-Télévisions, relance l’affaire en faisant remarquer que la redevance en Grande-Bretagne est de 200 euros contre 116 euros en France. Le directeur des programmes de France 2 (Eric Stemmelen) avait déclaré en juillet qu’une coupure publicitaire supplémentaire dans un programme de divertissement rapporterait environ 20 millions d’euros, somme qu’il s’engageait à investir dans des fictions de prestige et des documentaires.
Aujourd’hui, la promesse faite pendant la campagne n’apparaît plus comme une bonne idée aux yeux du gouvernement. La ministre de la Culture, Christine Albanel, s’y oppose et l’a fait savoir à François Fillon. La raison ? Une coupure publicitaire détournerait vers le service public les juteuses recettes des chaînes privées. Il faut savoir renvoyer l’ascenseur aux copains (TF1) ! Les autres raisons se devinent aisément : on ne veut pas alourdir les charges du contribuable surtout au moment de la préparation de la mise en place du bouclier fiscal, des franchises, du gel du SMIC et des revenus des fonctionnaires, des revenus des personnes handicapées, de la limitation du droit de grève... En rajouter serait fâcher le peuple attaché à sa chère télé. Mais la raison principale, c’est que la culture, dans la ligne sakorzyste, on s’en fout totalement ! Le "Je ne suis pas un intellectuel" l’avait bien fait comprendre.


Pourtant, la qualité des programmes de la BBC nous montre qu’avec un budget conséquent, il est possible de produire des oeuvres intéressantes, que nous rachetons d’ailleurs pour diffusion sur les chaînes publiques françaises. On voit de plus en plus de documentaires britanniques sur nos petits écrans. Il semble que la promesse de choix de qualité et de développement de la culture à la télévision française soit sacrifiée sur l’autel de l’audimat et en considération d’intérêts financiers privés. On voit ici ressurgir la collusion entre le pouvoir et les médias qui fut dénoncée par François Bayrou.

Cela ne dérangera pas la majorité des téléspectateurs pour qui TF1 est la chaîne la plus regardée et qui comble leur appétit de divertissement et de voyeurisme. Et peu importe si cette chaîne abuse de procédés peu respectables pour faire de l’audience. Ainsi, d’anciens dirigeants de TF1 (Le Lay, Mougeotte, Charles Villeneuve du Droit de savoir, Jacques Aragonès, le rédacteur en chef de cette émission), un journaliste (Olivier Baudry) viennent d’être déférés devant le tribunal correctionnel d’Alès pour "violation et recel du secret de l’instruction". A cause d’un reportage sur les gendarmes de la section de recherches de Nîmes pendant leur traque des meurtriers d’une aide-soignante (meurtre d’une jeune Ardéchoise dans le Gard, en avril 2004.).

Selon le journal Le Monde, "Après sa diffusion sur TF1, le 7 septembre 2004, le reportage avait montré que le journaliste avait filmé les gardes à vue et interrogé les meurtriers présumés. L’émission avait provoqué un tollé des avocats. En mai 2004, quelques semaines après sa mise en examen pour meurtre, un des suspects avait déposé plainte avec constitution de partie civile pour violation du secret de l’instruction". On ne sera guère surpris de voir, le procès venu, la défense de la chaîne invoquer la liberté de la presse et regagner très facilement la confiance de ses adorateurs.

Le déni culturel du gouvernement, qui fait coprs avec TF1, ne consacre pas le droit de la presse, mais plutôt la liberté de la paresse intellectuelle à laquelle cède la grille des programmes de cette chaîne. Sans indépendance du pouvoir par rapport aux puissances financières et aux médias, la culture continuera de se déprécier sur le petit écran, la course à l’audience engagée par les chaînes publiques se renforcera. Et la médiocrité se généralisera.


La promesse de la campagne n’était-elle qu’un leurre pour faire oublier la crise de colère de Sarkozy dans les studios de France 3 ? (Ce jour-là, il menaça de renvoyer toute l’équipe de direction de la chaîne). La politique de l’audiovisuel sera-t-elle figée pour préserver les bonnes relations avec TF1 qui saura bien s’en souvenir au moment des prochaines élections : 2008 et 2012 ?

En attendant, la chaîne TF1 contine d’arborer sans complexe son logo aux couleurs nationales : bleu-blanc-rouge ! Représente-t-elle toute la France et sa culture ?

par La Taverne des Poètes

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