Marianne l'avait écrit, mais aujourd'hui la Cour des comptes le confirme : les autoroutes françaises ont été vendues à un prix inférieur de 10 milliards d'euros à sa véritable valeur.
C’est une toute petite note de bas de page dans le rapport annuel 2008 de la Cour des comptes, mais elle a son importance (voir encadré ci-dessous).
Les magistrats révèlent en effet que la vente des concessions d’autoroutes en 2006 aurait dû rapporter à l’Etat non pas 14,8 milliards d’euros mais 24 milliards d’euros – ce qui, au passage, donne raison à Marianne, qui à l’époque s’était fortement mobilisée contre cette cession à vil prix. On peut d’ailleurs s’étonner qu’un tel écart n’ait pas donné lieu sinon à un rapport complet, du moins à un chapitre décrivant une privatisation si favorable aux opérateurs privés (Vinci, Eiffage, etc.).
En attendant, Bercy envisage d’augmenter la redevance domaniale annuelle que les sociétés concessionnaires acquittent au titre de l’occupation de l’espace public, qui passerait de 170 millions d’euros à 370 millions, soit + 114 %. Mais même si cette hausse de 200 millions par an devenait pérenne, l’Etat serait encore loin de récupérer les 10 milliards qui lui manquent. En réalité, pour que l’Etat touche le juste prix de ces autoroutes, il faudrait multiplier cette redevance par 7 et la porter à 1,2 milliard d’euros par an !.
Extraits du rapport de la Cour des Comtpes (p 202)
Les orientations politiques en matière d’infrastructures de transport
avaient été fixées en 2003 par le comité interministériel d’aménagement
du territoire. Elles l’ont été très récemment par le projet de loi de
programme relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement.
La stratégie affichée exprime une volonté croissante de report des
modes de transport au détriment de la route sans que soient explicités les
moyens d’infléchir les comportements pourtant contraires des agents
économiques, entreprises et ménages90.
Les enjeux financiers sont considérables, particulièrement dans une
période où prospèrent des projets d’infrastructures d’un coût très élevé
(plusieurs milliards, voire dizaine de milliards d’euros chacun91) et d'une
rentabilité socio-économique parfois très incertaine.
Le conseil d’administration de l’AFITF, par lequel doivent être
approuvées les conventions de financement, est composé de 12 membres,
choisis à parts égales parmi les élus locaux et nationaux et parmi les
représentants des administrations concernées. Dans la quasi-totalité des
cas, il accepte les projets de conventions qui lui sont soumis, sans se
prononcer sur l’opportunité économique de chaque opération.
L'AFITF aurait peut-être pu, en devenant un lieu de concertation,
voire d'expertise, prendre une place dans un dispositif national renforcé
d’évaluation des projets d’investissements publics préalable à la prise de
décision. En fait, l’agence n’a pas cherché à pallier par ses débats le
manque persistant d’évaluation sérieuse, publique et contradictoire des
projets d’investissements avant leur lancement.
***
90) Ainsi, par exemple, les personnes interrogées pour des sondages pensent que
36,2 % des habitants de province utilisent régulièrement (au moins une fois par
semaine) les trains express régionaux alors qu’ils ne sont que 2,8 % à le faire
(sondages CAT Ipsos octobre 2006 et mai 2007)
91) A titre d’exemples, estimations initiales : Canal Seine Nord 4 Md€ ; liaison Lyon-
Turin 19 Md€. Par comparaison, la valeur globale des 7 000 km d’autoroutes
publiques dont la concession a été privatisée en 2006 a été estimée à 24 Md€ et leur
cession a rapporté 14,8 Md€ à l’Etat.
http://www.marianne2.fr/
http://torapamavoa.blogspot.com
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