15/05/2007

S’il s’avère que ni Vincent Bolloré ni Nicolas Sarkozy n’ont payé de leur poche, un tel cadeau représenterait un abus de bien social»,

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Thomas Coex AFP ¦ Nicolas Sarkozy est rentré à Paris mercredi vers 22H40, après deux jours et demi de vacances luxueuses à Malte qui ont déclenché les foudres de ses adversaires de gauche, tandis que ses amis défendaient le droit du président élu à prendre "48 heures de repos".


Nouvelle polémique? Le jet Falcon 900 EX que Vincent Bolloré a mis à disposition de Nicolas Sarkozy pour ses vacances à Malte n’appartient pas à l’homme d’affaires mais au groupe Bolloré SA, comme le prouve le fichier de la Direction générale de l’aviation civile (DGAC) publié mercredi par le «Canard enchaîné». Une information confirmée par le groupe Bolloré lui-même, contacté par 20minutes.fr. Dès lors, un tel prêt peut-il constituer un acte illégal?

«S’il s’avère que ni Vincent Bolloré ni Nicolas Sarkozy n’ont payé de leur poche, un tel cadeau représenterait un abus de bien social», explique une avocate, contactée par 20minutes.fr. «Ce délit est constitué si un bien d’une entreprise est utilisé contrairement à l’intérêt social de celle-ci - c’est-à-dire tout acte qui appauvrit le patrimoine de la société sans contrepartie ou en échange de prestations fictives – ou à des fins personnelles», explique-t-elle. «La jurisprudence veut que le but personnel recherché peut être aussi bien matériel que moral et résulter du souci d’entretenir de bonnes relations avec un tiers, notamment proche des sphères politiques», précise la juriste.

Si recherche d'avantages, corruption active

Vincent Bolloré ne pourrait-il faire valoir que ce prêt est dans l’intérêt de l’entreprise? «Non», répond l’avocate selon laquelle un délit de corruption active serait alors constitué. Selon l’article 433-1 du code pénal en effet, «est puni de dix ans d’emprisonnement et de 150.000 euros d’amende le fait de proposer, sans droit, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour obtenir d’une personne dépositaire de l’autorité publique (…) soit qu’elle accomplisse ou s’abstienne d’accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat (…) soit qu’elle abuse de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d’une autorité ou d’une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou tout autre décision favorable». Bref, les RP sont illégales avec le président de la République.

Vincent Bolloré dit avoir payé de sa poche

«Mais si Vincent Bolloré a payé la location de l’avion, il n’y a aucune infraction», souligne la juriste qui trouverait «étonnant qu’un homme aussi bien conseillé puisse tomber dans le piège de violer la loi avec un président de la République nouvellement élu».

«La location du jet sera en effet facturée à Vincent Bolloré en personne», déclare le groupe Bolloré. Qui refuse toutefois de donner une somme ou de prouver ce qu’il avance. Impossible donc de vérifier ces affirmations. «Ce n’est pas la première fois qu’un homme d’affaires loue un jet à sa propre société, c’est un usage très commun», fait valoir le groupe qui indique que le jet est parfois loué à des hommes d’affaires extérieurs à la société.

Des commandes de l'Etat

Reste que, selon «Libération», un actionnaire avait déjà porté plainte en 2004, en vain, pour abus de biens sociaux contre l’usage à titre privé de la flotte Bolloré. Et surtout que le groupe est bel et bien bénéficiaire de commandes publiques, notamment en tant qu’actionnaire de la Société française de Production (SFP), comme l’ont rappelé jeudi les journalistes et techniciens CGT de France 3. Vincent Bolloré avait pourtant assuré le contraire mercredi.

Selon Lefigaro.fr qui a interrogé l’entourage de Vincent Bolloré, «les contrats cités représentent moins de 50 millions d’euros, sur un chiffre d’affaires de 6 milliards. Bolloré est un groupe qui fait 99,2% de son chiffre d’affaires avec le privé». Même s’il reconnaît avoir «quelques petits contrats qui traînent», le groupe insiste sur le fait que «très peu d’autres grandes entreprises françaises ont aussi peu de liens commerciaux avec l’Etat».
Alexandre Sulzer


20Minutes.fr, éditions du 10/05/2007 - 19h25

dernière mise à jour : 10/05/2007 - 21h31

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