L'UE réticente face à la répartition des migrants sauvés au large de Malte
Par Fabrice RANDOUX
Photo
agrandir la photo
LUXEMBOURG (AFP) - Les ministres européens de l'Intérieur ont montré peu d'enthousiasme mardi à l'idée de Malte de répartir entre les 27 les immigrants sauvés au large de la Libye à la suite de la multiplication des naufrages tragiques dans cette zone de la Méditerranée.
"Cela me paraît très difficile, on ne peut pas faire deux poids, deux mesures uniquement sur les immigrés venus de la Méditerranée", a commenté le nouveau ministre français de l'Immigration Brice Hortefeux, avant le débat entre les 27 prévu dans l'après-midi à Luxembourg.
"Je ne vois pas techniquement comment cela pourra être fait", dans une allusion à la difficulté d'établir des critères de répartition.
Tout en reconnaissant qu'il fallait "prendre des mesures pour éviter que les gens se noient dans la Méditerranée", le ministre allemand Wolfgang Schaüble, dont le pays préside l'UE jusqu'à la fin du mois, a estimé que cette question de la "répartition du fardeau" serait traitée dans le "long terme".
Depuis la mi-mai, plusieurs naufrages dramatiques d'embarcations surchargées ont été signalés entre la Libye et Malte.
"Chaque année, il y a 600 immigrants qui meurent - et c'est une estimation basse - aux portes de l'Europe. Ce chiffre pourrait encore augmenter cette année", a prévenu à son arrivée le ministre maltais de l'Intérieur Tonio Borg.
Des photos d'immigrants accrochés à des cages d'élevage de thon ont fait le tour du monde, et Malte a aussi été accusée d'avoir manqué à ses obligations en refusant l'entrée à un chalutier espagnol qui avait recueilli des clandestins, sous prétexte que le sauvetage avait eu lieu dans les eaux libyennes.
Face à cette situation, M. Borg a proposé que les immigrants qui sont sauvés dans la zone de secours de la Libye - et que Tripoli refuse de reprendre car il conteste la taille de sa zone - soient accueillis à tour de rôle par les 27.
Chaque pays devrait "s'engager à recevoir tour à tour ces immigrants en proportion de sa population", a-t-il estimé.
Malte a sauvé 7.000 personnes depuis cinq ans, alors que la petite île ne compte que 400.000 habitants, a-t-il affirmé.
"C'est évidemment le navire le plus proche du point de détresse qui doit secourir. Le problème, c'est qui accepte les immigrants ensuite", a-t-il expliqué.
Les immigrants sauvés seraient débarqués dans l'Etat le plus proche, c'est-à-dire à Malte ou dans l'île italienne de Lampedusa, puis répartis dans les différents pays qui examineraient une demande d'asile ou les rapatrieraient.
Seule l'Espagne semblait apporter son soutien à cette idée, le ministre Alfredo Perez Rubalcaba estimant qu'il fallait aussi l'appliquer aux mineurs non accompagnés (ne pouvant pas être expulsés) qui arrivent aux îles Canaries dans l'Atlantique, l'autre grande voie d'immigration maritime.
Ces arrivées aux Canaries sont sensiblement moins nombreuses depuis la mise en place d'opérations de patrouilles coordonnées par l'agence aux frontières de l'UE Frontex, en collaboration avec les pays d'Afrique de l'Ouest.
Le commissaire en charge de l'immigration Franco Frattini devait lancer un appel aux ministres pour qu'ils mettent effectivement à disposition de Frontex les moyens - navires ou hélicoptères - promis sur le papier.
Une opération "Nautilus" est prévue fin juin en Méditerranée, mais seuls Malte, la Grèce, l'Allemagne et la France ont prévu d'y participer, ce qui risque de compromettre sa tenue.
M. Hortefeux a estimé qu'il fallait aussi s'occuper des immigrants morts, après que la marine française a recueilli 18 cadavres au début du mois.
"La France a été une des seules à recueillir les corps, visiblement à la différence d'autres pays et pavillons. Le droit maritime ne prévoit rien sur la gestion des dépouilles (mortelles), c'est une question qu'il conviendrait de creuser", a-t-il déclaré.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire