LEMONDE.FR | 26.07.07 | 17h26 • Mis à jour le 26.07.07 | 18h48
La signature, mercredi, d'un accord prévoyant l'accès de la Libye à la technologie nucléaire française pour parvenir à "désaliniser l'eau de mer" a été vivement critiqué, jeudi 26 juillet, par plusieurs organisations écologistes.
"Officiellement, le réacteur vendu à la Libye aurait pour but de dessaler l'eau de mer pour l'alimentation du pays en eau douce. De qui se moque-t-on ? La motivation profonde des Etats à accéder au nucléaire a toujours été un enjeu de pouvoir", s'indigne Frédéric Marillier, chargé de la campagne énergie à Greenpeace, qui s'inquiète d'"un problème de prolifération nucléaire. (...) Après Giscard d'Estaing et Chirac qui avaient conclu des accords avec l'Iran du chah, l'Irak de Saddam Hussein, ou encore l'Afrique du Sud de l'apartheid, c'est au tour du gouvernement sarkozyste de se lancer dans la dissémination nucléaire", écrit l'organisation, dénonçant une politique "irresponsable" de la France.
Les Etats-Unis soutiennent l'accord franco-libyen
"Le gouvernement français sera certainement très attentif pour s'assurer que tout accord [définitif sur le nucléaire, entre Paris et Tripoli] respectera les accords internationaux", a déclaré à la presse le porte-parole du département d'Etat américain, Sean McCormack, jeudi."Nous soutenons l'usage pacifique de l'énergie nucléaire et l'énergie nucléaire en tant qu'alternative aux hydrocarbures. Mais il faut le faire de façon à ne pas risquer la prolifération", a-t-il ajouté. Soulignant que "le gouvernement libyen a renoncé volontairement à ses programmes d'armement nucléaire", il a conclu : "Avec les garanties appropriées, je pense qu'il faut voir comment la Libye peut bénéficier de l'énergie nucléaire civile." – (Avec AFP.)
Même son de cloche du côté du réseau Sortir du nucléaire, pour qui,"dans cette affaire, M. Sarkozy a commis des fautes majeures et menti à plusieurs reprises". Dans un communiqué, les militants antinucléaire jugent que l'objectif de désalinisation de l'eau de mer "n'est qu'un subterfuge" et un "faux prétexte" : selon eux, pour cela, "il est bien plus efficace, bien moins cher et bien plus écologique d'utiliser l'énergie solaire, pour laquelle la Libye a des atouts exceptionnels. (...) M. Kadhafi n'a que faire de désaliniser l'eau, son objectif est d'obtenir des technologies nucléaires, dans le but d'accéder tôt ou tard à l'arme atomique, dénonce le réseau. Nucléaires civil et militaire sont indissociables. (...) Ce n'est pas pour rien si les grandes puissances ne croient pas l'Iran, qui, pourtant, annonce avoir un programme nucléaire purement civil."
LA FRANCE "JOUE AVEC LE FEU"
Pour le porte-parole des Verts, Yann Wehrling, "la France joue avec le feu en se faisant, dans le monde, l'agent commercial sans scrupule du nucléaire. La Libye a beau être réintégrée dans le 'concert des nations', elle n'en reste pas moins un régime non démocratique". Une allusion aux déclarations du secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant, mercredi.
Pour M. Wehrling, cet accord démontre le "cynisme sans limite" de ceux qui veulent exporter le nucléaire français. "La précipitation avec laquelle les choses se sont conclues démontrent bien que cette 'affaire' politico-commerciale a été envisagée, voire négociée, bien avant la libération des infirmières." Une critique également formulée par le réseau Sortir du nucléaire, qui accuse le président français d'avoir menti lorsqu'il a nié, mardi lors d'une conférence de presse, avoir proposé à la Libye "de la technologie nucléaire en échange des infirmières bulgares". Mercredi matin, quelques heures avant le départ de Nicolas Sarkozy pour la Libye, son porte-parole, David Martinon avait affirmé sur France 2 :"Pour le moment, il n'est pas question qu'on parle de coopération nucléaire. Je ne dis pas que la question ne sera pas évoquée, mais il n'y a rien de prêt sur ce sujet."
Jeudi, le Parti socialiste a demandé que "toute la lumière soit faite" sur les accords signés par Nicolas Sarkozy avec la Libye. S'interrogeant par ailleurs sur l'aspect précipité de l'accord, Faouzi Lamdaoui, secrétaire national à l'égalité et au partenariat équitable, a estimé qu'il est "légitime que les Français sachent si ces accords ne comportent pas des clauses secrètes, [et s'ils en comportent], quelles sont-elles ?".
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