13/07/2007

Les journalistes se découvrent en tant que travailleurs

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Les syndicats de journalistes s'inquiètent de la modification du statut de la profession
LE MONDE | 13.07.07 | 15h05 • Mis à jour le 13.07.07 | 15h05

Le statut des journalistes est-il en train d'être modifié sans bruit, en catimini ? Les syndicats de la profession l'avouent eux-mêmes : ils n'ont pris conscience de l'enjeu que tardivement. Mais la réécriture du code du travail, validée par ordonnance, en mars 2007, pourrait avoir des conséquences lourdes.

Depuis juin, les syndicats de journalistes, qui n'ont pas été associés à la réflexion, se mobilisent. Lors de la dernière réunion de l'intersyndicale, le 5 juillet, le sujet a été abordé. " Nous sommes inquiets car nous pensons que derrière la réécriture du texte il y a une volonté de revoir à la baisse tous les droits des journalistes et, en particulier, ceux liés au licenciement", explique Sylviane Gauthier, du SNJ-CGT.

La recodification du code du travail a été entreprise il y a près de deux ans. Bien évidemment, les journalistes ne sont pas les seuls concernés. Cette réécriture touche les 16 millions de salariés du secteur privé. Toutefois quelques professions, dont les journalistes, sont encadrées par des règles spécifiques. La partie législative, qui n'a pas été débattue devant les Assemblées, a été validée par ordonnance et publiée au Journal officiel le 12 mars. A priori, l'objectif annoncé lors du lancement de ce chantier était de simplifier "à droits constants" le code du travail. Mais ce principe n'a pas été respecté selon les syndicats.

"Une grande partie des dispositions a basculé de la partie législative vers la partie réglementaire. En particulier tout ce qui concerne les indemnités de licenciement et la saisine de la commission arbitrale", affirme Danielle Darras du SNJ. "On perçoit des volontés patronales de sortir les relations du travail de l'environnement légal. Il y a un nivellement par le bas et des attaques très claires à un statut. Notre profession est en danger", insiste Nathalie Boisson, membre du conseil national de l'USJ-CFDT.

Il n'est par exemple plus fait mention du mois de salaire par année d'ancienneté auquel a droit un journaliste en cas de licenciement. De même, a disparu dans le texte l'obligation de saisir une commission arbitrale quand le journaliste a plus de quinze ans d'ancienneté.

"ENTREPRISE DE PRESSE"

Tous ces éléments devraient être repris dans la partie réglementaire du code du travail. Mais, comme le souligne Mme Darras, " il faut une loi pour modifier une loi, alors qu'il suffit d'un décret pour changer un règlement". Or les syndicats sont d'autant plus inquiets que la période est mouvementée pour les journalistes confrontés à une vague de restructurations et particulièrement dans la presse. La révision à la baisse des indemnités de licenciement permettrait de réduire le coût des plans de restructuration.

Les instances syndicales s'interrogent également sur d'autres modifications. "La référence aux agences de presse, journaux et périodiques a été remplacée par le terme entreprise de presse qui n'est défini nulle part", précise Mme Darras. De même, le statut de journaliste professionnel a été étendu " aux journalistes exerçant dans une ou plusieurs entreprises de communication au public par voie électronique".

Des représentants de quatre syndicats, SNJ-CGT, SNJ, CFDT et FO, ont rencontré récemment Hervé Lanouzière, chef de la mission de recodification au ministère du travail. "Nous demandons la réintégration dans le texte législatif de tout ce qui est passé en réglementaire", revendique Mme Gauthier. Selon le calendrier officiel, la partie réglementaire devrait être prête en décembre 2007 et, au plus tard, au 1er mars 2008. A cette date, l'ensemble du nouveau code du travail entrera en vigueur.
Laurence Girard
Article paru dans l'édition du 14.07.07.

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