Répression . Une manifestation samedi devant le centre de rétention du Mesnil-Amelot n’a pas eu lieu : 18 militants, dont les organisateurs, ont été interpelés avant même de pouvoir s’y rendre.
Samedi, porte de La Chapelle (Paris 18e). Dix-huit militants sont interpelés vers 15 h 30 pour « contrôle d’identité » alors qu’ils attendaient à ce point de rendez-vous, avant de se rendre à une manifestation devant le centre de rétention administratif (CRA) du Mesnil-Amelot. Emmenés au commissariat de Clignancourt, ils seront libérés à 18 h 30. La manifestation au CRA était autorisée par la préfecture de Seine-et-Marne de 16 heures à… 19 heures. Elle n’a donc pas eu lieu.
Dix fourgons
de police et un bus
Pour faciliter le transport vers le CRA du Mesnil-Amelot, très isolé, l’association SôS-Soutien aux sans-papiers, organisatrice de la manifestation, avait donné rendez-vous à la porte de La Chapelle une demi-heure avant l’heure de départ. À ce moment, une vingtaine de militants sont présents, « accompagnés » de policiers en civil. Soudain, une dizaine de fourgons de police, suivis d’un bus, arrivent de tous les côtés, encerclant les militants qui patientaient auprès de leurs véhicules. Dix personnes sont immédiatement interpellées. D’autres s’éloignent un peu sur le trottoir. Les voitures sont perquisitionnées de fond en comble. Les militants fouillés au corps, avant d’être embarqués dans le bus. À commencer par Rodolphe Nettier, président de SôS-Soutien aux sans-papiers. Seule explication donnée sur place : « opération de police ».
Vient le tour des militants qui observaient la scène d’un peu plus loin : huit nouveaux interpellés. Parmi eux, Henri Braun, avocat de l’association et membre du comité central de la Ligue des droits de l’homme (LDH). « C’était parfaitement illégal », nous confie-t-il, en précisant : « Soit il y a un trouble à l’ordre public caractérisé, ce qui n’était évidemment pas le cas. Soit c’est un contrôle d’identité, mais, ici, tout le monde avait ses papiers, sauf Rodolphe. Nous n’aurions donc pas dû être arrêtés. » La police en profite d’ailleurs pour contrôler et fouiller trois jeunes Noirs assis près de la bouche de métro. Les fouilles corporelles sont, elles aussi, jugées illégales par Henri Braun. « Ils ont fouillé nos poches, ce qui s’assimile à une perquisition. Sans autorisation. » Au commissariat, la pression continue : « On nous a fait retirer nos lacets comme si on allait être mis en garde à vue, raconte Rodolphe Nettier. Mais nous ne nous sommes pas laissé impressionner. » Devant le commissariat, une trentaine de personnes réclamaient la libération de leurs camarades. Une libération qui aura lieu une demi-heure avant l’expiration de l’autorisation de manifester.
atteinte à la liberté d’expression
Comme l’explique Henri Braun, le motif de vérification d’identité est évidemment aberrant dans ces conditions. « C’est une façon d’interdire la manifestation sans le dire. Il y a une atteinte évidente à la liberté d’expression. » Pour l’avocat, ce durcissement de la répression est tout à fait lié avec celui qui s’exerce contre les sans-papiers. Il n’hésite pas à lâcher le mot de « politique raciste » : « On traque les sans-papiers car on ne veut pas de leurs traces dans le visage de la France de demain. Du coup, tous ceux qui sont en contact avec des sans-papiers voient leurs libertés restreintes. »
Le bilan pour SôS-Soutien aux sans-papiers n’est finalement pas si négatif : « En voulant nous empêcher d’accéder aux centres de rétention, ils nous offrent un objectif », déclare Rodolphe Nettier.
Samedi prochain, ils appellent donc de nouveau à manifester au Mesnil-Amelot. « On ne se laissera pas intimider », conclut-il.
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