01/12/2008

Plan de recapitalisation des banques : bras de fer entre Paris et Bruxelles

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Paris s'oppose à la Commission européenne sur les conditions des aides de l'Etat aux banques. Bruxelles conditionne son accord à l'engagement des banques de ne pas accroître leur taille de bilan et à ne pas verser de dividendes.











Le ton monte entre Bruxelles et Paris. « Balkanisation », « Concurrence déloyale », « loi de la jungle ». José Manuel Barroso a tenté de convaincre hier soir au Grand Jury RTL/Le Figaro/LCI qu'« il n'y pas de blocage » de la Commission européenne au plan français de soutien de 40 milliards d'euros en capital des banques. Mais « c'est l'obligation de la Commission de faire respecter le traité de Rome ». Si l'on accepte qu'un pays accorde des milliards sous des critères différents de ses homologues, c'est priver le contribuable français « d'une garantie » que les aides sont accordées dans le respect du jeu de la concurrence. Ajoutant encore aux discordances des intérêts en France, il a précisé qu'« en France, il y a des banques qui ont une vision différente ».

La France réfute tout blocage, mais « il s'agirait que tout le monde comprenne qu'on a changé de monde et qu'il faut aller vite », a insisté samedi Nicolas Sarkozy après s'être expliqué la veille avec le président de la Commission européenne. L'Etat presse Bruxelles d'adopter avant demain, jour d'ouverture de l'Ecofin, son plan de soutien. Les discussions se sont poursuivies le week-end. Mais le calendrier paraît difficilement tenable.

Alors qu'il s'est déjà engagé à souscrire pour 10,5 milliards d'euros de titres hybrides émis par les banques, l'Etat s'oppose à la Commission sur un point majeur : Bruxelles conditionne son feu vert à l'opération à une croissance limitée du crédit et à celle de la taille de bilan des banques. « C'est un réflexe pavlovien en matière de concurrence, incohérent avec la situation actuelle. On ne va pas fournir des aides pour empêcher les entreprises de faire leur métier », s'agace un responsable français. Bruxelles redoute que les aides d'Etat contribuent à une croissance rapide des établissements de crédit et à des baisses tarifaires qui fausseraient le jeu de la concurrence européenne. Il exige de plafonner la croissance du bilan des banques françaises.

Pas de dividendes

L'Etat français, lui, a demandé aux banques de maintenir une croissance annuelle de leurs encours de 3 à 4 % en 2009. « Jusqu'à présent, les encours ont crû de 10 % mais ralentissent, Notre objectif est d'accompagner cet atterrissage et non, par des restrictions fortes, de générer un effondrement du crédit. » poursuit ce responsable.

Mais le schéma mis en place par Paris est particulier à l'échelle européenne. L'Etat britannique, qui a exigé de ses banques de limiter les excès et de maintenir ses encours de crédit au niveau de 2007, est plus à l'aise avec les contraintes de Bruxelles. « La position des Britanniques est différente, justifie ce responsable. Ils ont de fait du mal à maintenir un certain niveau de croissance. On ne peut pas appliquer les mêmes principes au plan français d'accompagnement de la croissance et à un plan de sauvetage. »

Autre point de divergence majeur : la volonté de Bruxelles d'imposer que les banques françaises, comme les britanniques, ne versent pas de dividendes à leurs actionnaires. « Quand une banque dépose le bilan, c'est logique, mais quand il n'y a pas de plan de sauvetage, cela ne fait pas de sens et devient contre-productif, insiste encore ce responsable. Si les banques ne versent pas de dividende, il ne faudra pas s'attendre à ce que les actionnaires remettent de l'argent dans les banques, ni à une sortie rapide des Etats. Qui plus est, le marché va très mal l'interpréter. Cela traduirait un besoin urgent en capital des établissements français. » L'Etat ne désespère pourtant pas d'un accord rapide.

ANNE DRIF



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