14/10/2009

Mouvement de grève massif des travailleurs sans-papier de la région parisienne

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A Paris, des sans-papiers dévoilent leurs conditions de travail
LEMONDE.FR | 14.10.09 | 14h20 • Mis à jour le 14.10.09 | 14h20


Bathily, Abdy, Mamadou et leurs vingt collègues intérimaires sans papiers employés à la réfection des stations de métro, ont été évacués, mardi 13 octobre au soir, du dépôt RATP de la rue Championnet, dans le 18e arrondissement de Paris, qu'ils occupaient depuis le matin pour demander leur régularisation.




Ils ne s'étaient pas joints au mouvement de grève de 2008, car ils craignaient de prendre le risque d'être interpellés et renvoyés dans leur pays. Mais après avoir vu que d'autres travailleurs dans la même situation s'étaient fait régularisés, ils ont décidé de franchir le pas et de se mettre en grève, las d'être soumis, parce que sans papiers, à des conditions de travail aussi peu respectueuses des droits élémentaires.

Rénover les stations de métro, ils font cela depuis trois, quatre, sept ans. Chaque soir, après 22 heures, ils s'engouffrent ainsi dans les bouches de métro pour casser les vieux murs des stations et les remettre à neuf. Ils manient bitume et autre charge lourde mais n'ont ni casque, ni chaussures de sécurité. Ils ne portent qu'un simple gilet jaune fluorescent. La nuit qui se termine à 6 heures du matin leur est payé 80 euros. Salaire qui leur est versé à la fin de chaque semaine travaillée, une semaine pouvant compter 4 ou 5 nuits.

Début septembre, ils ont réalisé une vidéo pour faire connaître leurs conditions de travail.

Tous sont convaincus que les sociétés de travail temporaire qui les emploient connaissent parfaitement leur situation. "J'ai déjà changé trois ou quatre fois de nom, mon employeur s'en fout", raconte Abdy, 32 ans, arrivé du Mali en 2000 et qui travaille, sous un nom d'emprunt, à la restauration des stations de métro depuis 2002. Abdy et ses camarades ont aussi du mal à croire que la RATP et son sous-traitant l'ASTEN, qui recourt à l'intérim pour ses chantiers, ne soient pas au courant des conditions dans lesquelles ils travaillent.

Dans un communiqué, tout en rappelant faire travailler "plus de 5 000" fournisseurs, la RATP assure que "à sa connaissance aucun salarié travaillant sur ses sites n'était en situation irrégulière".

Intérimaires ou salariés permanents d'une entreprise, ils sont déjà plus de 1 700 travailleurs sans papiers, d'origine d'Afrique de l'Ouest pour la plupart, à avoir rejoint depuis lundi 12 octobre le nouveau mouvement de grève, occupant des agences d'intérim, les locaux de sociétés de nettoyage, de sécurité, des chantiers de travaux publics… Mardi soir, on comptait une trentaine de piquets de grève à Paris, dans l'Essonne, en Seine-Saint-Denis et dans les Hauts-de-Seine.

Face à ce mouvement, le ministre de l'immigration, Eric Besson, s'est attaché à rappeler, dans un communiqué diffusé mardi en fin de journée, que "conformément au Pacte européen sur l'immigration adopté le 16 octobre 2008 par les 27 Etats membres de l'Union européenne", les mesures de régularisations massives sont "proscrites". Et M. Besson d'affirmer qu'il "s'attache à mettre en œuvre le dispositif exceptionnel au séjour des étrangers en situation irrégulières bénéficiant de contrat de travail mis en place en 2007 ".

Pour bénéficier de ce dispositif, il faut notamment que l'emploi corresponde à un métier "en tension". Aussi, la demande de régularisation doit-elle être accompagnée d'un "engagement ferme de l'employeur d'embaucher l'étranger avec un contrat de travail à durée indéterminée (CDI) ou à durée déterminée supérieure à un an", rappelle le ministre dans son communiqué.

Le 1er octobre, les cinq syndicats (CGT, Solidaires, CFDT, FSU, UNSA) et six associations (Ligue des droits de l'homme, Cimade, Droits devant !, Femmes Egalité, Autremonde, Réseau éducation sans frontières) soutenant ce nouveau mouvement de grève se sont alarmés dans un courrier adressé au premier ministre, François Fillon, des "blocages persistants voire grandissants" qui font obstacle selon eux à une application égale de tous les textes sur la régularisation par le travail, et livrent les travailleurs concernés au règne de l'"arbitraire".

En réponse, M. Besson annonce vouloir "procéder à une comparaison des résultats enregistrés dans chaque département". A charge ensuite pour ses services "de lui proposer, si nécessaire, toute démarche utile afin d'assurer une plus grande harmonisation ".
Laetitia Van Eeckhout


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