14/10/2009

Kafkaien !! à qui la faute ?les méandres de la nationalité française

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AFP/JOEL SAGET
Le brigadier Ounoussou Guissé, à qui la justice conteste la nationalité française, après avoir rencontré le ministre de la défense, le 12 octobre à Paris.
A ses enfants, la patrie méconnaissante
LEMONDE.FR avec AFP | 14.10.09 | 11h55 • Mis à jour le 14.10.09 | 13h31

Ils sont deux frères, Amara et Ounoussou, deux frères à qui la justice pourrait contester la nationalité française. Deux frères, nés français au Sénégal, mais nés d'un père, aujourd'hui décédé, qui eut le tort d'être un ressortissant d'une ancienne colonie qui résidait en France lors de la décolonisation mais dont la famille vivait dans le pays d'origine, une situation pour laquelle une jusriprudence récente de la Cour de cassation remet en question la nationalité française.



Le brigadier Ounoussou Guissé, du 1er régiment de hussards parachutistes de Tarbes, avait comparu le 6 octobre devant la cour d'appel de Rouen pour tenter de conserver sa nationalité française et le droit de servir son pays. La cour, saisie d'un appel du parquet contre une décision qui donnait raison au jeune homme, a mis son arrêt en délibéré au 18 novembre. Le frère aîné d'Ounoussou Guissé, Amara, 31 ans, ancien caporal-chef du 12e régiment d'artillerie d'Oberhoffen, est dans une situation similaire, ayant reçu en mars 2007 un courrier du tribunal de grande instance de Strasbourg contestant sa nationalité.

SOUS LES DRAPEAUX EN AFGHANISTAN

"Saugrenue", "incongrue", le ministre de la défense, Hervé Morin, n'a pas assez de mots pour s'indigner de la situation, lundi 12 octobre, lorqu'il reçoit les deux frères. Dans une vidéo diffusée sur le site du ministère, M. Morin explique qu'"il n'est pas question de remettre en question leur engagement" dans les armées, et s'étonne lorsqu'il note que Ounoussou "a fait son service national en France, et à ce moment-là, personne n'a contesté le fait qu'il ait la nationalité française". Question engagement, effectivement, les frères Guissé se sont distingués, pour l'aîné par sept opérations extérieures, une conscription suivie de onze ans au service de l'armée française comme artilleur, pour le cadet par son engagement toujours en cours "dans un régiment d'élite à Tarbes" qui l'a conduit au Tchad et en Afghanistan.

"Ce sont des procédures qui relèvent plus de Kafka" que de la République, déplore M. Morin, expliquant avoir "appelé immédiatement" la ministre de la justice, Michèle Alliot-Marie, à qui il a succédé à la défense, pour lui faire part de son "étonnement". "Extrêmement sensible à ma démarche", assure-t-il, la garde des Sceaux "va prendre, je l'imagine, des mesures pour que de telles situations, complètement incongrues et saugrenues, ne se reproduisent pas". Et "dans l'hypothèse où la justice viendrait à refuser la nationalité française à nos deux soldats, une nouvelle procédure serait engagée et leur permettrait probablement de voir leurs droits reconnus très rapidement", rassure le ministre.

NATURALISATION

A l'Assemblée nationale, les explications du secrétaire d'Etat à la justice, Jean-Marie Bockel, sur "la possibilité de déposer une demande de naturalisation auprès de l'autorité militaire" ont été accueillies par un tonnerre de protestations sur les bancs de l'opposition. Le ministre de l'immigration, Eric Besson, a indiqué mardi soir qu'il avait "demandé à ses services de procéder à un examen attentif et bienveillant" d'une éventuelle demande de naturalisation des frères Guissé.

Le ministre précise dans un communiqué que le Code civil ouvre trois voies à Onoussou et Amara Guissé "s'ils souhaitent obtenir la nationalité française". Comme l'a fait leur frère Mamadou Guissé en 1998, ils peuvent arguer de la "possession d'état de français depuis plus de dix ans". Ils peuvent aussi demander leur naturalisation auprès de la préfecture de leur département en demandant qu'il soit tenu compte "des services accomplis dans l'armée française". Enfin, "ils peuvent attester de services exceptionnels rendus à la France".

En évoquant une "naturalisation" – "Octroi discrétionnaire par les autorités d'un Etat de la nationalité de cet Etat à un étranger ou à un apatride qui la demande", selon le Larousse 2008 –, le ministre et le secrétaire d'Etat semblent considérer comme acquis le fait que les frères Guissé, en dépit de leurs états de service, ne sont pas, pas encore ou plus des Français.


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