Polémique autour de violences policières contre un caméraman
LE MONDE | 08.06.07 | 14h55 • Mis à jour le 08.06.07 | 14h55
La justice s'apprête à clore l'enquête sur les violences qu'un journaliste reporter d'images de France 3, Gwenaël Rihet, assure avoir subies de la part d'un policier, lors du Festival de Cannes, en 2004. "On peut douter dans ce cas précis de l'impartialité des juges, indique Me Frédéric de Baets, l'avocat de M. Rihet. Les images vidéo prouvent pourtant qu'il y a eu des violences illégitimes."
Ces images sont diffusées sur le site Dailymotion. On y voit Gwenaël Rihet filmer une manifestation d'intermittents du spectacle à Cannes, le 15 mai 2004, en marge du festival du film. Très vite, les événements s'emballent. Les policiers en civil, reconnaissables à leur brassard orange, tentent d'interpeller des manifestants. M. Rihet filme, avec sa caméra portant le logo de France 3. D'un peu trop près, semble-t-il, puisqu'un policier s'approche de lui et empoigne sa caméra. Le journaliste tente de se défendre, maladroitement. En tout cas sans donner de coup de poing, si l'on en croit les images. Un deuxième policier en civil intervient, fait chuter sans ménagement le cameraman. On distingue, quelques secondes plus tard, une tierce personne qui donne de violents coups de pieds au journaliste, à terre.
VERSION POLICIÈRE CONTESTÉE
Le soir même, un médecin de l'hôpital de Cannes constate chez la victime un traumatisme crânien, une plaie au cuir chevelu de 3 cm et divers hématomes. Quelques jours après l'incident, le journaliste dépose une plainte avec constitution de partie civile.
Trois ans plus tard, la justice s'apprête à refermer le dossier. L'article 175, mettant fin aux investigations du juge d'instruction, a été notifié aux parties le 22 mars. Le policier impliqué, Pascal Gilli, témoin assisté dans le dossier, n'a pas été mis en examen. Et la juge d'instruction du tribunal de Grasse, Caroline Vercamer, a refusé la requête formulée par la partie civile : visionner les images vidéos fournies par des documentaristes qui filmaient la manifestation, ce 15 mai 2004.
Un refus motivé par le fait qu'un "descriptif précis du contenu des films effectué par l'IGPN (Inspection générale de la police nationale) figure" dans le dossier judiciaire. En effet, un enquêteur de l'IGPN avait conclu, en août 2004, au vu d'autres images vidéo, qu'elles ne faisaient "apparaître aucun geste de violence susceptible de constituer une violence illégitime". Il assurait, en outre, "qu'on ne voyait aucun coup porté à Rihet". Une version qui, selon la partie civile, ne correspond pas précisément aux faits visibles sur le film. De même, l'enquêteur indiquait que la caméra ne portait "apparemment" aucun sigle France 3. Et donc que M. Gilli ne pouvait être sûr de l'identité professionnelle de M. Rihet. Lors de la confrontation entre M. Gilli et M. Rihet, le 16 mai 2006, le magistrat devait pourtant convenir de la présence du logo.
Le policier Pascal Gilli, entendu le 27 avril 2006, a décrit ainsi les faits : "Il a lâché sa main droite de la caméra et m'a donné un coup de poing de la main droite. (...) Ce coup de poing était assez violent, puisque je me suis plié en deux."
De son côté, M. Rihet assure toujours ne pas avoir donné de coup de poing. "Que les policiers soient solidaires entre eux, c'est logique, dit-il. Mais que la justice refuse de nous suivre..."
Son avocat, Me de Baets, a déjà déclaré qu'il interjetterait appel d'une éventuelle décision de non lieu rendue par le juge d'instruction.
Gérard Davet
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