14 octobre 2010
Le fichier des Roms de la gendarmerie n’existe plus. Il était illégal, faute d’avoir été déclaré à la CNIL, mais il a été détruit, en 2007.
Lors des contrôles qu’elle a effectués, la semaine passée, dans les deux services impliqués dans ce fichier, la CNIL a cela dit découvert l’existence de quatre autres fichiers, eux aussi “illégaux“.
Elle a aussi constaté que la gendarmerie abusait de la qualification de “Roms“, entre autres “origines ethniques“, ce qui, là aussi, constitue une violation de la loi informatique et libertés.
La gendarmerie, de son côté, a annoncé sa volonté de disposer d’un fichier type “Edvige“, afin de pouvoir remplir les missions de renseignement qui lui sont imparties.
Lors de son audition, par la Commission des lois de l’Assemblée nationale, le général Mignaux, directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN), avait démenti, mercredi 13 octobre, l’existence de tout fichier ethnique qui viserait Roms et gens du voyage, se déclarant “blessé par cette tentative de déstabilisation“, et espérant que la vérité puisse enfin être rétablie :
Dans les Conclusions du rapport préliminaire des contrôles effectués auprès de la gendarmerie nationale, que vient de rendre publiques la CNIL ce jeudi 14 octobre, le gendarme des droits informatique et libertés n’est pas tout à fait du même avis que le général de la gendarmerie : elle a découvert quatre fichiers non déclarés, et constaté que la mention des origines ethniques des personnes fichées était une “pratique courante“, elle aussi en violation de la loi informatique et libertés.
Mais ces contrôles, effectués à l’Office central de lutte contre la délinquance itinérante (OCLDI), les 8 et 12 octobre dernier, ont ainsi révélé l’existence d’une “base documentaire” alimentée notamment par “des informations issues de fichiers judiciaires (STIC, JUDEX, FPR)“, et forte de 52 769 fiches de personnes.
Si ce fichier ne comporte pas de données relatives aux origines ethniques des personnes en question, souligne la CNIL, il n’a, par contre, pas été déclaré :
ANACRIM permet de “relier entre eux tout type d’éléments relatifs à une affaire (liens entre des personnes, des véhicules, des numéros de téléphone, etc.)” :
La CNIL souligne également que “la pratique de transmission massive d’informations des unités territoriales à destination de certains services centraux de la gendarmerie constitue également un traitement de données à caractère personnel” :
La CNIL a découvert, “parmi les messages adressés au STRJD (et à l’OCLDI) un volume très important a trait aux contrôles des “gens du voyage”” (identité des personnes contrôlées, photographies, n° de plaques d’immatriculation) :
Or, “en toute rigueur, cette pratique courante consistant à utiliser l’expression de “Roms” ne pourraitêtre autorisée que par un décret en conseil d’Etat, pris après avis de la CNIL, conformément à l’article 27 de la loi” :
Le général Mignaux avait précisé de son côté que les trois fichiers, eux aussi “illégaux“, et qui devaient être détruits au 24 octobre 2010 (voir Les fichiers hors la loi de la gendarmerie) ont été “totalement neutralisés, retirés de toutes les unités : toutes les fichiers ont été ramenées dans des armoires fortes, cadenassées, et le moment venu ils seront détruits“, exception faite d’extraits de ces fichiers, conservés aux archives, “i>à des fins historiques”.
Or, le FAR, fichier (papier) de renseignement alphabétique créé pour “permettre aux brigades de gendarmerie d’acquérir une connaissance approfondie de la population“, comportait “60 millions de fiches, impliquant 20 millions de personnes“.
Or, sa destruction n’est pas sans poser problème. Lors de son audition, le général Mignaux avait ainsi expliqué avoir “souvent entendu des reproches : vous nous enlevez un de nos outils de travail“.
On associe d’ordinaire le renseignement aux seuls RG (intégrés, depuis, au sein de la DCRI et de la SDIG), mais la gendarmerie y est elle aussi particulièrement impliquée, le “le renseignement et l’information des autorités” faisant clairement partie intégrante de sa mission.
Lors de son audition, le général Mignaux a ainsi expliqué attendre avec impatience que la CNIL l’autorise à exploiter “un nouvel outil“, intitulé “Base de sécurité publique“, censé remplacer le FAR et que la députée Delphine Batho présente comme l’”équivalent d’Edvige” pour la gendarmerie…
Le rapport des députés Delphine Batho et Jacques Alain Bénisti avait révélé l’existence de 58 fichiers, dont un quart étaient “hors la loi” (voir Comment légaliser les fichiers policiers ?). En y rajoutant les deux fichiers qui ont remplacé Edvige, plus ces quatre fichiers “illégaux” de la gendarmerie, on en arrive à 64, 65 en y rajoutant le fichier OSCAR (Outil de statistique et de contrôle de l’aide au retour) des empreintes digitales et photographies numérisées des visages des “bénéficiaires” de l’aide au retour.
Ce qui repose la question de l’encadrement des fichiers policiers. La loi informatique et libertés, adoptée en 1978, conditionnait la création d’un fichier “de sûreté” ou portant sur l’ensemble de la population à l’obtention d’un “avis conforme” de la CNIL. Depuis la nouvelle loi informatique et libertés, votée en 2004, le gouvernement doit certes demander son avis à la CNIL, mais il n’est plus obligé de le suivre… (voir Une loi dont l’Etat se fiche pas mal).
Nonobstant la régularisation de la “Base de sécurité publique“, la création d’éventuels autres fichiers prévus par la LOPPSI (entre autres projets de loi), ou la découverte d’autres fichiers de police et de gendarmerie non déclarés, voire “illégaux“, le nombre de fichiers dits “de sûreté” a “explosé” de 70% depuis 2004.
Or, la proposition de loi visant mieux encadrer ces fichiers, suite au scandale Edvige, a copieusement été “enterrée” par le gouvernement l’an passé (voir Fichiers policiers: les (gros) godillots de l’UMP… et de la CNIL).
Lors des contrôles qu’elle a effectués, la semaine passée, dans les deux services impliqués dans ce fichier, la CNIL a cela dit découvert l’existence de quatre autres fichiers, eux aussi “illégaux“.
Elle a aussi constaté que la gendarmerie abusait de la qualification de “Roms“, entre autres “origines ethniques“, ce qui, là aussi, constitue une violation de la loi informatique et libertés.
La gendarmerie, de son côté, a annoncé sa volonté de disposer d’un fichier type “Edvige“, afin de pouvoir remplir les missions de renseignement qui lui sont imparties.
Lors de son audition, par la Commission des lois de l’Assemblée nationale, le général Mignaux, directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN), avait démenti, mercredi 13 octobre, l’existence de tout fichier ethnique qui viserait Roms et gens du voyage, se déclarant “blessé par cette tentative de déstabilisation“, et espérant que la vérité puisse enfin être rétablie :
“J’entends mettre fin à des allégations (qui tendent) à jeter le discrédit sur notre institution. La gendarmerie n’a rien à cacher. Il n’y a pas de fichier non déclaré”.Le général avait d’ailleurs déclaré avoir accueilli “avec satisfaction” les contrôleurs de la CNIL, qui auraient démontré de manière “incontestable” le fait qu’il n’y avait pas de fichier ethnique, que les fichiers étaient tous déclarés, et qu’il n’y avait “rien d’irrégulier” (voir le compte-rendu, et les vidéos, extraites par le journaliste Franck Johannès) :
Trois fichiers “illégaux” à l’OCLDI
Précisant, de manière liminaire, que “la dénomination ‘MENS’, qui signifie “minorité ethnique non sédentarisée”, fait l’objet d’une utilisation courante par les services de la gendarmerie depuis 1992“, et qu’elle est utilisée à de nombreuses reprises, la CNIL note qu’”il n’existe pas un fichier MENS spécifiquement identifié“.Mais ces contrôles, effectués à l’Office central de lutte contre la délinquance itinérante (OCLDI), les 8 et 12 octobre dernier, ont ainsi révélé l’existence d’une “base documentaire” alimentée notamment par “des informations issues de fichiers judiciaires (STIC, JUDEX, FPR)“, et forte de 52 769 fiches de personnes.
Si ce fichier ne comporte pas de données relatives aux origines ethniques des personnes en question, souligne la CNIL, il n’a, par contre, pas été déclaré :
“Nous relevons qu’aucune formalité n’a été effectuée auprès de notre commission. Dans ces conditions, cette base de données n’est pas conforme à la loi.De plus, la CNIL a également constaté que l’OCLDI utilisait le logiciel d’analyse sérielle ANACRIM, comme l’avait constaté, lui aussi, Franck Johannès, le journaliste du Monde qui avait révélé l’existence du fichier MENS (voir Fichier des Roms : c’est la faute à Pierre Joxe).
En conclusion, l’illégalité n’est pas fondée sur le contenu de la base, mais sur l’absence de déclaration à la Commission..”
ANACRIM permet de “relier entre eux tout type d’éléments relatifs à une affaire (liens entre des personnes, des véhicules, des numéros de téléphone, etc.)” :
“Or, notre Commission relève que ce traitement ne lui a pas été déclaré. Il est donc illégal à ce titre.”La CNIL note également qu’”une base relative à la généalogie de certaines personnes particulièrement connues de la gendarmerie“, le fameux fichier MENS, “aurait été détruite en 2007“, comme l’avait d’ailleurs reconnu le ministère de l’Intérieur. Mais, “elle n’avait d’ailleurs fait l’objet d’aucune déclaration auprès de notre Commission“.
La CNIL souligne également que “la pratique de transmission massive d’informations des unités territoriales à destination de certains services centraux de la gendarmerie constitue également un traitement de données à caractère personnel” :
“Celui-ci devrait donc être déclaré. En effet, la notion de fichiers de travail temporaire évoquée par les services de gendarmerie n’existe pas au sens de la loi.”
Fichage ethnique et “illégal” au STRJD
Les contrôles effectués par la CNIL au Service technique de recherches judiciaires et de documentation (STRJD), qui “a pour principales missions la gestion technique des fichiers de renseignement judiciaire (JUDEX, FPR, FVV) ainsi que le SDRF” (le fichier des personnes sans domicile ni résidence fixe), ont eux aussi permis de découvrir d’autres violations de la loi informatique et libertés par la gendarmerie.La CNIL a découvert, “parmi les messages adressés au STRJD (et à l’OCLDI) un volume très important a trait aux contrôles des “gens du voyage”” (identité des personnes contrôlées, photographies, n° de plaques d’immatriculation) :
“Une fois encore, une telle remontée d’information constitue un traitement de données personnelles. A ce titre, il aurait du être déclaré.”Si “aucun fichier structuré regroupant des données à caractère personnel relatives aux “Roms” et organisé autour de cette notion n’a été décelé“, la CNIL note que “certaines des informations enregistrées relèvent les origines ethniques des personnes contrôlées” et que la qualification “Roms” apparaît à de nombreuses reprises.
Or, “en toute rigueur, cette pratique courante consistant à utiliser l’expression de “Roms” ne pourraitêtre autorisée que par un décret en conseil d’Etat, pris après avis de la CNIL, conformément à l’article 27 de la loi” :
“En conclusion, il faut noter que ces contrôles montrent que la fonction “renseignement de la gendarmerie nationale ignore largement la loi de 1978 modifiée en 2004.
Il est impératif pour la gendarmerie nationale d’opérer une régularisation de l’ensemble des traitements mis en oeuvre dans ce cadre”.
La gendarmerie veut son propre fichier Edvige
Lui aussi auditionné à l’Assemblée, Laurent Touvet, directeur des libertés publiques et des affaires juridiques au ministère de l’Intérieur, déclarait pour sa part que sur les 18 fichiers identifiés comme ne disposant pas de bases légales, 14 avaient été déclarés, ou étaient en cours de déclaration, ce qu’il qualifiait de “régularisation“.Le général Mignaux avait précisé de son côté que les trois fichiers, eux aussi “illégaux“, et qui devaient être détruits au 24 octobre 2010 (voir Les fichiers hors la loi de la gendarmerie) ont été “totalement neutralisés, retirés de toutes les unités : toutes les fichiers ont été ramenées dans des armoires fortes, cadenassées, et le moment venu ils seront détruits“, exception faite d’extraits de ces fichiers, conservés aux archives, “i>à des fins historiques”.
Or, le FAR, fichier (papier) de renseignement alphabétique créé pour “permettre aux brigades de gendarmerie d’acquérir une connaissance approfondie de la population“, comportait “60 millions de fiches, impliquant 20 millions de personnes“.
Or, sa destruction n’est pas sans poser problème. Lors de son audition, le général Mignaux avait ainsi expliqué avoir “souvent entendu des reproches : vous nous enlevez un de nos outils de travail“.
On associe d’ordinaire le renseignement aux seuls RG (intégrés, depuis, au sein de la DCRI et de la SDIG), mais la gendarmerie y est elle aussi particulièrement impliquée, le “le renseignement et l’information des autorités” faisant clairement partie intégrante de sa mission.
Lors de son audition, le général Mignaux a ainsi expliqué attendre avec impatience que la CNIL l’autorise à exploiter “un nouvel outil“, intitulé “Base de sécurité publique“, censé remplacer le FAR et que la députée Delphine Batho présente comme l’”équivalent d’Edvige” pour la gendarmerie…
Le rapport des députés Delphine Batho et Jacques Alain Bénisti avait révélé l’existence de 58 fichiers, dont un quart étaient “hors la loi” (voir Comment légaliser les fichiers policiers ?). En y rajoutant les deux fichiers qui ont remplacé Edvige, plus ces quatre fichiers “illégaux” de la gendarmerie, on en arrive à 64, 65 en y rajoutant le fichier OSCAR (Outil de statistique et de contrôle de l’aide au retour) des empreintes digitales et photographies numérisées des visages des “bénéficiaires” de l’aide au retour.
Ce qui repose la question de l’encadrement des fichiers policiers. La loi informatique et libertés, adoptée en 1978, conditionnait la création d’un fichier “de sûreté” ou portant sur l’ensemble de la population à l’obtention d’un “avis conforme” de la CNIL. Depuis la nouvelle loi informatique et libertés, votée en 2004, le gouvernement doit certes demander son avis à la CNIL, mais il n’est plus obligé de le suivre… (voir Une loi dont l’Etat se fiche pas mal).
Nonobstant la régularisation de la “Base de sécurité publique“, la création d’éventuels autres fichiers prévus par la LOPPSI (entre autres projets de loi), ou la découverte d’autres fichiers de police et de gendarmerie non déclarés, voire “illégaux“, le nombre de fichiers dits “de sûreté” a “explosé” de 70% depuis 2004.
Or, la proposition de loi visant mieux encadrer ces fichiers, suite au scandale Edvige, a copieusement été “enterrée” par le gouvernement l’an passé (voir Fichiers policiers: les (gros) godillots de l’UMP… et de la CNIL).
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