11/06/2007

Pesticides

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Les pesticides, un risque sanitaire avéré mais encore mal pris en compte
LEMONDE.FR | 11.06.07 | 19h30 • Mis à jour le 11.06.07 | 19h35


Les paysans, fortement exposés aux pesticides, mais aussi les personnes qui les utilisent pour leurs plantes d'intérieur, ont statistiquement deux fois plus de chances de développer des tumeurs au cerveau, d'après une étude française publiée par la revue Occupational and environmental medecine le 5 juin. Menés sur plus de cinq cents patients, ces travaux s'ajoutent à une littérature scientifique déjà fournie, montrant que l'exposition aux pesticides augmente les risques de plusieurs types de cancer (gliomes, sarcomes, cancers de la prostate) ainsi que des pathologies neuro-dégénératives, des hémopathies et des troubles de la reproduction.



L'un des auteurs principaux de cette nouvelle enquête épidémiologique, Isabelle Baldi, maître de conférence à l'université Bordeaux 2, souligne la nécessité de poursuivre la recherche, pour tenter d'associer les risques à telle ou telle famille de pesticides. Elle insiste également sur le manque de résultats scientifiques concernant d'éventuels dangers liés à l'ingestion de pesticides présents dans l'alimentation. Malgré ces incertitudes, Mme Baldi dresse un bilan sans équivoque : "Il existe dans le monde une trentaine d'études qui montrent toutes une élévation du risque de tumeurs cérébrales, et des dizaines d'autres qui témoignent d'une hausse de la fréquence des autres pathologies."

François Veillerette préside le Mouvement pour les droits et le respect des générations futures (MDRGF) et milite pour une forte diminution de l'usage des pesticides, dont la France est l'un des plus gros consommateurs mondiaux. Le co-auteur de Pesticides, révélations sur un scandale français (Fayard, 2007) avance : "Près de neuf cents molécules pesticides sont utilisées en France. On les retrouve partout, tout le monde en mange quotidiennement. En raison de cette omniprésence, il est difficile pour les scientifiques de pointer les sources précises du risque – à la différence d'un problème circonscrit comme l'amiante." Un état de fait qui explique "en partie" la lenteur de la mobilisation des pouvoirs publics, juge M. Veillerette.

DES CONSÉQUENCES SANITAIRES ENCORE À VENIR ?

Depuis 2006, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) est chargée de tester les pesticides mis sur le marché, avant leur homologation. Thierry Mercier, directeur adjoint du végétal et de l'environnement à l'Afssa, défend le sérieux des procédures d'évaluation du risque mises en place en France et en Europe. Il se félicite de l'interdiction en 2001 du traitement des vignes à l'arsenic, après la découverte de pathologies suspectes. Il reconnaît toutefois : "Il est impossible de conclure que seuls des agriculteurs qui ne respectent pas les précautions d'emploi tombent malades à cause des pesticides, et vice versa."

L'épidémiologiste Isabelle Baldi prévient : "Il faut vingt à trente ans pour qu'apparaissent les maladies générées par l'introduction d'un produit cancérigène. L'usage des pesticides a explosé dans les années 1970. On pourrait donc voir apparaître les conséquences maintenant." L'AFSSA confirme qu'une "dizaine" de substances pesticides classées cancérigènes "possibles" ou "probables" restent autorisées en France. Une future réglementation européenne sur les pesticides devrait imposer à l'industrie chimique de trouver des substituts à ces produits d'ici à 2009.
Matthieu Au

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