03/07/2007

Batiment , agriculture, restauration..tous s'engraissent sur les sans papiers

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Berre-l’Etang : espoir et peur au bidonville
Une partie des travailleurs agricoles saisonniers qui l’habitent vont être relogés. Mais quid des sans-papiers ?
Par MICHEL HENRY/LIBERATION
QUOTIDIEN : mardi 3 juillet 2007

Après trente-quatre ans d’existence, le gourbi de Berre-l’Etang (Bouches-du-Rhône) va-t-il progressivement se résorber ? A partir de demain, l’Etat, qui a semble-t-il renoncé à utiliser la manière forte, met en marche sa nouvelle approche. Il organise le relogement progressif, en foyers Adoma (ex-Sonacotra), des travailleurs agricoles saisonniers en situation régulière, qui occupent ce bidonville à la campagne, sans eau, chauffage ou électricité. Quinze personnes sont concernées par ce premier relogement. «Il en restera quinze autres ou un peu plus, que nous relogerons au fur et à mesure que des places se libéreront [en foyer]», explique le sous-préfet d’Istres, Raymond Le Deun. Selon lui, l’opération pourrait durer six mois. Les caravanes hors d’usage qu’habitent ces immigrés maghrébins seront progressivement enlevées, «pour éviter que se reconstruise un nouveau bidonville».
Le sous-préfet voit dans l’opération, organisée avec le concours de la Croix-Rouge, «une avancée significative» pour les conditions d’hébergement. Claude Pineau, de la Ligue des droits de l’homme (LDH), se réjouit effectivement que «le problème du relogement soit enfin abordé d’une manière sérieuse». Mais quid des sans-papiers qui logent là ? «Les gens en situation irrégulière n’ont rien à y faire, indique le sous-préfet. On ne peut reloger que les gens en situation régulière.» Soit, selon un recensement de l’Etat, 34 à 37 personnes. Les sans-papiers sont une ­cinquantaine. «Il est inadmissible que leur situation ne soit pas prise en compte, s’indigne Claude Pineau (LDH). Ils travaillent depuis des années en France, certains depuis dix à quinze ans. Il faut qu’ils soient régularisés.»
Sept dossiers ont été déposés en préfecture, selon la LDH. Rien ne dit qu’ils seront acceptés. D’où l’inquiétude de Médecins du Monde (MDM) pour ces travailleurs «payés la moitié du Smic horaire, [qui] doivent devenir invisibles», bien qu’ils travaillent dans les serres alentour. Le Codetras (Collectif de défense des travailleurs étrangers dans l’agriculture) s’étonne que «leurs employeurs délinquants jouissent d’une totale impunité». Un médecin de MDM, qui assure depuis six ans une «veille sanitaire» sur le gourbi, s’alarme : «50 personnes vont prendre leur baluchon et se retrouver dans la nature.»
La mairie PS de Berre a tout fait pour éviter le problème, en refusant tout projet de résidence sociale dans la commune, qui offrirait une solution logique. A défaut, l’Etat essaime les travailleurs dans la région. «Quel que soit son résultat, cette opération ne réglera pas le problème de fond, estime le Codetras. Elle servira de paravent au refus de la profession agricole et des pouvoirs publics de fournir des logements décents aux travailleurs agricoles étrangers. Refus d’autant plus scandaleux que, de l’avis unanime, le travail de cette population, avec ou sans papiers, est le facteur clé du maintien d’une agriculture compétitive dans le département des Bouches-du-Rhône.»

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