Le canard enchaîné 25 juillet
Sarkozy est le sixième président français à intervenir militairement au Tchad. Autant dire que ses prédécesseurs, De Gaulle, Pompidou, Giscard, Mitterand, et Chirac ne sont jamais parvenus à sortir de ce guêpier. Et pourtant, combien de chefs tchadiens leur ont dû une soudaine promotion à la tête de cet état malade, avant d’en être brutalement écartés ! Moralité : il n’y en a pas : le comportement de l’actuel patron du Tchad, Idriss Deby, installé au pouvoir en 1990 avec l’aide de la DGSE, ne déroge pas aux traditions locales : répression brutale, tortures et corruption.
Malgré cette sulfureuse réputation, Idriss Deby a eu droit à une séance de câlinothérapie à l’Elysée, le 19 juillet, Sarkozy voulait obtenir son accord pour le déploiement sur place d’une force européenne, afin de porter secours aux quelque 230 000 réfugiés soudanais du Darfour et aux 170 000 tchadiens qui ont fui les violences que connaît le pays depuis plus d’un an.
Quatre jours après la réception élyséenne du chef tchadien, les ministres européens des affaires étrangères décidaient, avec le soutien des Nations Unies, l’envoi sur le terrain d’une petite troupe de 2000 à 3000 hommes dont la plus grande partie sont des militaires français déjà présents au Tchad depuis fort longtemps. Mais il y a loin des bonnes parole aux actes : les soldats européens seront à la besoin d’ici septembre ou octobre prochain. D’ici là, il faudra penser au financement de cette expédition qui risque de durer longtemps…
Une guerre par procuration
Ce n’est pas tout. En attendant cet appui, le spectacle fourni par la France sur place ne fait pas relâche. Depuis près d’un an, obéissant aux ordres de Chirac puis à ceux de Sarkozy, les militaires français interviennent au Tchad contre les forces rebelles au président Deby. Aucun accord de défense pourtant, n’existe entre les deux états.
Pour quel résultat ? Tir au canon, largage de bombes par six Mirages F1-Ct basés à N’Djamena et une dizaine d’hélicoptères Puma sont souvent à l’œuvre, ravitaillés en vol encas de besoin. Mais cela ne saurait suffire, l’Elysée vient de porter à quelque 2 000 le contingent français. La feuille de route des officiers est d’une complexité remarquable.
Il leur est demandé de continuer à pratiquer une aide directe aux forces tchadiennes et aux services spéciaux d’Idriss Deby bien connus de la population pour leur incontestable amour des droits de l’homme. Deuxième mission, mener des opérations de renseignements pour le compte des troupes françaises et tchadiennes. Troisième mission, fournir du matériel et des instructeurs, y compris des membres de la DGSE, aux militaires et aux barbouzes du pays. Enfin, l’Elysée veut que ces militaires puissent intervenir le cas échéant dans d’autres opérations qui pourraient être conduites en Afrique Centrale, aux côtés de leurs collègues basés en Côte d’Ivoire, au Sénégal ou au Gabon.
« Les besoins de la petite armée tchadienne sont énormes » reconnaît-on à l’état major des armées à Paris. Des milliers de kilomètres de frontières avec le Soudan, la Libye et le Centrafrique. Mais toujours pas question d’avouer que la France fait la guerre à la place des tchadiens.
Ce ne serait pas très militairement correct…
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire