23/07/2007

Une belle 'usine à gaz' pour l'écologie

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Préparation délicate pour le Grenelle de l'environnement
LE MONDE | 23.07.07 | 14h35 • Mis à jour le 23.07.07 | 14h36

La préparation du "Grenelle de l'environnement", consultation qui doit aboutir en octobre à une quinzaine de projets marquant l'engagement de la France en faveur du développement durable, ne va pas de soi. La composition des groupes de travail a d'emblée fait polémique. Six thèmes ont été retenus : changement climatique et énergie ; biodiversité et ressources naturelles ; environnement et santé ; production et consommation durables (qui comprend l'agriculture) ; démocratie écologique ; emploi et compétitivité.

Depuis quelques semaines, rares sont les groupes d'intérêt qui n'ont pas manifesté le souhait "d'en être". Agriculteurs, chasseurs, défenseurs des animaux, syndicats professionnels, entre autres, ont organisé la pression.

Mais les places étaient limitées. Chaque groupe est structuré en cinq collèges paritaires (Etat, ONG, collectivités locales, syndicats, patronat). Au sein des collèges, le choix a été difficile. Côté ONG, la discussion a tourné au vinaigre, entre France Nature Environnement (FNE), qui représente des associations locales en France, et l'Alliance pour la planète, qui rassemble des ONG internationales (Greenpeace, WWF...) et des associations spécialisées. Les sièges ont finalement été partagés équitablement, avec une place réservée partout à la Fondation Nicolas Hulot (FNH), dont le rôle-clé est unanimement reconnu.

Le Medef, qui a constitué des groupes "miroirs" à ceux du Grenelle, a lui aussi été confronté à un embouteillage. "Passer de 85 fédérations adhérentes à 18 représentants au Grenelle, c'est un exercice périlleux", explique Sophie Liger, directrice du développement durable de la fédération patronale.

Après ces arbitrages douloureux, les participants ont découvert de nouveaux invités, les "personnes morales associées", au nombre d'environ une dizaine dans chaque groupe. "Quand on voit arriver des représentants des agriculteurs ou de Total comme personnes morales, on peut craindre une gestion hors quota du collège patronal", déplore Yannick Jadot, porte-parole de l'Alliance pour la planète. Cependant, selon Arnaud Gossement, de FNE, il s'agit d'"une mauvaise polémique". "Les anti-OGM et Total, je préfère les avoir dans les groupes", affirme-t-il. Le profil des personnes morales est varié. Il s'agit à la fois de représentants d'associations écologistes, familiales ou de consommateurs, de secteurs économiques (immobilier, coopératives agricoles, industrie forestière, etc.) et d'experts comme Jean-Marc Jancovici sur le climat ou Jean-Marie Pelt sur la biodiversité.

Autre inquiétude : personne ne connaît exactement la marche à suivre, même s'il est prévu que les groupes se réunissent quatre fois d'ici à septembre, avant des consultations sur Internet et en régions. Les groupes sont partis en ordre dispersé, certains organisant des sous-commissions et discutant déjà du fond, comme sur la biodiversité. La réunion du groupe agriculture a, en revanche, été jugée confuse. Les débats en sont restés à la délimitation du périmètre de réflexion. L'apparition de certains thèmes - OGM, fiscalité, agrocarburants - dans plusieurs groupes de travail a ajouté aux tensions.

Personne ne sait sur quels critères sera effectué le tri entre les dizaines de propositions qui ne manqueront pas d'émerger, encore moins comment les 10 ou 15 mesures phares seront choisies. "On n'a pas la méthode, et je ne suis pas sûr que le gouvernement l'ait lui-même", relève Franck Laval, de l'association Ecologie sans frontières. "Il faut éviter que les rapporteurs sélectionnent les propositions les moins conflictuelles, et qu'on aboutisse à des mesurettes", dit Yannick Jadot.

"Nous ne mettons pas en doute la volonté d'aboutir, mais nous avons besoin d'un cadrage méthodologique", affirme Jean-Stéphane Devisse, responsable de la coordination de l'Alliance. Pour Jean-Paul Besset, porte-parole de la FNH, ces cafouillages s'expliquent par le fait qu'il s'agit d'un exercice "totalement inédit, qui va s'inventer au fur et à mesure que nous avancerons".
Gaëlle Dupont
Article paru dans l'édition du 24.07.07

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