Après le drame d'Amiens, controverse relancée sur les expulsions d'étrangers
AFP
Par Sophie LAUTIER AFP - il y a 2 heures 1 minute
PARIS (AFP) - La controverse sur les expulsions de sans-papiers rebondit au coeur de l'été avec le drame d'Amiens, les associations accusant l'administration de mettre les bouchées doubles en profitant de la torpeur estivale tandis que le ministère dément tout activisme particulier.
"C'est sûr, il y a une accélération depuis début août", a affirmé Brigitte Wieser, militante du Réseau Education Sans Frontières (RESF), qui a précisé à l'AFP: "Rien que sur Paris, nous avons une dizaine de parents en centre de rétention, ça ne nous est jamais arrivé d'en avoir autant en même temps".
RESF Ile-de-France appelle à un rassemblement mardi à Paris qui sera "dédié à Ivan": l'enfant russe sans-papiers de 12 ans s'est grièvement blessé à Amiens jeudi en chutant accidentellement du 4e étage, lors d'une tentative d'interpellation de ses parents à leur domicile.
"Ce type d'interpellations était rare et si cette tendance se confirme, ce sera un tournant. C'est un durcissement net dans les méthodes d'interpellation", a estimé Laurent Giovannoni, secrétaire général de la Cimade (service d'entraide oecuménique), tout en ne notant pas "de hausse sensible des expulsions" effectives.
Selon M. Giovannoni, ces "méthodes disproportionnées créent des peurs-paniques, un sentiment de psychose" chez les familles "dont les adresses sont connues parce qu'elles ont entrepris des démarches de régularisation".
"Ce qui vient de se passer peut se reproduire", s'est inquiété Mouloud Aounit, président du Mrap, jugeant que "le durcissement auquel on assiste va conduire inévitablement à d'autres drames".
La Cimade demande "que des consignes claires soient données pour ne plus utiliser ces méthodes d'interpellation à domicile", dont on ne sait "si elles émanent du ministère de l'Intérieur ou de l'Immigration".
Le journal Libération a publié samedi une circulaire d'une préfecture d'Ile-de-France, datée du 11 juillet, détaillant les modalités des arrestations de personnes en situation irrégulière à domicile, des dossiers à traiter "prioritairement". Place Beauvau, on affirmait lundi "ne pas être à l'origine" de ces instructions.
Au nouveau ministère de l'Immigration et de l'identité nationale, on se défend aussi de consignes spécifiques pour les vacances, rappelant que Brice Hortefeux le 9 août avait assuré qu'il n'y avait "pas de particularisme pour le mois d'août".
Pour RESF, la note de la préfecture francilienne "fait suite à une réunion le 10 juillet au ministère".
Celui-ci a confirmé la tenue à cette date d'une "réunion de travail à huis clos" entre M. Hortefeux et "l'ensemble des préfets", sans en dévoiler la teneur.
"Il n'y a pas de durcissement de la politique" vis-à-vis des clandestins, a estimé Olivier Damien, secrétaire national du syndicat des commissaires de la police nationale, soulignant que les arrestations à domicile se font "dans le cadre d'une procédure prévue par le code pénal" (art.78).
Sur le terrain, les policiers font état d'un certain "flottement", selon Francis Masanet, secrétaire général adjoint de l'Unsa-Police (premier syndicat de gardiens de la paix).
"On sait que les gars ont des consignes verbales, rien n'est franc, il n'y a pas de traces, c'est le flou artistique, tout est interprété en fonction de la sensibilité des préfets", a déploré M. Masanet, qui réclame au ministère "des directives claires et précises".
Ainsi, le préfet de l'Oise a adressé le 25 juillet aux maires du département un courrier, dont l'AFP a obtenu copie, attirant leur attention sur le fait que les "parrainages" ou autres actions de soutien de sans papiers étaient passibles de poursuites.
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