Les syndicats de policiers dénoncent le "manque de suivi judiciaire" des interpellations de sans-papiers et mettent en cause les juges des libertés et de la détention (JLD).Polémique police/justice sur les sans-papiers en plein débat sur l'immigration
AFP
Par Par Rémy BELLON et David ARRODE AFP - il y a 51 minutes
PARIS (AFP) - En plein débat parlementaire sur l'immigration, une polémique oppose policiers et magistrats sur les sans-papiers, les premiers reprochant aux seconds de "faire obstacle" aux interpellations tandis que les seconds critiquent la "légèreté" de leurs procédures.
Les syndicats de policiers dénoncent le "manque de suivi judiciaire" des interpellations de sans-papiers et mettent en cause les juges des libertés et de la détention (JLD).
Les magistrats répliquent que "les procédures (policières) ne sont pas réglementaires", à l'instar d'Hélène Franco, secrétaire générale du Syndicat de la magistrature (SM, classé à gauche). Ils réfutent tout laxisme comme leur en font reproche, de manière feutrée, les policiers.
La polémique a pris naissance après la convocation par le ministre de l'Immigration, Brice Hortefeux, mercredi à Paris, d'une vingtaine de préfets n'ayant pas atteint leurs objectifs d'expulsions de sans-papiers. M. Hortefeux a rappelé le quota de 25.000 expulsions fixé pour la métropole par le président de la République pour 2007, une "politique du chiffre" dénoncée par les associations de défense des immigrés et par certains syndicats de police.
"Cet objectif n'est pas réalisable", estime Nicolas Comte, secrétaire général du Syndicat général de la police (SGP-FO). "Il faudrait, dit-il à l'AFP, se recentrer sur la lutte contre les réseaux et arrêter avec cette politique du chiffre à outrance et des quotas". Pour lui, "le dossier coince ailleurs: nos collègues interpellent à tout va et dépassent, comme à Paris, les objectifs fixés. Mais un tiers des procédures sont effectivement validées au niveau judiciaire".
Le syndicat des commissaires (SCPN, majoritaire), réputé conservateur, a réalisé une étude poussée sur le sujet, à Paris également, signée par Gilles Beretti, commissaire chargé aux Renseignements généraux (RG) de la lutte contre l'immigration. Le syndicat y pointe plusieurs exemples "accablants" de "nullités" par des magistrats parisiens. "Le JLD est souverain" et "parfois partial", écrit-il et "les policiers assistent, impuissants, à une joute politique où tous les coups sont permis".
60% des décisions de reconduite à la frontière d'étrangers en situation irrégulière (ESI) ne sont pas exécutées dans le Puy-de-Dôme, en raison notamment de vices de procédure, a souligné jeudi, en écho, le préfet du Puy-de-Dôme, Dominique Schmitt, convoqué par M. Hortefeux la veille. C'est dû, selon lui, "pour l'essentiel à des vices de procédure". Il cite des annulations de procédures par des JLD, tout en reconnaissant des "imperfections" de la part des services de police ou de gendarmerie.
"C'est vrai qu'il y a beaucoup d'annulations", a affirmé lundi à l'AFP Hervé Lourau, JLD à Bobigny (Seine-Saint-Denis). "On annule quand les conditions de contrôles d'identité, d'arrestation ou de garde à vue ne sont pas conformes à la loi". "Le JLD applique la loi. Si les préfets attribuent cette situation aux JLD, ils l'attribuent en fait à leur incapacité à appliquer les lois de la République", a-t-il ajouté.
Pour Olivier Joulin, JLD à Bordeaux, "c'est la loi" qui demande "au JLD de vérifier que la procédure est respectée". "Quand quelque chose ne va pas, on dit que c'est la faute des juges", note-t-il. Il y a sur nos collègues JLD une pression fantastique qui vient d'une politique du chiffre", affirme Mme Franco, "mais on vit encore dans un Etat de droit".
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