11/09/2007

Les allemands tiennent tête au VRP de l 'atome

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Sarkozy provoque un court-circuit nucléaire avec l'Allemagne
Par Pierre Rouchaléou (Journaliste) 13H44 11/09/2007/ RUE89

(de Berlin) Les visites que Nicolas Sarkozy fait en Allemagne sont toujours pleines de surprises. Lundi, lors de sa rencontre avec Angela Merkel, le président français est venu défier ses interlocuteurs allemands sur le terrain le plus glissant qui soit entre les deux pays, celui du nucléaire civil, suscitant de vives réactions.

"J'aimerais que la France et l'Allemagne aient des ambitions qui aillent dans le même sens", a déclaré Nicolas Sarkozy à la presse, après une séance de travail avec la chancelière au château de Meseberg, au nord de Berlin, en soulignant que les énergies renouvelables et le nucléaire devaient se compléter.

"On ne peut rester en Europe face à une situation où, dans un siècle il n'y aura plus de gaz, où dans 30 ou 40 ans, il n'y aura plus de pétrole. Il n'y a personne qui peut imaginer que les éoliennes serviront à faire tourner toute l'Europe", a déclaré le président français. "C'est une question qu'il faut poser. L'énergie, c'est le devoir de l'Europe, je veux une politique de l'énergie européenne", a-t-il ajouté. C'est "difficile" qu'il y ait "un choix en France et un choix différent en Allemagne", a-t-il remarqué tout en s’interdisant de "s'immiscer dans un débat politique intérieur allemand".

Raté. Le ministre allemand de l'Environnement, le social-démocrate Sigmar Gabriel, ne l’a pas entendu pas de cette oreille puisqu’il s’est empressé d’accorder un entretien au quotidien Tagesspiegel où il récuse fermement l’invitation du président français à revenir à l'atome et à renoncer aux éoliennes pour assurer l'avenir. Le contrat de la "grande coalition" passé en novembre 2005 entre les conservateurs et les sociaux-démocrates prévoit la sortie du nucléaire à l'horizon 2020. C'est un sujet de tensions permanentes entre le camp d'Angela Merkel qui aurait voulu revenir sur cet engagement pris par le gouvernement de Gerhard Schröder, et les sociaux-démocrates, fermement attachés à l'abandon du nucléaire.

Aussi, après avoir vigoureusement rejeté l’appel de Sarkozy, Sigmar Gabriel a contre-attaqué en estimant que cet appel sert essentiellement les intérêts français. "Mais ceux-ci ne sauraient être le critère de la politique européenne en matière d'énergie et de protection du climat", a-t-il dit. "L'énergie nucléaire est tout sauf une technologie du futur" et, à l'échelle mondiale, les centrales nucléaires qui ferment sont plus nombreuses que celles qui ouvrent, a-t-il ajouté. Seuls 30 réacteurs sont en construction de par le monde, a souligné Sigmar Gabriel.

La réaction du député SPD Ulrich Kelber aux propos tenus par Nicolas Sarkozy a été encore plus cinglante: pour lui "la France est au niveau d’un pays en développement en matière de nouvelles technologies énergétiques. 90% des installations solaires achetées en France sont importées d'Allemagne. La France n'a rien à offrir à part l’énergie nucléaire qui est une technologie de dinosaure".

Au début du mois, suite à des défaillances dans deux centrales nucléaires exploitées par Vattenfall (Brunsbüttel et Krümmel), Sigmar Gabriel avait proposé de fermer sept des plus anciennes centrales nucléaires allemandes. Il a essuyé un refus d’Angela Merkel. Le renoncement à l'atome civil est une des conditions des sociaux-démocrates pour former une coalition avec les chrétiens-démocrates. Angela Merkel est favorable à l'option nucléaire mais elle ne peut se permettre de rompre l'accord de gouvernement à deux ans des prochaines élections législatives.

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