25/11/2007

Aux USA .. TRES peu de profs titulaires..a méditer

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Pour info: la situation 'dans quelques années' si le mouvement n'aboutit pas,
Le cahier des charges établi par l'Inspection générale des finances en France et annexé à la LRU -octobre 2007- se demande comment l'université va pouvoir financer son personnel, si elle est 'autonome' (et déploie les recours envisageables), cet article du N-Y Times nous explique comment elle y parvient tout à fait, aux Etats-Unis,
A diffuser largement,
Bonne lecture,
MX


La diminution des postes de titulaires soulève l’inquiétude
RESISTONS ENSEMBLE

Par Alan Finder, New York Times, 20 novembre 2007 - Dearborn, Michigan.


Les professeurs titulaires ou assimilés1 forment désormais une nette minorité dans les campus du pays dans la mesure où, d’après les chiffres fédéraux analysés par l’Association américaine des professeurs d’université, la part des enseignants et professeurs à temps partiels embauchés sous contrat à durée déterminée s’est envolée.

Elaine Zendlovitz, ancienne manager dans un magasin, a commencé à enseigner à l’université il y a 6 ans. Elle est un exemple représentatif de ce changement. Techniquement, Mme Zendlovitz est professeur d’espagnol à temps partiel pourtant, dans les faits, elle enseigne presque à plein temps. Sa journée commence à Dearborn, Université du Michigan, avec des cours d’initiation. Certains jours, elle finit à 22h à l’Oakland Community College dans la banlieue nord de Detroit, qui fait partie d’une des quatre institutions où elle donne six cours. Mme Zendlovitz confie, pendant une pause dans sa journée de 10h d’enseignement : « Je pense que nous, les temps partiels, assumons la charge de travail d’un temps plein », mais elle affirme : « il est plus difficile de passer du temps avec les étudiants. Je n’ai pas de temps de préparation et pourtant je sais comment préparer un super cours ».

Le passage d’une université employant des enseignants titulaires à une université de travailleurs précaires résulte des pressions financières, de la volonté de flexibilité émanant des administrateurs quant à l’embauche, le licenciement et le changement dans l’offre des cours, ceci résulte enfin du nombre croissant d’universités publiques régionales et locales intéressées uniquement par l’enseignement basique et la préparation des étudiants à l’embauche immédiate dans les entreprises. Le phénomène a atteint un point tel que certaines universités, préoccupées par les effets néfastes sur la qualité de l’éducation, font machine arrière. L’Université Rutgers a conclu un accord salarial en août pour accroître de 100 postes le nombre de professeurs titulaires et assimilés. A travers le pays, les syndicats d’enseignants universitaires se sont saisis du dossier des employés contractuels à temps partiel et la Fédération américaine des enseignants pousse,
dans onze états, le gouvernement à légiférer afin que 75% des cours soit assuré par des professeurs titulaires ou assimilés. D’après les études de l’association des professeurs, basées sur les rapports du Département Fédéral de l’Education, le nombre de contrats précaires - qu’ils soient à temps complet ou à temps partiel- est passé de 43% à 70% en trente ans dans le public, comme dans le privé.
John W. Curtis, le directeur du syndicat de la recherche et de la politique publique, explique que le nombre de professeurs titulaires et assimilés a bien augmenté de 25% en trente ans mais que cette augmentation se retrouve noyée dans la croissance des personnels d’enseignement et de recherche auxiliaires. Au total, le nombre de personnels enseignants dans le supérieur a doublé depuis 1975.

Les dirigeants des universités admettent que le recours à ce type d’emplois est en pleine expansion mais certains contestent les calculs de la fédération sous prétexte que les définitions de « temps complet » et « temps partiel » varient et qu’il n’est pas possible de déterminer combien chaque catégorie de professeur donne de cours en moyenne.

Nombreux sont les directeurs d’universités d’Etat qui affirment que face aux restrictions budgétaires et par souci d’économie, il est impossible de faire autrement que d’employer des contractuels. Charles F. Harrington, principal de l’université de Caroline du Nord (Pembroke) raconte : « Nous devons jongler entre la pression publique qui demande une plus grande responsabilité, des contrôles financiers toujours plus rigoureux et un financement public en déclin ». Il ajoute : « Un des moyens les plus faciles et les plus pratiques pour répondre à ces pressions est d’employer du personnel a temps partiel », pourtant il signale que les universités qui auraient trop tendance à se reposer sur ce type de personnels « jouent un jeu vraiment très dangereux ». Mark B. Rosenberg, président des universités de Floride affirme quant à lui que les employés contractuels apportent aux étudiants leur expérience du monde réel et permettent de combler les manques dans des matières comme l'infirmerie, les maths, la comptabilité et d'autres disciplines où le personnel qualifié fait défaut. Il ajoute, par ailleurs, qu’un changement ne se ferait pas sans frais.
Les enseignants racontent que souvent il n'est pas demandé aux auxiliaires d'avoir soutenu une thèse et qu'ils ont aussi moins le temps de rencontrer les élèves. Les recherches suggèrent que les étudiants qui choisissent de prendre la majorité de leurs cours avec ces enseignants ont une probabilité plus faible d’obtenir leur diplôme. « En réalité, ce que nous faisons, c'est offrir une éducation de moins bonne qualité à ceux qui en ont le plus besoin », commente Ronald G. Ehrenberg, directeur de l'Institut Cornell d'Education Supérieure et de Recherche, tout en faisant remarquer que l'envolée du nombre de contrats auxiliaires est plus prononcée dans les universités 1 [tenure-track : Lecturer, Adjunct Professor, or Research Professor, l’équivalent chez nous seraient les maîtres de conférences et les assistants] Ndt. locales et dans les universités d'Etat les moins select. Les universités d’élite, à la fois publiques et privées, ont moins d’auxiliaires. « Je ne dis pas qu'il n'y a pas d'auxiliaires qui soient de super enseignants », dit le Dr. Ehrenberg. « Nombreux sont ceux qui ne disposent pas des avantages qu'apporte un poste de titulaire en termes de bureaux, de secrétariat ou de temps. Leur service est plus lourd et ils ont moins le temps de se préoccuper des étudiants. ». Le Dr. Ehrenberg et un de ses collègues ont analysé les données nationales sur 15 ans. Ils ont constaté que les taux de réussite décroissent quant les universités font appel à un plus grand nombre de personnels auxiliaires. Plusieurs études menées individuellement par certaines universités ont démontré que les étudiants de premières années dont les cours seraient assurés en grande partie par ce type de personnels seraient plus enclins à abandonner leurs études. Pour Eric P. Bettinger, professeur d’économie à l’Université Case Western Reserve de Cleveland « avoir un cours donné par un auxiliaire n’est pas nécessairement mauvais, par contre en avoir beaucoup pourrait l'être ».

Les étudiants expliquent qu'ils n'arrivent souvent pas à dire si tel enseignant est contractuel ou non. Mark Brennan, étudiant en deuxième année à l'Université de Michigan, Deaborn, considère que les cours dispensés par les auxiliaires sont en règle générale plus basiques et les examens moins difficiles. Pour M. Brennan, « ils ont tellement de cours qu’ils donnent des examens plus faciles à corriger ». Carly Matkovich, étudiante de dernière année à l’université, raconte qu’elle a mieux accroché avec des professeurs contractuels notamment parce qu’ils ont plus d’expérience pratique. Mais, il est plus difficile de trouver du temps pour parler avec eux en dehors des cours. « Ils ne sont jamais là. J’ai un peu l’impression d’être trompée sur la marchandise ».

Dans certains départements, la proportion de personnels titulaires est étonnement basse. Le département de psychologie de l’Université internationale de Floride, à Miami, a 2400 étudiants en 2ème cycle pour seulement 19 professeurs titulaires, selon le département d’autoévaluation. Il est possible pour un étudiant en 2ème cycle de psychologie d’obtenir son diplôme sans avoir assisté à un seul cours dispensé par un titulaire.
« On a atteint un point extrême » dit Suzanne Rose, professeur de psychologie, qui a démissionné en août de la direction du département notamment parce qu’elle ne pouvait pas embaucher le nombre nécessaire, selon elle, de professeurs titulaires. « Je suis vraiment préoccupée par la qualité ». Ronald Berkman, principal à Floride International, conteste ces chiffres en affirmant que le département de psychologie comporte 23 professeurs titulaires et 5 enseignants en contrat. Le département serait en cours de recrutement de 3 nouveaux titulaires selon le Dr Berkman. « Ceci ne veut pas dire qu’il n’en faudrait pas davantage, ce qui est le cas ». Le statut de titulaire importé aux Etats-Unis du système allemand avait pour but de garantir la liberté académique aux professeurs en les protégeant du licenciement. Certains soutiennent que cela protège aussi les incompétents et les paresseux et que parfois les universités se trouvent lestées de professeurs dont les disciplines ne sont plus d’actualité. Le manque de titularisations rend les auxiliaires plus vulnérables. Nombreux sont les cas où les professeurs non titulaires ont été licenciés après des querelles avec la direction pour des raisons aussi diverses que le système de notation des étudiants ou une divergence d’opinion sur des articles parus dans la presse. Ces dernières années, de nombreux syndicats ont tenté de se saisir du dossier des personnels auxiliaires. La Fédération américaine des enseignants a réussi à syndiquer des professeurs à plein temps en CDD à l’Université de Michigan Est ; sur les campus de l’université de Michigan à Ann Arbor, Deaborn et Flint, ils sont aussi parvenus à syndiquer des auxiliaires à temps partiel et à temps plein. Pour David Hecker, président de la fédération des enseignants : « les personnels auxiliaires sont tellement exploités que la seule difficulté pour les syndiquer c’est de les trouver ». Keith Hoeller, qui enseigne la philosophie depuis 17 ans à temps partiel à Seattle le définit en ces termes : « c’est un système de castes et nous sommes les intouchables de l’académie ».
Aletia Droba a enseigné durant 10 ans comme professeur à temps partiel du côté de Detroit. Elle affirme avoir été payée moins de 1400 dollars pour un cours dans les universités locales et 2400 dollars la classe dans les universités. Mme Droba raconte qu’il lui est arrivé, certains semestres, de donner jusqu’à sept cours dans quatre universités locales, y compris de l’autre côté de la frontière, au Canada. Cet automne elle a décroché un temps plein en CDD. Durant l’automne et le printemps, elle va donner cinq cours, moins que ce qu’elle a souvent enseigné en un seul semestre à temps partiel. Les heures passées au volant, quant elle était en temps partiel, à courir d’une université à une autre ne manqueront pas à Mme Droba : « Mes étudiants me demandent souvent comment je fais pour connaître aussi bien l’actualité et je leur réponds que j’écoute la Radio publique nationale toute la journée ».

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