07/11/2007

Fac: c'est pas la joie

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Axelle, du 93, nous donne sa vision d’un lieu qu’elle a choisi pour la qualité de ses études, mais qui se révèle décevant en termes de brassage humain
Fac de droit de Nanterre : Neuilly boys and girls d’un côté, Noirs et Arabes de l’autre

Publié sur BondyBlog (http://20minutes.bondyblog.fr) dans la rubrique Actualités
Par NordineNabili, le Mercredi 7 Novembre 2007, 00:02

La fac de droit de Nanterre est réputée pour le bon niveau de son enseignement. Pas de bol, l’ambiance n’est pas à la hauteur. Ici, à part ceux qui se connaissaient déjà avant leur arrivée, personne ou presque ne parle à personne. Les quelques mots échangés avec ceux qui m’entourent en amphi se sont limités jusqu’ici à : « Elle a dit quoi ? », « C’est quoi la dernière phrase ? » Après deux semaines à la fac, Hawa, une amie avec qui j’étais au lycée au Blanc-Mesnil, demeurait mon seul lien. Avec le début des TD, je me suis mise, du moins je m’y efforce, à parler avec des gens qui ne semblent pas vouloir faire de même. J’ai quand même trouvé quelqu’un avec qui je m’entends bien, Jennifer, elle vient de Bobigny.

« T’as vu comment personne nous calculent ici ? », lui dis-je en rigolant. « Moi, répond-elle, j’ai parlé avec des gens, dès que je leur ai di que je venais de Bobigny, ils m’ont dit : là où il y a le tribunal dans le 93 ? Et ils ne sont plus jamais revenus me parler. » J’éclate de rire, un peu pour me moquer certes, mais surtout devant la bêtise de certaines personnes. Ma nouvelle camarade me présente aux quelques contacts qu’elle s’est faits depuis le début de l’année : que des Noirs et des Arabes, tous sont issus du 93, du 95 ou des zones « ghetto » du 92.

Je m’en étonne et leur demande : « C’est normal cette ambiance ? Avez-vous fait connaissance avec d’autres gens ? » « Ici n’y a que des clans, devant il y a les NBNG*, et au fond il y a nous », dit l’un d’eux. Une autre ajoute : « Non, pas forcément, dans l’amphi c’est mélangé mais les gens ne se parlent pas, c’est genre les Rebeus et les Renois entre eux et les autres entre eux aussi. Mais ils sont graves, le premier jour je n’arrivais pas à noter ce que le prof disait donc j’ai voulu regarder ce que ma voisine avait écrit et elle a caché sa feuille avec son bras. Ce n’est pas médecine ici, il faut arrêter. » Autre anecdote : alors que je voulais de la monnaie sur un billet de 5 euros pour pouvoir me payer un repas, personne n’a pu ou n’a voulu me la faire. Il y a même une étudiante qui devant la cafétéria les mains pleines de pièces me lance : « Non, je suis désolée, je n’ai pas de monnaie. »

« Les autres pensent qu’on veut foutre la merde, qu’on est des délinquants, me dit Jennifer. A cette heure-ci, on a tous eu notre bac, donc voilà. » Oui, voilà la triste réalité de la fac de droit à Nanterre. Beaucoup me demandent pourquoi je ne me suis pas inscrite à Villetaneuse ? Il fallait choisir entre la bonne ambiance de Villetaneuse et qualité de l’enseignement à Nanterre. « Dans tous les cas tu ne pourras pas avoir les deux », m’avait-on prévenue. Quelle désillusion ! Moi qui pensais découvrir un autre univers en entrant à l’université, je l’ai finalement trouvé mais ce n’est pas celui que je souhaitais. Je suis arrivée sans grand préjugé et je repars quelques-fois en étant obligée d’admettre cette triste réalité : l’intégration va d’autant moins de soi lorsque l’on vient de quartiers dit difficiles et qu’en plus, l’on est noirs ou arabes.

Axelle Adjanohoun

*NBNG= Neuilly Boys ou Neuilly Girls, ce sont des jeunes de Neuilly-sur-Seine en général ou d’ailleurs, qui toisent les autres et qui par leur attitude disent: « Moi j’ai ça, ça et ça. »



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