LEMONDE.FR | 17.11.07 | 12h25 • Mis à jour le 17.11.07 | 13h01
Le conflit perdure, et l'Elysée change de stratégie, tout en encourageant le ministre du travail, Xavier Bertrand, à "poursuivre ses efforts" en vue d'aboutir à une négociation. Nicolas Sarkozy a prévenu ses conseillers en fin de semaine : il souhaite désormais entrer"dans une deuxième phase" de la gestion de la grève dans les transports publics, alors que celleci est en passe de se prolonger au-delà du week-end malgré une mobilisation en baisse."La semaine prochaine, on fera de la politique et de l'idéologie", a déclaré jeudi 15 novembre le président de la République devant l'état-major de l'UMP, à Paris.
Ce changement de pied devrait se traduire par une prise à témoin plus marquée encore de l'opinion, après une semaine où M. Sarkozy a voulu jouer la carte du " dialogue " en saisissant la main tendue par la CGT. Cette concession a été de trop pour une partie de la base UMP, qui rêve de voir les syndicats battus à plates coutures. "Tout ce que nous avons fait jusqu'à présent nous permettra éventuellement davantage de fermeté plus tard , a lancé le chef de l'Etat.
"LES GRÉVISTES NE PEUVENT PAS TENIR"
Les sondages confidentiels dont dispose M. Sarkozy l'encouragent dans cette stratégie. Plus de 70 % des personnes interrogées soutiendraient désormais la réforme des régimes spéciaux de retraite, soit dix points de plus en dix jours. "Les grévistes ne peuvent pas tenir", conclut-on à l'Elysée, où l'on estime avoir gagné la bataille de l'opinion. Contrairement à 1995, où les nuisances de la grève avaient fortifié la solidarité des usagers envers les grévistes, chaque jour qui passe renforce le ressentiment des premiers à l'égard des seconds."On compte sur la population pour faire pression sur les grévistes", explique un conseiller. Un autre ajoute : "Il faut jouer sur l'exacerbation du conflit, ou du moins la constater."
Parallèlement, M. Sarkozy encourage toutes les initiatives destinées à faciliter la vie quotidienne des usagers des transports en commun, notamment en Ile-de-France. Les maires UMP réunis jeudi 15 novembre au siège du parti ont été incités à multiplier les signes envers le public. Des bus de substitution, des centrales de covoiturage devraient voir le jour dès ce week-end. Il leur a été conseillé d'allonger les horaires d'ouverture des services municipaux, tels que les crèches.
JONCTION ENTRE GRÈVE DES TRANSPORTS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE
La distribution des tracts expliquant la réforme et stigmatisant "l'immobilisme" va s'amplifier. L'objectif est double, à quatre mois des municipales : présenter l'UMP comme un parti de bienfaisance dans les villes qu'elle gère, et prendre le Parti socialiste, favorable à l'alignement des régimes spéciaux sur le régime général, "au piège de ses contradictions".
Décrit comme "serein" par ses proches, M. Sarkozy envisage sans angoisse la jonction entre le conflit dans les transports publics et la grève, mardi 20 novembre, de la fonction publique. Il table sur le fait que les revendications particulières des agents de la SNCF et de la RATP "polluent" le mot d'ordre plus général sur le pouvoir d'achat et les effectifs des agents de l'Etat."S'il y a pollution, il y aura dilution", veut-on croire à l'Elysée, où l'on compte isoler les grévistes des transports dans des "revendications catégorielles".
Néanmoins, cette stratégie traduit une forme d'impuissance du chef de l'Etat. Constatant que ni la fermeté ni la souplesse ne sont venues à bout du conflit, il fait le pari du "peuple" et de l'exaspération. Il donne aussi raison à tous ceux qui le soupçonnent de vouloir "dresser les Français les uns contre les autres" ou de souhaiter le durcissement de la grève pour "mettre les syndicats à genoux". Mais l'idée de manifestations organisées au grand jour par l'UMP est toujours écartée par l'Elysée : "Nous ne sommes pas le 30 mai 1968", s'amuse un conseiller du chef de l'Etat.
Philippe Ridet
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