UNIVERSITE - Samuel (1) a 20 ans. Il est en première année à Lyon II. Engagé dans le mouvement contre la loi Pécresse, il vient de passer trente-cinq heures en garde-à-vue avant d'être relâché vendredi, comme 12 de ses camarades. Les policiers les soupçonnaient d'avoir participé à un vol collectif dans un Leader Price de Bron (lire). La procédure semble fragile et le parquet a préféré ouvrir une information judiciaire, plutôt que d'opter pour la comparution immédiate. Samuel, pas poursuivi, témoigne pour LibeLyon de sa garde-à-vue, au cours de laquelle les policiers se seraient autant intéressé au mouvement étudiant qu'au vol dans le magasin.Le témoignage de Samuel :
"Lorsque les forces de l'ordre sont intervenues, mercredi soir, on était dans un amphi, sur le campus de Bron. Je n'avais pas participé à l'opération dans la magasin, et aucun de ceux qui ont été arrêtés n'y étaient. J'étais à la fac avec certains d'entre eux, et les autres sont arrivés tard à la fac. Ils nous ont fait sortir un par un, au milieu d'une haie de CRS. Ils ont pris toutes identités. Les vigiles du supermarché étaient semble-t-il derrière une voiture, un peu plus loin. C'est eux qui nous ont désigné. POur moi, un enseignant a entendu un des vigiles dire: "la fille, là" (Samuel a les traits fin, des cheveux un peu long, NDLR). C'était dehors, il faisait nuit, c'était tout noir. Je ne vois pas comment ils pouvaient reconnaître quelqu'un. On m'a conduit dans un fourgon, il y avait déjà un étudiant, qui avait été arrêté avant l'intervention. Il était sorti en portant le fauteuil d'une étudiante qui est handicapée.
D'abord on a été à l'hôtel de police où ils nous ont mis dans une cellule tous ensemble pour les premières heures. Ensuite on a été séparés et ils nous ont conduits dans des commissariat différent. J'étais le seul étudiant dans le mien. Je ne sais pas où c'était comme il faisait nuit. J'y suis resté la nuit. Il y avait un type avec moi dans la cellule. Il avait une lèvre en sang et des bleus sur le visage.
Au petit matin, on s'est de nouveau retrouvés tous ensemble. Peut-être à l'hôtel de police, il faisait encore nuit. Les auditions ont commencé. A la première, j'étais avec un policier qui voulait me faire avouer que j'avais volé dans le magasin. Il voulait savoir aussi qui y était et qui avait eu l'idée. Comme je n'étais au courant de rien de toute façon, ce n'était pas dur. Après, il m'a dit qu'ils allaient prendre mon ADN. Je n'ai pas voulu mais ils m'ont dit que c'était obligatoire, que c'était illégal de refuser et qu'on écoperait de peines si on ne donnait notre salive. J'ai accepté.
Après, on a tous été remis ensemble pour une photo avec un panneau autour du cou sur lequel il y avait notre nom et un numéro. Puis on est passés devant un vitre sans tain. Les policiers m'ont dit après qu'il y avait les gens de Leader Price derrière. Il n'y avait que nous treize devant la vitre, personne d'autre. Après, ils m'ont amené dans une autre pièce pour des photos individuelles.
Ensuite, ils ont pris mes empreintes judiciaires puis il y a eu la deuxième audition. Le même policier m'a dit que j'avais été reconnu par le gérant parce que j'avais consommé des gâteaux dans le rayon. C'était confus, assez bizarre. Puis il s'est mis à me parler du mouvement, d'où venaient les idées, qui décidait, qui étaient les leaders. Il m'a donné une liste de noms et m'a demandé s'il y en avait que je connaissais des gens dedans. Il y avait plusieurs feuilles aggrafées ensemble. Des dizaines et des dizaines de noms, plus d'une centaine je pense. Les noms que je connaissais étaient ceux d'étudiants mobilisés, sans plus.
J'avais déjà vu un avocat commis d'office la première nuit. J'en ai vu un autre la deuxième. Là, j'ai eu une visite médicale aussi. Je suis encore resté dans une cellule toute la matinée de vendredi, tout seul. Vers 11h, un policier est venu me voir. Il m'a dit que j'étais libre, que je n'étais pas poursuivi, que j'étais libre. Il m'a dit aussi que j'étais le seul. A la deuxième audition, je pense qu'ils avaient compris que je n'y étais pour rien, que ça ne tenait la route. Ils étaient incapable de me dire clairement ce que j'avais fait. C'est à partir de là qu'ils ont orienté les questions sur le mouvement."
Recueilli par Ol.B.
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