16/01/2008

Sarkozy en béni oui oui de Bush, des soldats français dans le golfe persique

Partager
C’est la grande surprise du très court voyage de Nicolas Sarkozy aux Emirats arabes unis : l’annonce de la création d’une «base interarmées» (air, terre, mer) française sur les rivages du Golfe, juste en face de l’Iran. «L’accord de présence des forces françaises» a été signé hier, à Abou Dhabi, par Hervé Morin, le ministre français de la Défense, et son homologue émirien.
Sarkozy pose une base dans le Golfe
Diplomatie. L’installation de 2 800 soldats français, d’ici à 2009, avive les tensions avec l’Iran.

Envoyé spécial à Abou Dhabi JEAN-PIERRE PERRIN
LIBERATION QUOTIDIEN : mercredi 16 janvier 2008

400 à 500 hommes seront donc déployés de façon permanente - «prépositionnés», dans le jargon militaire -, certains en provenance de Djibouti, où l’armée française compte une base de 2 800 hommes. La nouvelle installation, qui devrait être opérationnelle courant 2009, sera entièrement située sur le territoire d’Abou Dhabi, l’un des sept émirats composant la fédération, où la France dispose de facilités militaires depuis les accords de défense et de partenariat stratégique conclus en 1994-1995.

Hantise. Pour la France, cette base est la clé de nouveaux contrats de ventes d’armes aux Emirats. Paris prend soin de préciser que ce renforcement militaire répond à une récente demande des dirigeants émiriens. «Ils ont besoin de se rassurer», indique une source diplomatique. Contre qui ? Le régime islamique de Téhéran, évidemment. Lorsqu’ils s’expriment en privé, les dirigeants des Emirats, en particulier ceux d’Abou Dhabi, ne cachent pas leurs craintes et leur hostilité à l’égard de Téhéran. Ils savent que leur armée, malgré l’excellence de ses armements - souvent français -, ne fera pas le poids en cas d’affrontement avec les forces iraniennes. Cette hantise n’est pas nouvelle. Elle date de l’époque du Chah que les Américains avaient sacré «gendarme du Golfe». Et s’est manifestée lorsque l’Iran s’est emparé par la force de trois îlots contestés - Abou Moussa, Petite Tomb et Grande Tomb - dans les années 70. Elle s’est renforcée avec l’arrivée au pouvoir de Mahmoud Ahmadinejad, homme des Gardiens de la révolution, dont les vedettes rapides croisent sans cesse les eaux du Golfe, et champion autoconsacré du monde musulman, pays arabes inclus.

Lorsque Paris et Abou Dhabi ont conclu ces accords de défense, la menace n’était pas aussi précise. Les Emirats craignaient plus l’Irak de Saddam Hussein, en particulier après l’invasion du Koweït, que l’Iran islamiste. La France a d’ailleurs signé d’autres accords de défense avec le Qatar et le Koweït. Mais, souligne une source diplomatique, celui paraphé avec les Emirats engage beaucoup plus Paris que les deux autres, liant les deux armées en cas d’attaque du territoire émirien.

«Hostile». Or, depuis, l’invasion américaine de l’ancienne Mésopotamie, Bagdad n’apparaît plus comme la principale menace ; l’Iran prenant sa place. Bien sûr, Paris a pris bien soin, hier, d’annoncer que cette nouvelle base française ne sera en rien dirigée contre Téhéran. Mais alors à quoi servirait-elle ? En tout cas, il est peu probable que cette affirmation convainc le régime islamique, où l’on déplore depuis plusieurs mois l’attitude «hostile» du président Sarkozy et où on a déjà fait savoir que les entreprises françaises voulant travailler en Iran allaient devoir assumer les conséquences de cette attitude.

Plusieurs questions aussi se posent : cette nouvelle donne militaire va-t-elle engager Paris sur la question des trois îles disputées, notamment si le dossier aboutit sur la table d’une instance internationale ? Et, surtout, que se passera-t-il si un conflit intervient entre Washington et Téhéran, transformant le Golfe en une zone de chaos ? Selon des sources diplomatiques, l’actuelle visite de George Bush dans le Golfe, au-delà des contrats d’armements signés avec l’Arabie Saoudite (136 milliards d’euros), vise à fortifier un front anti-iranien. Avec, en toile de fond, la possibilité d’une intervention militaire contre Téhéran.



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire