issu de notre Dossier " En reponse au SarkoShow du 24/04 "
issu du rapport de la Plate forme Française pour les Droits Économiques Sociaux et Culturels
Morceaux choisis :
L’ACCES DES MIGRANTS AUX DROITS ECONOMIQUES ET SOCIAUX
La précarisation croissante du droit au séjour consécutive aux réformes intervenues depuis 1993, mais plus encore depuis 2003, engendre des atteintes croissantes aux droits fondamentaux des migrants
L’ACCES DES MIGRANTS AUX DROITS ECONOMIQUES ET SOCIAUX
171.- Bien que la situation des migrants ne soit pas directement évoquée par le Pacte non plus que par les deuxième et troisième rapports périodiques de la France, les associations et syndicats estiment nécessaire de faire un inventaire des atteintes portées aux droits économiques et sociaux des migrants qui résultent de façon spécifique de la précarisation de leur situation au regard du séjour et de l’insécurité qui l’accompagne. Ce phénomène touche aussi les demandeurs d’asile et les réfugiés. En effet, depuis les années 1990, l’asile est considéré comme une voie d’entrée des étrangers en France qu’il convient de contrôler : la gestion des flux migratoires a ainsi pris le pas sur le devoir de protection de la France. D’où la chute des taux de reconnaissance du statut de réfugié, d’une part, des restrictions aux droits des demandeurs d’asile pour réduire la supposée attractivité de la France, de l’autre.
La précarisation généralisée du droit au séjour
172.- La précarisation croissante du droit au séjour consécutive aux réformes intervenues depuis 1993, mais plus encore depuis 2003, engendre des atteintes croissantes aux droits fondamentaux des migrants, notamment parce que la jouissance des droits économiques et sociaux est souvent subordonnée à la détention d’un titre de séjour.
173.- Même lorsque ce n’est pas le cas - certaines prestations comme l’accès aux centres d’hébergement ou à l’aide médicale ne sont pas subordonnées à une condition de régularité du séjour- les étrangers en situation irrégulière ont du mal à faire valoir leurs droits, soit parce qu’ils se heurtent aux pratiques illégales de l’administration, soit parce qu’ils hésitent à s’adresser aux services publics, par crainte d’être dénoncés à la police et reconduits à la frontière.
174.- Les étrangers en situation irrégulière sont désormais victimes de méthodes administratives et policières particulièrement contestables et incluant le recours à des subterfuges : interpellations à la sortie des écoles ou au domicile ou encore convocations à la préfecture pour "examen de la situation", suivies du placement en rétention en vue d’un éloignement.
175.- La précarisation concerne d’abord le séjour fondé sur les liens familiaux. Les premiers visés sont les conjoints de Français. Un contrôle de plus en plus étroit pèse sur les mariages "mixtes", toujours soupçonnés d’être des mariages de complaisance : il en résulte une atteinte à la liberté du mariage, dès lors que l’étranger qui veut épouser un Français sans être titulaire d’un titre de séjour court un risque non négligeable d’être reconduit à la frontière avant même d’avoir pu se marier.
176.- Pour obtenir un titre de séjour, les conjoints de Français doivent, depuis 2006, produire un visa de long séjour, ce qui implique, dans un grand nombre de cas, de retourner dans leur pays pour solliciter ce visa. L’obtention du visa est de plus subordonnée depuis l’entrée en vigueur de la loi du 20 novembre 2007 à un test de connaissance de la langue française et des valeurs de la République.
177.- La précarisation n’épargne pas les ressortissants des États nouvellement entrés dans l’Union européenne, et plus particulièrement les Roms de Bulgarie et de Roumanie, victimes de pratiques arbitraires. En effet, le droit à un séjour inférieur à trois mois leur est refusé et les renvois massifs de Rroms vers ces deux pays se sont multipliés depuis août 2007, sans aucun examen de la situation personnelle.
178.- La dernière loi en date, déjà citée, impose par ailleurs aux parents dont les enfants sont entrés par regroupement familial, la signature d’un contrat d’accueil et d’intégration pour la famille, par lequel ils s’engagent à suivre une formation sur les droits et les devoirs des parents en France et à respecter l’obligation scolaire. En cas de non respect de ce contrat, ils risquent de voir suspendu le versement des allocations familiales.
179.- Les possibilités de régularisation sur le fondement des liens personnels et familiaux créés en France, en dehors de l’hypothèse du mariage, ont elles aussi été restreintes : la réforme la plus symptomatique à cet égard est la suppression de la régularisation de plein droit après dix années de séjour habituel en France.
180.- Dans le même sens, l’accès de plein droit à la carte de résident, seul titre de séjour à donner de réelles garanties de stabilité puisqu’il a une durée de dix ans et qu’il est renouvelable de plein droit, qui concernait à l’origine tous les étrangers ayant des attaches en France, n’est plus que résiduel.
181.- Pour obtenir cette carte, il faut notamment donner des gages de son "intégration républicaine dans la société française", appréciée en particulier au regard de son engagement personnel à respecter les principes qui régissent la République française, du respect effectif de ces principes et de sa connaissance suffisante de la langue française. La loi est muette sur les éléments concrets qui doivent fonder l’appréciation du préfet.
182.- Le séjour fondé sur le travail se trouve lui aussi précarisé. Le gouvernement a décidé de procéder à "une ouverture encadrée" de l’immigration de travail, indexée sur les besoins de du marché de l’emploi français. Ceci a pour conséquence une plus grande précarité du titre de séjour, comme en témoigne notamment la généralisation de la carte portant la mention "travailleur temporaire" dont la durée est calquée sur celle du contrat de travail, sans garantie d’en obtenir le renouvellement. De plus les hypothèses dans lesquelles l’administration peut procéder au retrait de la carte de séjour en cours de validité ont été multipliées.
183.- Rappelons enfin que la France refuse de ratifier la Convention internationale pour les droits aux migrants et de leur famille
Les problèmes spécifiques des demandeurs d’asile et des réfugiés
La situation précaire des demandeurs d’asile
184.- Les conditions dans lesquelles une personne énonce sa demande d’asile représentent un facteur déterminant pour l’examen loyal et objectif de son dossier et la décision qui en résultera. Si les conditions d’accueil des demandeurs d’asile se sont dans l’ensemble améliorées, le nombre de places en centre d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) ayant doublé entre 2002 et 2007, tous les demandeurs d’asile qui le souhaitent ne peuvent y être accueillis. Les demandeurs d’asile se reportent donc sur les solutions d’hébergement d’urgence, inappropriées à leur situation. Les demandeurs d’asile qui ne sont pas hébergés dans un CADA peuvent percevoir l’allocation temporaire d’attente (ATA) pendant l’instruction de leur demande, mais son montant est insuffisant pour leur permettre de vivre dignement pendant la procédure et elle n’est versée qu’après l’enregistrement de la demande par l’OFPRA et non dès la présentation en préfecture.
185.- En outre, près du tiers des demandeurs d’asile sont exclus de l’accès aux CADA et à l’ATA parce que leur demande est traitée selon la procédure dite "prioritaire" et qu’ils n’obtiennent pas l’autorisation provisoire de séjour à laquelle cet accès est subordonné.
186.- Depuis 1991, les demandeurs d’asile n’obtiennent plus d’autorisation provisoire de travail. Or l’exercice d’un travail, outre qu’il permet de subvenir à ses besoins, facilite l’insertion dans la société d’accueil et permet aux demandeurs d’asile d’acquérir des compétences qui leur seront utiles même si leur demande est finalement rejetée.
L’insertion difficile des réfugiés
187.- L’insertion professionnelle des réfugiés rencontre de nombreux obstacles. Tout d’abord, la faible maîtrise du français constitue un obstacle majeur à l’accès à l’emploi. L’offre linguistique proposée s’avère insuffisante. Les réfugiés souffrent également d’une faible reconnaissance des diplômes et de l’expérience professionnelle acquis dans le pays d’origine. L’exil forcé constitue, par ailleurs, une rupture professionnelle souvent accentuée par l’impossibilité de travailler pendant la procédure d’asile. S’y ajoutent les pratiques discriminatoires et l’impossibilité, pour eux comme pour l’ensemble des étrangers, d’accéder aux professions réglementées et aux emplois fermés.
La prise en charge insuffisante des traumatismes
188.- Les demandeurs d’asile et les réfugiés se distinguent des autres migrants par la prédominance de problèmes psychologiques et psychiatriques découlant des persécutions subies et de l’exil forcé. Or, leur santé mentale n’est pas toujours convenablement traitée : les places dans les centres médico-psychologiques sont limitées et peu de psychiatres ou de psychologues connaissent ce public spécifique et très différent culturellement de leurs patients habituels. Enfin, certains psychiatres refusent de travailler avec un interprète. Les moyens manquent en particulier pour les centres médicaux spécialisés dans la prise en charge médicale des migrants et des victimes de tortures.
La protection amoindrie des bénéficiaires de la protection subsidiaire
189.- Alors que les réfugiés se voient remettre une carte de résident de dix ans, les bénéficiaires de la protection subsidiaire n’ont accès qu’à une carte de séjour temporaire d’un an.
190.- Outre une plus grande précarité du séjour, il en résulte des conséquences sur l’accès à certains droits sociaux et notamment au revenu minimum d’insertion (RMI) dont le bénéfice est subordonné à une condition de résidence de cinq ans, sauf pour les réfugiés statutaires.
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