27/09/2008

Dialogue au centre de rétention administratif de Saint-Jacques (Rennes)

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Opération parloir sauvage, hier, au centre de rétention administratif de Saint-Jacques. Dialogue à travers les grilles entre Rennais et retenus.

(Source : Ouest-France)








Dans le jargon militant, ils appellent ça un « parloir sauvage ». « Ça consiste à s'approcher au plus près des grilles du centre de rétention administratif et d'engager la conversation avec les personnes retenues à l'intérieur », explique Carole Bohanne, du réseau Education sans frontières. Opération qu'une vingtaine de personnes a menée hier, vers 17 h 30 et durant une heure et demie au centre de rétention administratif de Saint-Jacques, près de l'aéroport.

« Des images de plus de 50 ans »

Des membres d'associations mais aussi des Rennais à l'image de Boris, la cinquantaine. « Bien sûr que j'avais entendu parler de ce centre. Mais s'y rendre physiquement et le voir. C'est effrayant. » Entre lui et les personnes en rétention, trois rangées de hautes grilles blanches dont la plus extérieure surmontée de barbelés. « Je sais que ça va peut-être choquer de dire ça mais ça me fait tout même penser à des images de plus de 50 ans alors que l'on est à Rennes au XXIe siècle. »

En face de lui, des « sans-papiers ». Des Maliens, des Sri-Lankais, un Égyptien. Interpellés par la police à Rennes, à Angers, à Poitiers ou au Mans. Les mains accrochées aux grilles, la conversation s'entame des deux bords. Carole Bohanne, carnet et crayon en main, prend des notes, prodigue des conseils, rassure. D'abord une présence et aussi de la parole.

« Je suis indignée »

Et il y a cette Malienne avec ses deux enfants. L'un âgé de 11 mois, l'autre de 2 ans et demi. Elle a été amenée au centre jeudi. « Je suis indignée de voir des enfants derrière ces barreaux », confie Marie-Anne Chapdelaine, maire adjointe à l'égalité des droits et à la laïcité. « Ce n'est pas leur place et encore moins dans un pays qui s'apprête à fêter le 60e anniversaire de la déclaration universelle des Droits de l'homme. » Elle attend de passer devant le tribunal qui statuera sur son sort.

« A tourner en rond »

Étrangère dans ce pays, étrangère des procédures, étrangère de cet environnement grillagé. « Ne vous inquiétez pas. On sera là avec vous à l'audience. On ne vous laisse pas tomber », lui crie un membre du réseau Education sans frontière. « Actuellement, il y a trois enfants de moins de 3 ans dans le centre. Ça se banalise », déplore Carole Bohanne.

À l'extérieur Hawa pleure. Elle est venue avec sa petite fille voir son mari. Ils se parlent à travers les grilles. « Je ne peux pas rentrer aujourd'hui. Ils me disent qu'il y a trop de visites. » La petite fille tend la main vers son père et lui, la rassure. « Je viens tous les jours le voir mais c'est dur. » Il a été interpellé à la préfecture de Rennes alors qu'il demandait à régulariser sa situation. « Il travaille pourtant dur dans une entreprise près de Rennes. » Affirmation confirmée par le réseau. Et il y a Adel. Lui vient d'Égypte et ça fait trois semaines qu'il est au centre. « A tourner en rond. On n'a pas le droit aux livres... » Désespéré. Sans illusions. « Merci à vous d'être venu nous voir. Ça nous fait du bien. Merci encore. Ne nous oubliez pas. »

Samuel NOHRA.
Ouest-France




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