25/06/2011

Mensonge d'Etat, l'INSEE dit non !

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.Politiques 24/06/2011 à 00h00
Déclaration des syndicats de l'INSEE au sujet de l'affaire Guéant

Les syndicats de l’Insee souhaitent que leur direction corrige Guéant

DESINTOX
LIBERATION
L'intersyndicale de l'institut statistique a exigé mardi dans une déclaration que soit rectifiée l'interprétation mensongère du ministre de l'Intérieur d'une étude de l'INSEE consacrée aux résultats scolaires des enfants d'immigrés.


Par CÉDRIC MATHIOT


Un ministre peut-il désinformer les Français en travestissant une étude de l’Insee, sans que l’institut de la statistique ne trouve rien à y redire ? «Non», viennent de répondre les syndicats de l’Insee, qui ont demandé mardi à la direction de l’organisme de corriger publiquement Claude Guéant, dans une déclaration dont Libération a eu connaissance .

Déclaration des syndicats de l'INSEE au sujet de l'affaire Guéant


Le 22 mai, le ministre de l’Intérieur déclare que deux tiers des enfants qui sortent du système scolaire sans qualification sont des fils ou des filles d’immigrés. S’ensuit une polémique d’où il ressort vite que les chiffres de Guéant, qu’il prétend issus d’une étude de l’Insee, sont fantaisistes. Si le rapport indique bien que les enfants d’immigrés ont deux fois plus de risques de sortir sans qualification du système scolaire que les autres, elle ne permet pas d’affirmer que deux tiers des sortants sans qualification sont des enfants d’immigrés. En se rapportant à la composition du panel de l’étude (où les enfants d’immigrés représentaient 10% des élèves enquêtés), il est aisé de calculer que cette part est de 16,5%. Très loin des deux tiers.

Railleries. Libération a consacré au sujet trois articles dans la rubrique Désintox. Sans que Guéant n’admette son erreur. Ce feuilleton a suscité moult railleries à l’endroit du ministre, mais pour les syndicats, il entache surtout l’image de l’Insee. Dans leur déclaration lors du comité technique paritaire, mardi, en présence du directeur général de l’institut, Jean-Philippe Cotis, les représentants du personnel ont dénoncé le silence de la direction qui a laissé le ministre de l’Intérieur déformer des travaux de l’Insee sur un sujet sensible. Pour l’intersyndicale, l’affaire, «extrêmement grave», pose donc la question de l’indépendance de l’institut, rattaché à Bercy, mais aussi de sa réputation. Entre les syndicats de l'Insee et le pouvoir politique, les tensions ne sont pas rares. Elles portent souvent sur des embargos que le gouvernement s’autorise volontiers à violer quand les chiffres publiés (chômage, croissance…) sont bons. Cette question sera d’ailleurs abordée la semaine prochaine lors de la réunion du bureau du Conseil national de l’information statistique.

«Silence». Mais l’affaire Guéant est jugée d’une toute autre gravité. «Qu’un ministre du gouvernement fasse une erreur aussi grossière sur une de nos publications, et surtout qu’il se permette de la répéter de manière aussi insistante, c’est nouveau», estime Marie-Josée Defrance, secrétaire générale de FO Insee. De fait, ce qui frappe dans cet épisode, c’est l’absence de scrupules de Guéant et son entêtement à faire mentir les statistiques. L’erreur initiale du ministre aurait pourtant pu être rectifiée très vite. Le propre cabinet de l’ex-secrétaire général de l’Elysée, très tôt après le déclenchement de la polémique, a d’ailleurs essayé d’exonérer le ministre en expliquant qu’il s’était appuyé sur l’interprétation de l’étude par Malika Sorel, essayiste et membre du Haut Conseil à l’intégration (HCI). Dans le JDD du 28 mai, le ministre de l’Education, Luc Chatel, avait adopté la même stratégie pour défendre son collègue : «Claude Guéant fait référence à des analyses de l’Insee de 2005 citées par des membres du HCI.»

Mais Guéant, dans une étonnante fuite en avant, s’enferre. Le 27 mai dans un premier droit de réponse à Libération, puis dans un second courrier acheminé au siège du quotidien le 9 juin par deux motards de la police, le ministre a maintenu ses chiffres, en prétendant à nouveau s’appuyer sur une lecture correcte de l’étude de l’Insee. Pour les syndicats, l’institut aurait dû dire d’emblée que l’interprétation du ministre était fausse. Ce qui aurait (peut-on espérer) amené Guéant à se taire. Au lieu de quoi, c’est l’Insee qui s’est tu. A Libération, le service de presse, embarrassé, a répondu que l’institut «n’avait pas vocation à intervenir dans ce débat». Et il a été impossible de rentrer en contact avec le responsable de l’étude, comme cela est pourtant possible sur d’autres sujets.

Une position intenable pour l’intersyndicale : «L’Insee n’a pas vocation à corriger toutes les mauvaises interprétations des données qu’elle publie, qu’elles soient de bonne ou de mauvaise foi. Mais lorsqu’une affaire prend une telle importance, les agents […] attendent une communication.» Et de s’interroger : «Ce silence de la direction doit-il être interprété comme une complicité avec le gouvernement, ruinant la crédibilité de l’institut face aux citoyens ?» Lors de la rencontre avec la direction, les représentants du personnel ont également fait état du malaise provoqué en interne, évoquant «des remontées très fortement négatives» d’agents des directions régionales, de retraités de l’Insee «scandalisés» et même du Groupe des écoles nationales d’économie et statistique (GENES). Mais l'intersyndicale craint aussi que l'épisode ne laisse des traces vis à vis de l'opinion, estimant que l'affaire «détruit le travail des enquêteurs pour inciter à répondre aux enquêtes : à quoi bon répondre puisque ensuite, un ministre de l'Etat peut affirmer des contre-vérités en prétendant se fonder sur le résultat de l'enquête?»

Les syndicats demandent donc à la direction de l’institut de «prendre position publiquement».«Elle ne peut plus rester murée dans son silence. Elle doit adopter une ligne de conduite, car les périodes pré-électorales risquent de multiplier ce type d’interventions inopinées de nos gouvernants».



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