14/02/2014

JO de Poutine Dossier Noir..

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Les Jeux olympiques d'hiver, organisés à Sotchi dans quelques jours sont les plus chers de l'histoire. Le documentaire « Les Jeux de Poutine » décrit leur préparation, sur fond de corruption et de mégalomanie. Cette co-production germano-israelo-autrichienne a été diffusée le 6 décembre au festival international de cinéma documentaire de création « Artdocfest » à Moscou, devant une salle comble et particulièrement réactive aux témoignages parfois tragi-comiques. « C'est la ville du repos et de la corruption », a ironisé après la projection l'opposant Boris Nemtsov, ancien candidat à la mairie de Sotchi. Interview de l'une des productrices, Simone Baumann.



Novethic. Connu pour ses documentaires sur les oligarques, le réalisateur Alexander Gentelev a grandi à Sotchi. Il a commencé à tourner ce film sur la préparation des JO en 2011, après deux ans de recherches. Vous avez visionné toutes les interviews avec des habitants, des entrepreneurs, des ouvriers, des fonctionnaires, des opposants... A ce terme, quel est votre regard sur les Jeux ?
Simone Baumann. Ce qui frappe d’abord, c’est le choix de cet endroit. Sotchi est associé à la mer, au soleil. La région ne disposait d’aucune station de ski avant les années 1990. Depuis, on a construit la station de Krasnaya Poliana, mais elle est toute petite. Rien ne prédisposait la ville à accueillir des sports d’hiver, contrairement à sa concurrente Salzbourg. Pour la région, l’obtention des Jeux signifie donc la reconstruction mais aussi des dégâts écologiques majeurs, les expropriations sans compensation, sur les lieux des infrastructures olympiques et sur des terrains à 50 km de là… Et puis la corruption. Les travaux ont coûté beaucoup plus cher que prévu. Poutine avait annoncé 11 milliards de dollars en 2007, il les estime désormais à 50 milliards de dollars. Nous avons interviewé Valery Morozov, un entrepreneur russe, magnat du secteur de la construction, réfugié à Londres. Il raconte comment l’administration a fait monter les enchères au fur et à mesure, les pots-de-vin passant de 15 à 50 % du coût de ses chantiers ! Le gouverneur, les autorités locales, les corps fédéraux, etc., tous voulaient prendre leur part du gâteau !
Ces problèmes, en particulier la corruption, sont des sujets forcément délicats. Comment ont réagi les entreprises et autorités russes ?
Toutes les entreprises et les oligarques chargés de la construction des infrastructures olympiques nous ont donné la permission de filmer leurs chantiers, sauf Gazprom (qui fournit notamment le complexe de ski de fond et de biathlon et du village olympique de montagne, ndlr). Quant aux officiels et fonctionnaires, la plupart n’ont pas voulu répondre à nos demandes d’interview. Nous avons couru après le maire pendant un an avant d’obtenir un long entretien avec lui, mais ses déclarations étaient en général en contradiction avec celles des autres interviewés. Il y a une nervosité des autorités autour du film que je ne comprends pas bien. Signe de cette tension, il y a quelques mois, j’ai reçu une étrange proposition d’inconnus: une somme correspondant à deux fois le budget du film, soit 600 000 euros, pour le retirer de la programmation prévue au Festival international du film documentaire d’Amsterdam, le 24 novembre. J’ai refusé.
Vous avez déjà travaillé sur le comité international olympique pour un documentaire d’Albert Knechtel, « Olympia Poker » (). Sorti en 2011, il révèle l’envers du décor, loin de « l’esprit olympique », dans le processus de sélection des villes, en prenant pour exemple celui des JO 2018. Que pensez-vous du rôle et de la posture de neutralité du CIO ?
Le CIO a refusé que nous utilisions les archives olympiques, dont il détient les droits, ainsi que le mot « Olympique » dans le titre du documentaire, arguant que le film était politique. Or, nous avons simplement montré la réalité, d’un point de vue étranger et non russe, en tentant de rester le plus objectif possible. Je pense qu’il est nécessaire de surveiller la manière dont travaille cette organisation, qui manque de transparence. Pour moi, c’est une machine à faire de l’argent. Poutine voulait les Jeux, il était prêt à faire n’importe quoi pour les avoir, quel que soit le budget. Ce n’est pas le problème de la Russie en particulier : le CIO accepterait n’importe quelles conditions politiques pour obtenir des JO répondant à ses exigences. Il ne s’intéresse pas à l’opinion des gens qui vivent sur place.
Le film « Les Jeux de Poutine » sera diffusé sur Arte le 28 janvier 2014.
Propos recueillis par Jeanne Cavelier, à Moscou
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Après le sport et la culture, le développement durable est le troisième pilier (1) de l'olympisme, depuis 1996. Les sponsors et partenaires, triés sur le volet, sont censés refléter cette éthique. Mais ce critère ne pèse pas lourd face aux millions versés pour financer les Jeux.

100 millions de dollars. C’est le prix moyen que sont engagées à débourser dix multinationales - Coca-Cola, AtoS, Dow Chemical, General Electric, McDonald’s, OMEGA, Panasonic, Procter & Gamble, Samsung et Visa- qui sponsorisent le cycle des JO 2013-2016.« Le CIO s’associe uniquement avec des entreprises et organisations qui, à son sens, travaillent dans le respect des valeurs que défend le Mouvement olympique, telles qu'énoncées dans la Charte olympique », assure le service de presse du Comité olympique. Il précise que ces partenaires mondiaux (TOP) « sont tous attachés aux principes de durabilité ». Mais quand on l’interroge sur d’éventuels critères RSE (responsabilité sociale et sociétale des entreprises) dans leur sélection, la question est soigneusement évitée.
COMMENT LES JO FAVORISENT LE MONOPOLE DE MEGAFON
En 2009, le Comité d’organisation de Sotchi décrochait « le plus important contrat jamais signé dans toute l’histoire du Mouvement olympique » : les opérateurs de téléphonie mobile MegaFon et de téléphonie fixe et Internet Rostelecom ont déboursé 260 millions de dollars pour devenir partenaires officiels. Ils se sont également engagés à investir 200 millions de dollars dans le développement des infrastructures de la région de Krasnodar, où se trouve Sotchi, et à fournir du matériel pendant les Jeux. Depuis 2012, ils bénéficient d’un moratoire en leur faveur sur la construction des réseaux de télécommunications et l’attribution des fréquences dans toute la région jusqu’en décembre 2016. Considérant cette restriction « injuste », MTS, l’opérateur leader dans cette zone, a envoyé l’été dernier une lettre au ministère des Communications pour en réduire la durée, jusqu’à la fin 2014 et a porté plainte auprès de la Commission d’Etat pour l’attribution des fréquences. En vain. Plusieurs autres concurrents de MegaFon se sont également plaints des difficultés à placer des stations de base à Sotchi avant même l’entrée en vigueur du moratoire. Sans plus de succès. Fin décembre, MegaFon annonçait que les abonnés d’autres opérateurs pouvaient choisir manuellement le réseau MegaFon pour se connecter à la 3G dans les installations olympiques pendant les JO, en vertu d’accords d’itinérance… L’an dernier, MegaFon, 4e entreprise de télécommunications en Russie (classement CNews Analytics 2013), est devenu le 2e opérateur de téléphonie mobile à Sotchi en termes de nombre d’abonnés et de chiffre d’affaires.
Le programme marketing, le plus fructueux de l’histoire des JO d’Hiver, a rapporté au total plus de 1,3 milliard de dollars. Les contrats varient entre 110 et 180 millions de dollars pour les partenaires officiels, selon les estimations des médias russes. Car outre les « Top sponsors », huit sociétés sont « partenaires généraux » des JO de Sotchi, plus trois « partenaires officiels », onze « fournisseurs officiels » et dix-huit « fournisseurs ». Pour intégrer ce petit cercle trié sur le volet, leurs dirigeants ont présenté leur offre devant une commission d’évaluation, composée de représentants des Comités olympique et paralympique russe et du Comité d’organisation de Sotchi 2014. Comment sont-ils sélectionnés ? Le CIO de Sotchi 2014 évoque une décision fondée sur « la proposition commerciale, la connaissance du marché local, la volonté de coopérer avec le comité d’organisation, les garanties des obligations, l’expérience de projets similaires », avant d’ajouter « l’histoire et la réputation de l’entreprise, tout comme son engagement envers les valeurs olympiques ».
Prix de la durabilité... surprenants
En mars 2013, le Comité d’organisation de Sotchi a décerné à ses partenaires des Prix de la durabilité. Parmi les initiatives valorisées: le combiné route-rail par la compagnie de chemin de fer russe RZD, une construction pourtant extrêmement critiquée par les associations environnementales. Les autres récompenses ont distingué les « leçons de gentillesse » (sic) envers les personnes handicapées prodiguées aux écoliers, des mesures pour accroître la fiabilité de l’atterrissage des avions lors de conditions météorologiques complexes… Mais quand nous avons cherché à joindre ces entreprises, et notamment le principal sponsor, la compagnie pétrolière publique Rosneft, qui a reçu un prix pour l’organisation d’un festival et publie des rapports de durabilité (le dernier date de 2010), aucune n’a souhaité répondre à nos questions...
Chez les partenaires internationaux par contre, les plus environnementaux sont mis en avant. La société de services informatiques française Atos Origin explique par exemple contribuer à réduire l’empreinte carbone sur l’environnement en mettant en place des technologies modernes. « En utilisant les technologies de virtualisation, Atos a réduit le nombre de serveurs de 40 % comparés à Vancouver » (JO d’Hiver 2010), estime Patrick Adiba, directeur exécutif en charge des Jeux Olympiques et des Grands événements. Coca-Cola a installé 1000 réfrigérateurs éco-friendly sur les sites olympiques. Jeff Mochal, directeur de la communication externe de McDonald’s, évoque quant à lui « le recyclage de plus de 50 % des huiles de cuisson en biocarburantla construction des restaurants avec des technologies d’économies d’énergiele compactage des déchets pour diminuer le volume dans les décharges ».
Silence face aux abus
En revanche, les sponsors qui ne seraient pas particulièrement exemplaires en matière de RSE  ne sont guère rappelés à l’ordre par le CIO. Le fabricant de produits chimiques Dow Chemical, par exemple, est félicité par le comité olympique de Sotchi pour ses solutions qui permettront « de réduire les émissions de gaz à effet de serre équivalent à l’empreinte carbone d’1,5 milliard de km en voiture ». L’entreprise fait pourtant l’objet de poursuites pour l’accident industriel de Bhopal en Inde, qui a fait 25 000 morts en 1984. Et son statut de sponsor des JO avait déjà largement été dénoncé par les victimes de la catastrophe en 2012, lors des jeux de Londres.
De même, le CIO et ses partenaires restent silencieux devant les abus constatés à Sotchi, en matière de corruption, de conditions de travail et de droits des homosexuels notamment. Jusque-là, ils se sont bornés à affirmer avoir reçu « l’assurance ferme du gouvernement russe que chacun serait le bienvenu aux Jeux à Sotchi, indépendamment de son orientation sexuelle », sans exhorter publiquement l’Etat à observer la Charte ni répondre sur les autres problèmes. Ni les lettres des associations, comme Human Rights Watch, ou de grands investisseurs financiers new-yorkais pesant 327 milliards de dollars d’actifs, ni les pétitions de plus de 400 000 personnes ne les ont fait réagir davantage.
Le pouvoir marketing des anneaux l’emporte encore sur l’influence de ces acteurs. Au-delà des contrats signés avec les organisateurs, les sponsors investissent massivement dans cette vitrine unique au monde, regardée par des milliards de consommateurs potentiels. Lors des précédents JO à Londres en 2012, leur image s’est améliorée de 25 à 50 %, selon une étude menée par Havas Sports & Entertainment en Grande-Bretagne. Le groupe américain Procter & Gamble (Duracell, Gillette…) a estimé par exemple à 500 millions de dollars ses ventes additionnelles en 2012 grâce à son sponsoring.

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