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La meilleure défense, c'est l'attaque. La direction de Monoprix va porter plainte contre les militants ayant pratiqué une autoréduction dans deux de ses magasins.
Un pari juridique, car personne n'a empêché le collectif "Les empêcheurs d'encaisser en rond" d'emporter treize chariots chargés de nourriture, sans payer.
La porte-parole de Monoprix insiste:
"Tous les salariés ont été choqués par ce moment de violence, du directeur du magasin aux hôtesses de caisses, ils ont tous essayé de faire en sorte que ça soit le moins violent possible, pour régler cela dans la négociation et le calme."
Vendredi matin, le groupe de distribution a donc décidé de porter plainte contre X pour "vol avec violences et insultes", suite à l'opération menée mercredi après-midi dans le magasin de la rue du Faubourg-Saint-Antoine.
A 16 heures, une cinquantaine de militants -45 selon Monoprix- investit les lieux puis bloque les caisses après avoir rempli des chariots de nourriture (y compris du saumon et du foie gras). Ils exigent et obtiennent, après une heure de négociation, de repartir sans payer.
La qualification de "vol" peut-elle être retenue? Pas sûr...
C'est un paradoxe détaillé aux étudiants de première année de droit: le délit de vol doit forcément se réaliser par une "soustraction frauduleuse". "En clair, confirme l'avocat blogueur maître Eolas, s'il y a remise de la marchandise, il n'y a pas de vol." Dans le cas présent, les marchandises ont bien été "remises" aux militants par la direction. Sous l'oeil de la police, comme l'a relaté Charlotte Rouault, témoin de la scène.
"La police n'est pas intervenue pour éviter qu'il n'y ait pas d'autres incidents", répond la porte-parole de Monoprix. Quid des violences ? Là encore, la direction du groupe est formelle: les militants du collectif "Les empêcheurs d'encaisser en rond" ont bousculé les salariés:
"Des gens ont été poussés, violentés, des hôtesses de caisse et des cadres du magasin."
Tribunal correctionnel ou cour d'assises?
Pour le moment, les services du procureur de la République de Paris ne sont pas au courant de l'histoire et n'ont reçu aucune plainte. En théorie, les magistrats du parquet auront le choix des poursuites :
* Retenir la qualification de vol simple, mais avec des circonstances aggravantes, cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende, jugé par un tribunal correctionnel
* Pousser au vol en bande organisé, crime relevant de la cour d'assises, puni de quinze ans de réclusion criminelle
* Requalifier les faits comme une extorsion, punie de sept ans de prison et 100 000 euros d'amende:"L'extorsion est le fait d'obtenir par violence, menace de violences ou contrainte soit une signature, un engagement ou une renonciation, soit la révélation d'un secret, soit la remise de fonds, de valeurs ou d'un bien quelconque."
A Grenoble, où les autoréducteurs sont passés à l'action le samedi 27 décembre, Monoprix a également porté plainte, mais uniquement pour "vol", car "il n'y a pas eu de violences", précise l'enseigne. A Paris, Monoprix estime à 5 000 euros le montant des marchandises emportées, sans compter "le manque à gagner dû à l'arrêt de travail pendant une heure".
Un arrêt, ajoute la porte-parole, qui touche aussi les "salariés, tous intéressés aux résultats". Louable souci, le distributeur redoutant sans doute un possible effet de contagion de l'autoréduction.
http://torapamavoa.blogspot.com
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