Sarkozy en directeur des ressources humaines de la télé
A la suite de la prestation télévisée du président, le 16 novembre, la correspondante du Soir s'interroge sur cet étrange exercice, tout à la fois calvaire et adoubement pour les journalistes. Mais jamais ceux-ci ne sont dans leur rôle de contre-pouvoir face à un président qui se comporte en patron.
18.11.2010 | Joëlle Merkens |
- Courrier international
© AFP
Douze millions. C'est le nombre de téléspectateurs qui ont regardé Nicolas Sarkozy mardi soir [le 16 novembre] sur TF1, France 2 ou Canal Plus. Mais qu'ont-ils vu ? La longue interview du président par Claire Chazal, David Pujadas et Michel Denizot laisse une impression de profond malaise. Des journalistes rabroués, contredits, pris à partie, et finalement piégés comme à cet instant où la présentatrice de TF1 bredouille un "oui sans doute" quand le chef de l'Etat l'invite à acquiescer à sa version de l'expulsion des Roms cet été. Aucune question sur l'affaire de l'attentat de Karachi, qui a coûté la vie à 11 Français en 2002, et pour laquelle la justice s'oriente de plus en plus vers la piste d'une affaire de corruption impliquant Edouard Balladur et Nicolas Sarkozy. Aucune question de fond non plus sur l'affaire Bettencourt, dont l'un des volets porte sur le financement de la campagne présidentielle du candidat UMP en 2007. Une question sur les "écoutes" de journalistes et le vol d'ordinateurs de reporters d'investigation, certes. Mais qui, faute d'une ferme relance, donne tout le loisir au président de la retourner. Est-ce au chef de l'Etat de lutter contre la petite délinquance au sein d'une corporation ? Non, bien sûr. Mais il ne s'agit évidemment pas de ça...
Cette formule si française de l'interview présidentielle ne laisse pas d'étonner. Avant Nicolas Sarkozy, Jacques Chirac choisissait lui aussi ses interlocuteurs. Au gré des humeurs des communicants, le choix se posait sur tel ou tel journaliste à la mode ou dont l'image, plus jeune, branchée ou décalée selon ce que l'on recherchait, était susceptible, croyait-on, de déteindre positivement sur le président. François Mitterrand ne se laissait pas davantage bousculer. La seule fois où il l'a vraiment été, c'était par des journalistes... belges. Jean-François Bastin et Hugues Le Paige, de la RTBF, avaient osé pousser le président socialiste dans ses retranchements. Il s'agissait, déjà, d'une affaire d'écoutes. Cela leur avait valu d'être chassés de l'Elysée. Le ver est dans la lucarne. Impossible pour les journalistes de faire du zèle dans la pugnacité quand ils acceptent d'être choisis par celui qu'ils doivent interroger. Rien de neuf donc ? Si : ça s'aggrave ! La pression n'a sans doute jamais été aussi forte. "Sous la Ve République, les journalistes de télé n'ont jamais été pugnaces. La nouveauté, c'est que Sarkozy est le premier président qui aime vraiment la télévision et s'en occupe ainsi à ce point", explique le spécialiste français des médias Patrick Eveno.
Sarkozy apparaît de fait comme un véritable "directeur des ressources humaines" des médias. Il entretient lui-même la confusion sur son rôle de patron de chaîne quand il conclut son intervention télévisée, mardi soir, par un menaçant : "Nul n'est indispensable, Monsieur Pujadas !" Le malaise est ressenti par bon nombre de journalistes français. En témoigne cette anecdote, racontée récemment par une consœur. Lors d'un déplacement présidentiel, la cohorte de reporters se met d'accord pour que l'un d'eux pose ce jour-là la question qui fâche - en l'espèce, les sources du Monde. Mais la plupart rechignent alors à se dévouer... L'exercice du débat télévisé donne l'impression pour les journalistes de se transformer en calvaire. Et pourtant, beaucoup trépignent d'être élus. Du masochisme ?
Etrange système qui se mord la queue. Le problème est depuis longtemps identifié. La preuve : dès qu'un tel débat télévisé a lieu, les médias français ont l'habitude d'interroger les correspondants... étrangers. Ceux-ci livrent alors immanquablement (surtout s'ils sont britanniques) leur étonnement sur la manière dont il est organisé. On a souvent été surpris de s'entendre dire un "merci" appuyé à l'issue de ce genre de petit témoignage. Comme si le seul fait de le livrer en notre nom était déjà un soulagement pour certains.
Lorsqu'il a été élu, en 2007, Nicolas Sarkozy promettait une "république irréprochable". Celle-ci passe aussi par des relations plus saines avec les médias. A quand la rupture ?
Cette formule si française de l'interview présidentielle ne laisse pas d'étonner. Avant Nicolas Sarkozy, Jacques Chirac choisissait lui aussi ses interlocuteurs. Au gré des humeurs des communicants, le choix se posait sur tel ou tel journaliste à la mode ou dont l'image, plus jeune, branchée ou décalée selon ce que l'on recherchait, était susceptible, croyait-on, de déteindre positivement sur le président. François Mitterrand ne se laissait pas davantage bousculer. La seule fois où il l'a vraiment été, c'était par des journalistes... belges. Jean-François Bastin et Hugues Le Paige, de la RTBF, avaient osé pousser le président socialiste dans ses retranchements. Il s'agissait, déjà, d'une affaire d'écoutes. Cela leur avait valu d'être chassés de l'Elysée. Le ver est dans la lucarne. Impossible pour les journalistes de faire du zèle dans la pugnacité quand ils acceptent d'être choisis par celui qu'ils doivent interroger. Rien de neuf donc ? Si : ça s'aggrave ! La pression n'a sans doute jamais été aussi forte. "Sous la Ve République, les journalistes de télé n'ont jamais été pugnaces. La nouveauté, c'est que Sarkozy est le premier président qui aime vraiment la télévision et s'en occupe ainsi à ce point", explique le spécialiste français des médias Patrick Eveno.
Sarkozy apparaît de fait comme un véritable "directeur des ressources humaines" des médias. Il entretient lui-même la confusion sur son rôle de patron de chaîne quand il conclut son intervention télévisée, mardi soir, par un menaçant : "Nul n'est indispensable, Monsieur Pujadas !" Le malaise est ressenti par bon nombre de journalistes français. En témoigne cette anecdote, racontée récemment par une consœur. Lors d'un déplacement présidentiel, la cohorte de reporters se met d'accord pour que l'un d'eux pose ce jour-là la question qui fâche - en l'espèce, les sources du Monde. Mais la plupart rechignent alors à se dévouer... L'exercice du débat télévisé donne l'impression pour les journalistes de se transformer en calvaire. Et pourtant, beaucoup trépignent d'être élus. Du masochisme ?
Etrange système qui se mord la queue. Le problème est depuis longtemps identifié. La preuve : dès qu'un tel débat télévisé a lieu, les médias français ont l'habitude d'interroger les correspondants... étrangers. Ceux-ci livrent alors immanquablement (surtout s'ils sont britanniques) leur étonnement sur la manière dont il est organisé. On a souvent été surpris de s'entendre dire un "merci" appuyé à l'issue de ce genre de petit témoignage. Comme si le seul fait de le livrer en notre nom était déjà un soulagement pour certains.
Lorsqu'il a été élu, en 2007, Nicolas Sarkozy promettait une "république irréprochable". Celle-ci passe aussi par des relations plus saines avec les médias. A quand la rupture ?
un article propulsé par TORAPAMAVOA :
http://torapamavoa.blogspot.com Clikez LIRE LA SUITE ci dessous pour lire la suite de l'article...^^
1 commentaire:
Une exposition du cosy, un suffixe de 2007 <> 2012 à Nîmes > plus d'informations sur http://www.frompointtopoint.com/article-2007-cosy-2012-exposition-dhs-59324403.html
Cordialement.
Enregistrer un commentaire