24/04/2007

Vivelefeu Le Monde et Nicolas

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Le Monde, son patron et Nicolas
Texte : Jean-Marie Colombani, patron de "Le Monde", a poussé hier, à la Une dudit, l'un de ces longs et rauques feulements éditoriaux qui font dire à Edwy Plenel que: "Tiens, le gars va encore nous balancer du Sarkozy long comme le bras".

Il est vrai: l'enjeu était de taille, puisqu'il s'agissait, au lendemain du premier tour de la présidentielle, de saluer "une double victoire: celle de la démocratie sur elle-même; et contre ses extrêmes".

Le "style" de Jean-Marie Colombani peut certes rebuter - mais il faut lire ce qu'il écrit, pour ce que cela révèle de sa prédisposition à une certaine forme de...

De...

Ah, je sais pas, tiens.

Noter d'abord: "Ses extrêmes".

Gauche et droite confondu(e)s, car il va de soi, dans l'univers nourricier de Jean-Marie Colombani, que Besancenot vaut Le Pen - et qu'une franche calomnie vaut mieux que deux tu l'auras, surtout si elle est sans fin répétée.

Noter aussi (et surtout) que cette commode vilenie permet à Jean-Marie Colombani de nous suggérer dès l'abord (c'est d'évidence l'un des thèmes que "Le Monde" va décliner jusqu'au second tour) que Nicolas Sarkozy, lui, n'est pas (du tout) extrémiste - à la différence du Pen.

Il est bien connu en effet qu'un abîme sépare Nicolas Sarkozy de l'extrême droite.

Ainsi, Nicolas Sarkozy trouve gênants les milliards de musulmans qui, dans nos villes et nos campagnes, égorgent des moutons dans leurs baignoires - quand l'extrême droite les trouve, elle, dégoûtants.

De la même façon, Nicolas Sarkozy préconise la création d'un grand ministère de l'Identité nationale et de l'Immigration, alors que l'extrême droite veut un grand ministère de l'Immigration et de l'Identité nationale.

Et ainsi de suite: on n'en finirait pas d'énumérer les ruptures tranquilles qui font de Nicolas Sarkozy un homme de grande(s) ouverture(s), pendant que les fachos seraient plutôt du genre facho.

Après avoir ainsi posé que la victoire de Nicolas Sarkozy est celle de la démocratie (ouf), Jean-Marie Colombani, que démange une furieuse pulsion littéraire ("le gars se prend carrément pour une espèce de Paulo Coelho", estime Edwy Plenel), salue, en des termes qui rappellent assez le Virgile des "Bucoliques", en (beaucoup) plus raffiné: "L'image d'un pays serein, citoyen, qui redécouvre la politique, qui se réapproprie l'élection présidentielle (...)".

La morgue néo-libérale a ceci de plaisant, qu'elle se repère assez facilement.

Le coup de pied du con de votant au dodu postérieur de Lionel "Mon programme n'est pas socialiste" Jospin?

Ce n'était pas de la politique.

Le "non" du même à l'Europe du président Estaing?

Ce n'était pas de la politique.

Nous dit Jean-Marie Colombani, qui fait de grosses poussées d'urticaire à chaque fois que le peuple néglige de se plier aux injonctions de "Le Monde".

Pour Jean-Marie Colombani, la France qui dépose dans l'urne un bulletin différent de celui dont Jean-Marie Colombani lui a vanté le grammage ne fait pas de politique: elle erre, con et désemparée.

Jean-Marie Colombani continue ensuite son homélie, et se tourne, radieux, vers "un deuxième tour moins ouvert, certes, qu'il n'eût été souhaitable, tant le rapport des forces est favorable à la droite, mais qui s'annonce porteur d'un débat sérieux. Et prometteur".

Deuxième service, pour qui aurait manqué le premier: le rapport des forces est favorable à la droite, mais c'est, rappelez-vous, une droite farpaitement respectable, qui va nous refiler du bon gros débat sérieux et prometteur - et non de puants racolages type y-a-le-bougnoule-du-troisième-qui-fait-rien-qu'à-massacrer-des-ovins-dans-son-bac-à-douche, comme l'aurait certainement fait l'extrême droite.

Merci qui?

Merci Nicolas Sarkozy.

Jean-Marie Colombani, débondé, le répète alors pour la troisième fois: "En écartant les voies les plus démagogiques, en suivant le candidat de la "rupture" et la candidate du "changement", les Français se sont déclarés prêts à bouger".

Jean-Marie Colombani nous offre là un amusant petit jeu: démagogie, Sarkozy, cherchez l'intrus.

Edwy Plenel: "Ici, le gars ne lèche plus: il se goinfre carrément".

(Oui, Edwy.)

Et Jean-Marie Colombani d'enchaîner, chaud comme la braise: "François Fillon a dit la possibilité qui existe, et qui se concrétisera peut-être, de surmonter les inquiétudes: que la France reprenne confiance, qu'elle écarte le "nonisme" généralisé qui semblait lui tenir lieu d'idéologie, tel est désormais l'enjeu pour le pays".

François Fillon, qui est quelqu'un de très bien (sans quoi il ne serait pas lové au creux de l'aisselle du champion de la droite prometteuse qui débat sérieusement), pense, exactement comme Jean-Marie Colombani, que le "nonisme" est une infection de l'esprit, une "idéologie" dont nul(le) ne peut exclure sans débat sérieux (et prometteur) qu'elle soit, aussi, génétique.

Jean-François Colombani, après une courte respiration qui lui a permis de vérifier l'orthographe du mot "niveau", continue sa mission de promotion: "Nicolas Sarkozy a réussi son pari, qui était d'aspirer une part du vote Le Pen et de ramener celui-ci à un niveau où il cesse de peser".

(Dans la démocratie rêvée de Jean-Marie Colombani, à 10 % tu pèses rien, alors t'imagines bien, c'est à toi que je parle, facteur, qu'avec tes 4 % tu ferais mieux de choisir l'exil.)

Nicolas Sarkozy a mis son pas dans le pas du Pen, mais ce n'était pas du tout, nous rassure Jean-Marie Colombani, le plus obscène racolage des vingt dernières années: il s'agissait, au contraire, d'un audacieux et courageux pari démocratique.

Or, ce pari, Nicolas Sarkozy, qui est très fort, l'a bien évidemment gagné.

Haut la main.





Conscient, qui sait, de l'énormité du propos, Jean-Marie Colombani en remet alors une dernière louche, sous la forme d'une question faussement iconoclaste, suivie d'une réponse euphorisante.

La question: "L'ultra-droitisation du discours de Nicolas Sarkozy pour réussir son opération de captation constitue-t-elle un prix trop élevé et une promesse de clivage exacerbé s'il est élu?"

Réponse (totalement inattendue): non, parce que dimanche soir, Nicolas Sarkozy "a prononcé un discours aux accents "de gauche", tout entier centré sur une promesse de "protection" tous azimuts, et en particulier en direction des plus faibles".

Nicolas Sarkozy n'est pas un peu sympa: il est très, très, très sympa.

Nous rappelle Jean-Marie Colombani.

Puisqu'il veut, on vient de vous le dire, protéger tout le monde, mais surtout les plus démunis.

Voilà une excellente nouvelle, qui va faire très plaisir à la "famille avec femme enceinte et bébé" qui vient, d'après le RESF, d'être arrêtée par la PAF à Strasbourg, et qui va être expulsée vers l'Allemagne, puis l'Azerbaïdjan.

Voilà des gens qui sauront gré à Jean-Marie Colombani de sa rigoureuse indépendance.

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