PARIS (Reuters) - Jacques Chirac a engagé sa bataille avec les juges par un refus de répondre à une convocation dans le dossier des faux listings de la société Clearstream et une convocation pour interrogatoire dans le dossier des emplois fictifs de la Ville de Paris.
L'ancien président a avancé un argument de droit pur pour refuser de témoigner dans le dossier Clearstream, selon lequel sa venue serait contraire à la Constitution et au principe de séparation des pouvoirs.
Dans le dossier concernant les rémunérations frauduleuses par la Ville de Paris de cadres du RPR, au début des années 1990, l'ex-chef de l'Etat a, selon le journal Le Parisien de samedi, été convoqué oralement par le juge d'instruction de Nanterre (Hauts-de-Seine) Alain Philibeaux.
Cette oralité empêche toute diffusion publique de l'heure et du lieu de l'interrogatoire, contrairement à la méthode usuelle utilisée en 2000 par le juge de Créteil Eric Halphen, qui avait convoqué en vain Jacques Chirac dans l'affaire des HLM de Paris en envoyant un formulaire type à l'Elysée par la poste.
Dans le dossier de Nanterre, Jacques Chirac serait selon le Parisien interrogé en qualité de "témoin assisté", statut intermédiaire entre témoin simple et mis en examen, qui lui épargnerait un procès s'il est maintenu jusqu'à la fin de la procédure.
Contacté par Reuters samedi, Me Jean Veil, son avocat, a assuré que la convocation n'existait pas, comme il l'avait fait dans le dossier Clearstream à la mi-juin.
Interrogé sur la ligne de défense de Jacques Chirac dans ce dossier, l'avocat a déclaré : "Les réponses de Jacques Chirac seront prioritairement données aux magistrats, par respect pour l'autorité judiciaire."
CHIRAC DEPRIME
Me Jean Veil, fils de Simone Veil, qui a défendu dans le passé le socialiste Dominique Strauss-Kahn, a pris avec son associé Emmanuel Rosenfeld la défense des intérêts de Jacques Chirac, 74 ans, depuis l'expiration de son immunité le 16 juin.
Le président est rentré à la mi-juin de vacances au Maroc, a emménagé quai Voltaire à Paris dans un logement prêté par la famille de l'ancien Premier ministre libanais Rafic Hariri. Ses proches le disent selon le Parisien très déprimé par la bataille engagée avec les juges, où il n'a reçu le soutien public d'aucune personnalité UMP.
Aux magistrats qui voulaient entendre Jacques Chirac avant la fin juillet, l'équipe de juristes a opposé l'article 67 de la Constitution, qui stipule que le président n'est pas responsable des actes commis dans ses fonctions, sauf devant la Haute cour.
"Ces dispositions, qui sont au coeur de notre démocratie, visent à assurer le respect du principe fondamental de séparation des pouvoirs et à créer les conditions du bon fonctionnement du pouvoir exécutif. A ce titre, elles excluent qu'un ancien chef de l'Etat puisse être contraint à fournir un témoignage sur des faits accomplis ou connus durant son mandat et dans l'exercice de ses fonctions", dit le communiqué diffusé par Jacques Chirac vendredi.
Cette analyse, discutable puisqu'il ne s'agit pas de mettre en cause l'ex-président mais de recueillir son témoignage, est partagée par des constitutionnalistes. Le parquet de Paris, sans délivrer de position officielle, a fait valoir que le problème risquait de se poser.
L'usage par les juges Jean-Marie d'Huy et Henri Pons de la force pour faire venir Jacques Chirac dans leur cabinet, comme ils en ont la possibilité théorique, est donc peu probable.
Jacques Chirac pourra aussi évoquer ce point de droit s'il est convoqué dans les enquêtes concernant la mort du magistrat Bernard Borrel à Djibouti en 1995.
Restent la demi-douzaine de dossiers visant la période où il était maire de Paris, distincts de celui de Nanterre. S'agissant de ces affaires, "le président Chirac a demandé à son avocat Me Jean Veil de prendre contact avec les magistrats en charge de ces dossiers pour les informer qu'il était à leur disposition pour répondre aux questions qui lui seraient utilement posées", dit le communiqué de Jacques Chirac.
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