LE MONDE | 14.06.07 | 15h05 • Mis à jour le 14.06.07 | 15h05
Officiellement, pour la direction nationale de Buffalo Grill, tout a commencé le 17 février. Le restaurant d'Orgeval (Yvelines) est contrôlé inopinément par des gendarmes, qui découvrent que quatre salariés ont de faux papiers. Le groupe vérifie alors les documents de ses 600 salariés étrangers.
Or, la préfecture des Yvelines a une autre version. Il n'y a pas eu de contrôle le 17 février. Une intervention était prévue le 19, mais a été reportée car "les salariés concernés n'étaient pas présents", dit-on à la préfecture des Yvelines. On assure que "ce contrôle faisait suite à une dénonciation du responsable du restaurant d'Orgeval".
Les quatre salariés sans papiers de cet établissement y ont travaillé plusieurs années. Selon eux, leur manager les aurait prévenus le 15 février : "J'ai reçu un coup de téléphone des gendarmes. Vous avez de faux papiers. Faut démissionner." Ils refusent et ne mettent plus les pieds au restaurant.
Le 2 mars, ils sont convoqués pour un entretien préalable de licenciement, mais sont arrêtés durant l'entrevue. La préfecture atteste que le responsable d'Orgeval était "en contact" avec la gendarmerie.
Pourquoi les dénoncer ? Saloum Cissokho a sa version. Il s'est présenté aux élections syndicales sous les couleurs de la CGT en septembre 2006 : "J'ai dénoncé nos conditions de travail. Ça n'a pas plu au chef." Leur manager aurait fait pression sur des membres du personnel pour qu'ils ne votent pas pour lui. Le cégétiste perd.
"UN CONTRÔLE VOLONTAIRE"
Après des élections de ce genre, le salarié candidat bénéficie d'une protection de six mois, qui a pris fin en février. "Mon chef s'est vengé en nous dénonçant, prétend Saloum Cissokho. Car tous les sans-papiers ont voté pour moi." Contacté, le manager du restaurant d'Orgeval n'a pas souhaité s'exprimer.
La direction nationale de Buffalo Grill affirme ignorer cette histoire. Mais pas la direction régionale. Dans une lettre adressée le 28 mars à M. Cissoko, elle écrit : "Un contrôle volontaire (a été) demandé par le restaurant d'Orgeval auprès des services de la préfecture de police".
Le 6 juin, le parquet d'Evry a ouvert une enquête préliminaire pour cerner la responsabilité de la direction de la chaîne dans ces embauches. Le président du directoire du groupe, Erich Harasymczuk, et la DRH ont été entendus par la justice. Selon le procureur de la République, Jean-François Pascal, "aucun élément ne permet de mettre en cause la direction".
Désormais les enquêteurs vont se diriger vers les chefs d'établissement de la région parisienne. Car ils ont toute autonomie en matière d'embauche.
Mustapha Kessous
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