25/06/2007

Jacques Chirac : pas responsable et... pas coupable ?

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Convoqué seulement comme témoin par les juges d’Huy et Pons dans la fameuse affaire Clearstream, le président Chirac invoque l’article 67 de notre Constitution - article récemment modifié avant son départ de la présidence - pour ne pas répondre à cette injonction, d’ailleurs très discrète, au départ.



D’abord deux constats :


1- Pourquoi le président Chirac juge-t-il utile et opportun d’invoquer cet article s’il n’a commis aucun acte délictueux dans l’affaire citée ? Celui qui n’a rien à se reprocher n’a pas à avoir peur de la justice de son pays.


2- Pourquoi les juges, qui ne méconnaissent pas à priori le droit et surtout l’article 67 (*), feraient-ils fi du contenu de ce fameux article en convoquant tout de même notre ancien président ? Auraient-ils pensé que ce n’est pas dans l’exercice de ses fonctions que Jacques Chirac aurait été amené à jouer un rôle dans l’affaire Clearstream ? Si c’était le cas, l’article 67 n’aurait aucun effet et la personne convoquée devrait être interrogée, voire peut-être mise en examen.


Ensuite sur le fond du fameux article, pourquoi un président, fût-il le nôtre, serait-il définitivement non responsable des actes accomplis durant son mandat, à part ceux qui relèvent de l’article 68 (*) de la Constitution pour haute trahison notamment et ceux qui relèvent de la Cour pénale internationale, article 53-2 (*) du même texte ?


Dans notre Code civil, une disposition identique, d’irresponsabilité, permet souvent d’exonérer des majeurs sous tutelle ou curatelle (respectivement articles 389 et 508 du Code civil) des actes qu’ils accomplissent. Le président serait-il, durant son mandat, passible d’irresponsabilité comme une personne sous sauvegarde de justice ? Cela dépasserait l’entendement du citoyen de base que nous sommes. Une telle acception relèverait d’une république bananière. Pas de la nôtre !


Enfin, on note que dans l’article 67 alinéa 3, il est fait mention que les procédures suspendues durant le mandat du président et à cause dudit article, peuvent tout à fait reprendre à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la fin dudit mandat. Il est bien expressément dit qu’elles... peuvent reprendre !


Faut-il être constitutionnaliste pour bien lire et comprendre de quoi il s’agit ? Nous en doutons ! L’écriture de l’article 67 est claire comme de l’eau de roche. Le président Chirac peut bien désormais être convoqué par un juge. Tel un simple citoyen lambda. Sur quelque affaire que ce soit, même celle(s) pour haute trahison ou celle(s) du ressort de la Cour pénale internationale.


Pourquoi les médias laissent-ils entendre aujourd’hui que cela ne serait pas possible ? Ont-ils bien lu l’article invoqué ? Dans le doute, nous proposons qu’ils le relisent à la lumière de ces quelques lignes et qu’ils nous tiennent au courant de la suite de cette fameuse affaire.


Il en va du fondement de notre loi organique, de sa crédibilité et de son interprétation d’un point de vue purement citoyen !




(*) Extraits de la Constitution. Les articles 67 et 53-2 sont repris dans leur intégralité.


Article 67 : Le président de la République n’est pas responsable des actes accomplis en cette qualité, sous réserve des dispositions des articles 53-2 et 68.


Il ne peut, durant son mandat et devant aucune juridiction ou autorité administrative française, être requis de témoigner non plus que faire l’objet d’une action, d’un acte d’information, d’instruction ou de poursuite. Tout délai de prescription ou de forclusion est suspendu.


Les instances et procédures auxquelles il est ainsi fait obstacle peuvent être reprises ou engagées contre lui à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la cessation des fonctions.


Art. 53-2. - La République peut reconnaître la juridiction de la Cour pénale internationale dans les conditions prévues par le traité signé le 18 juillet 1998.


Article 68 : Le président de la République ne peut être destitué qu’en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat. La destitution est prononcée par le Parlement constitué en Haute Cour...

par Aimé FAY

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