«Si on n'obtient rien aujourd'hui, on continue la grève»
Les syndicalistes de la CGT devant le KFC, vendredi matin à Paris (e.b)
REPORTAGE • Les employés du KFC des Halles entament aujourd'hui leur troisième jour de grève. Objectif de la journée: obtenir gain de cause en bloquant le restaurant. Ils réclament le paiement de leurs jours de grève avant d'établir les négociations salariales.
Par Elodie BOUGOIN
LIBERATION.FR : vendredi 15 juin 2007
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Vendredi matin, sept heures à peine et les rues presque désertes. Marc, délégué syndical CGT, aidé d'un de ses collègues, installe banderoles et tracts devant le restaurant Kentucky Fried Chicken (KFC) des Halles, dans le 1er arrondissement de Paris. Ils plantent le décor d'une longue journée de grève, la troisième de cette semaine.
Les grévistes demandent que le temps d'habillage et de déshabillage (10 minutes par jour) leur soit payé. Selon eux, la direction s'y était engagée en 2001, et ne l'a jamais fait depuis. «On veut cette somme qui nous est due. Mardi soir ils ont mis fin aux discussions entamées depuis un an, donc on s'est mis en grève». Les grévistes réclament aussi une augmentation de salaire, une prime d'intéressement et un 13e mois.
«On réclame une reconnaissance pour le chiffre d'affaire qu'on fait ici», explique une employée, en poste depuis 3 ans. De fait, le KFC des Halles est celui qui effectue le plus gros chiffre d'affaire de la chaîne. Les grévistes espèrent que la situation pourra s'étendre un peu partout, dans le cas où ils n'obtiendraient rien aujourd'hui.
Un peu après huit heures, un des directeurs du site arrive. L'air grave, il prend sont téléphone et contacte des employés d'autres KFC parisiens, afin de former une équipe capable d'assurer la service. Il ne s'exprime pas sur la situation mais d'un ton ironique lance aux grévistes : «J'allume quand même les caisses parce qu'on va travailler aujourd'hui! »
«Ils sont en train d'appeler à droite et à gauche pour les remplacements mais on les bloquera à l'entrée, affirme Najia, déléguée syndicale de la CGT. On va attraper les gens pour leur expliquer les raisons de notre grève, gentiment, pour qu'ils nous suivent. On ne se bat pas juste pour le KFC des Halles, c'est un problème national.»
Une «conseillère» du service des ressources humaines de KFC arrive. Sans dire bonjour, elle tend sèchement sont téléphone à Youssouf, un employé de longue date. A l'autre bout du fil, Magid, directeur du site, essaye de le convaincre de travailler. Il ne le fera pas plier: «S'il faut foutre le bordel, on le fera», dit Youssouf.
Pendant que le mouvement s'organise, les passants, intrigués, s'arrêtent pour lire les tracts. «Malheureusement ce genre de situation ça devient classique. Avec le nouveau gouvernement ça n'est pas prêt de changer», déclare un habitant du quartier, d'une soixantaine d'années.
De son côté, la direction est prête à négocier mais sous certaines conditions: «On a dit aux délégués syndicaux qu'on acceptait de négocier sur les salaires, une fois que le travail aura repris normalement», affirme le directeur des Ressources Humaines de KFC France.
Du côté des salariés, il n'est pas question de reprendre le travail sans avoir la certitude que les jours de grèves seront rémunérés. «Hier, ils nous ont dit que ces jours seraient payés. Mais une fois que les salariés se sont dispersés, ils sont revenu sur leur parole! » s'indigne une gréviste.
«La direction a toujours tenu le même discours à propos de la rémunération des jours de grève, répond le responsable du service des ressources humaines. Ils ont le droit de faire grève mais ils ne seront pas payés. Il sera possible cependant de faire des heures supplémentaires, quand ils le veulent, pour rattraper le manque»
Certains salariés sont venus travailler. «Ils prennent les employés par les sentiments, ils les font culpabiliser, assure Ambroise, syndicaliste CGT. La petite, là, elle travaille parce que la direction l'a aidé à trouver un appartement. Donc elle se sent obligée de venir».
A 9h30, les syndicalistes branchent le mégaphone : «Venez boycotter KFC !». Curieux, les commerçants du quartier viennent voir ce qui se passe. Des passants s'arrêtent pour signer la pétition.
«Si on n'obtient rien aujourd'hui on continue la grève, affirme Marc. Je pense que la direction fera un geste, ils perdent beaucoup trop d'argent depuis le début du mouvement».
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